CIAC 2000 - Documents

Résumé en français
(résumé et traduit par Zeenat Mackwani pour le CIAC 2000)
 

Gary Craig (1998) "Community development in a global context" in Community development journal, vol.33, 1, janvier, pp. 2-17


Le Développement communautaire dans un contexte global

 
Abstract : Le développement communautaire est souvent pensé comme une approche essentiellement locale pour résoudre les problèmes. Avec la globalisation de l’économie et l’émergence d’organisations transnationales s’occupant de problèmes économiques et sociaux, le développement communautaire doit être revu pour y intégrer la dimension globale. Cet article met en lumière certains paramètres du débat. Il est aussi une réflexion sur la manière dont les processus globaux affectent les communautés locales, et sur les moyens, découlant des mécanismes globaux, dont les intervenants communautaires peuvent se prévaloir pour agir.
1. Introduction

Il est important de souligner la relation entre le développement communautaire et d’autres formes et niveaux d’action sociale et politique, ainsi que de réfléchir sur les processus globaux majeurs, économiques, idéologiques, politiques et sociaux à prendre en compte dans la réflexion sur le développement communautaire.

2. Le flou du communautaire

Il faut noter le regain d’intérêt pour les concepts de communauté et de développement communautaire à l’échelle locale, nationale et internationale. Les différents projets politiques ont des implications en terme de développement communautaire très variés. Ainsi en Grande-Bretagne les pouvoirs locaux ont souvent pris la relève des pouvoirs centraux. Toutefois cette participation communautaire peut aussi dissimuler derrière un discours volontariste et participatif des coupures dans des services de première ligne. Ainsi le concept de communautaire attire car il est récupérable par différentes orientations politiques.

Il devient alors urgent de réaffirmer les fondements idéologiques du développement communautaire. Il faut se demander jusqu’à quel point les valeurs de justice sociale, de dignité humaine, de participation à la prise de décision, de mutualité et d’égalité sont incluses dans ce qui se réclame du « communautaire ». Ou au contraire on invoque le développement communautaire pour inciter les gens à s’adapter à des changements qui leur sont imposés par des intérêts politiques et économiques peu soucieux de leurs besoins et de leurs souhaits. Il faut donc défendre un développement communautaire qui ne soit pas dilué par les différentes orientations politiques, mais qui repose certainement sur la tolérance et la dignité humaine, sur les besoins et non la convoitise, sur une interdépendance créatrice et non une compétition destructrice.

Ces confusions idéologiques sont en partie dues à l’effondrement des régimes des pays de l’Est. En effet les penseurs de droite ont bénéficié d’une période de triomphe politique, clamant la mort du socialisme et la supériorité du capitalisme sur toutes les autres formes d’organisations économiques. On a sans doute anticipé la mort des solutions collectives aux problèmes économiques et sociaux.
 

3. Le pouvoir économique global

Les conséquences de décisions économiques se font ressentir de plus en plus vite par un nombre croissant d’individus qui ne les prennent pas, et qui se trouvent peut-être à des milliers de kilomètres. Le changement se fait plus rapide, mais les coûts et les bénéfices de ces changements sont de plus en plus distribués inégalement. La globalisation du pouvoir économique n’a pas résulté en un partage plus global, mais au contraire plus concentré entre les mains de personnes qui n’ont aucun mandat démocratique, tels le milieu financier. Les intervenants communautaires sont souvent appelés par les gouvernements pour contribuer à une gestion pacifique des changements économiques. Toutefois notre tâche n’est pas tant d’aider les gens à s’ajuster à l’insécurité et à la fragmentation, que de donner voix à leurs besoins et à leurs aspirations.

4. Libre et pauvre ?

Nous devons faire face à l’hégémonie idéologique du libre marché comme la solution évidente aux problèmes économiques. Des exemples provenant des pays de l’Est, ou des pays en voie de développement, ou encore du sud-est asiatique et même des pays occidentaux, montrent clairement une paupérisation grandissante et l’impossibilité pour les seuls mécanismes du marché de répondre aux besoins des individus de manière satisfaisante. Au contraire ceux-ci ont engendré une division économique et sociale grandissante. Les processus créant la pauvreté sont dans leur essence les mêmes à travers le monde.
 

5. Conflits

On remarque un accroissement des conflits intercommunautaires basés sur des différences ethniques, nationales, culturelles ou religieuses. Même dans ces situations de conflits et de divisions marquées, le développement communautaire a un rôle clé à jouer. Par exemple, les personnes travaillant pour des organismes communautaires sont souvent appelées pour faciliter la réinstallation des réfugiés. Ceci souligne la valeur de base universelle dans le développement communautaire qui est de rejoindre des groupes défavorisés, de confronter la montée de politiques identitaires sectaires sur la scène globale. La montée de mouvements sociaux reposant sur des particularités telles la race, le sexe, l’âge… a été un des développements politique les plus remarquables dans les années 80. Cependant, les politiques identitaires ne sont pas nécessairement la base pour des formes d’actions progressistes. L’intervenant communautaire doit interroger ces revendications pour savoir jusqu’à quel point elles supportent les valeurs de respect humain et de dignité pour tous, et en quoi ces mouvements soutiennent la lutte d’autres groupes opprimés.

6. Connections transnationales

Les blocs transnationaux risquent de créer plus de divisions internationales entre riches et pauvres, reflétant les divisions entre chacune des nations ; aussi les institutions politiques transnationales sont encore moins sujettes aux mandats démocratiques. Il est important de reconnaître le travail de groupes de pression transnationaux qui vont au-delà des intérêts et des allégeances politiques et économiques régionales pour traiter des problèmes de développement, de pauvreté, de biodiversité, d’environnement et de changements climatiques.

7. Surfers communautaires

Le dernier paramètre est la croissance rapide de la communication globale. Il y a beaucoup d’implications, bonnes et mauvaises, pour le développement communautaire : mais nous devons nous rappeler que dans l’euphorie générale, il y a encore beaucoup de pays où l’information est peu accessible, créant un fossé de plus en plus important entre ceux qui y ont accès et ceux qui n’y ont pas. La communication globale peut nous aider à confronter et utiliser le pouvoir économique global : elle est un moyen pour les intervenants communautaire d’échanger, de s’impliquer et de faire le lien entre nos convictions personnelles et notre engagement professionnel.
 

8. L’avenir du développement communautaire

L’éventail des défis qui se posent aux intervenants communautaires est le même que celui qui se pose à des milliards de personnes luttant contre la pauvreté, l’exclusion, la maladie et l’oppression, d’où la nécessité d’une action locale et d’alliances mondiales comprenant les enjeux globaux.

Le développement communautaire est une méthode de travail qui prend en compte les besoins et les aspirations des groupes défavorisés. Il lutte pour impliquer et organiser ces groupes politiquement autour de leurs besoins et de leurs aspirations qui sont alors mis à l’avant et non à l’arrière du débat politique. Le développement communautaire essaie de donner aux gens ordinaires une voie de s’exprimer et d’agir dans leurs intérêts, et non selon ceux dictés par une économie globale et le pouvoir politique, pour contrecarrer l’instrumentalisation du bien-être et des humains.