LABORATOIRE DE RECHERCHE SUR LES PRATIQUES
ET LES POLITIQUES SOCIALES

CAHIERS DU LAREPPS

No: 99-01
 
 

L’aide à domicile au Québec:
relecture de l’histoire et pistes d’action
 
 

par:

Yves VAILLANCOURT et Christian JETTÉ



 
 
 
 
 
 
 
 
La production de ce texte a été rendue possible grâce à des travaux de recherche soutenus, entre autres, par des subventions de recherche du CQRS et du DRHC pour l’équipe de recherche en partenariat sur la thématique “Économie sociale, santé et bien-être”et du CRSH et du FODAR pour le projet 30 ans de développement despratiques en travail social au Québec (1960 à 1990).

 Ce texte est une version modifiée de la conférence de Yves Vaillancourt au Colloque sur l’aide à domicile en Montérégie intitulé «Les enjeux de l’an 2000» (11-12 mars 1999)


 
 

DÉPARTEMENT DE TRAVAIL SOCIAL
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
© LAREPPS/UQAM, avril 1999
 
 
 
 
 
 

IDENTIFICATION DES AUTEURS








Yves Vaillancourt détient un doctorat en science politique. Il est professeur titulaire au département de travail social de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il fait de la recherche, de l’enseignement et de l’intervention dans le domaine des politiques sociales depuis 25 ans. Son implication dans la recherche se fait principalement par le biais du Laboratoire de recherche sur les pratiques et les politiques sociales (LAREPPS), dont il est le coordonnateur, ainsi que par l’entremise de l’équipe «Économie sociale, santé et bien-être» dont il est aussi l’un des deux coordonnateurs (cette dernière équipe est financée par le Conseil québécois de la recherche sociale et par Développement des ressources humaines du Canada). Yves Vaillancourt est également membre du Centre de recherche sur les innovations sociales dans les entreprises, les syndicats et l’économie sociale (CRISES), membre du Conseil de la santé et du bien-être et directeur, depuis sa fondation en 1988, de la revue Nouvelles pratiques sociales (NPS).
 
 

 Christian Jetté détient un baccalauréat en travail social et une maîtrise en sociologie. Il est actuellement inscrit au doctorat au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il collabore à des équipes de recherche depuis près d’une dizaine d’années, d’abord comme étudiant, puis en tant que professionnel de recherche. Christian Jetté est secrétaire général du LAREPPS et membre de l’équipe «Économie sociale, santé et bien-être». Il est membre, depuis 1993, du comité de rédaction de la revue Nouvelles pratiques sociales (NPS).
 
 

 TABLE DES MATIÈRES







Introduction

I- L’analyse de la situation à partir de notre coffre à outils  méthodologiques

II- Une relecture de l’histoire de l’aide à domicile au Québec en cinq périodes

2.1  PREMIÈRE PÉRIODE (les années 1970):
       Une politique d’hébergement, d’enfermement et d’hospitalisation  caractérisée
       par l'absence de politique d’aide à domicile

2.2 DEUXIÈME PÉRIODE (1979-1983):
       L'avènement de la politique de services à domicile de 1979 et l'accent mis
       sur l’offre publique et sur l’offre bénévole

2.3 TROISIÈME PÉRIODE (1984-1990):
       La politique de 1979 est maintenue officiellement, mais, dans les faits, la  privatisation
       se développe

2.4 QUATRIÈME PÉRIODE (1990-1995):
       Expérimentation du recours à des ressources de l’économie sociale pour  répondre
       à des besoins d’aide domestique dans certains territoires

2.5 CINQUIÈME PÉRIODE (1996-1999):
      Instauration d'une politique d'économie sociale en aide domestique dans un
      contexte de virage ambulatoire incitant les ressources publiques des CLSC à  répondre
      à des besoins d’abord médicaux
 

III- Pistes pour l’action

3.1 Ne pas s’enfermer dans la dénonciation,

3.2 Sortir du placard la Politique de la santé et du bien-être et surveiller le retour en force de l’hospitalo-centrisme

3.3 Revendiquer une augmentation significative des postes d’auxiliaires familiales de CLSC

3.4 S’attaquer aux iniquités des programmes d’aide aux personnes vivant des  incapacités

3.5 Faire entrer les valeurs de l’économie sociale  dans l’aménagement du recours aux ressources intermédiaires 18

3.6 Pistes d’action plus spécifiques concernant les entreprises d’économie sociale  en aide domestique

 3.6.1 Pour une stratégie globale offensive et proactive et non pas défensive et nostalgique concernant le développement en cours des entreprises d’économie sociale en aide domestique

  3.6.2 Éviter l’élargissement de la programmation des activités des entreprises d’économie sociale qui amènerait un empiètement sur les activites des ressources publiques, i.e. celles des CLSC

 3.6.3Pour un véritable rapport de partenariat de l’économie sociale

3.6.4 Pour une formation sociale et professionnelle des personnes qui  produisent les services à partir des entreprises d’économie sociale

3.6.5 Pour un mode de financement des services qui assure l’accessibilité des services aux personnes à faibles revenus dans le besoin

3.6.6 Pour l’établissement de nouveaux partenariats entre chercheurs et intervenants afin de favoriser le développement d’une mesure de l’impact social des entreprises d’économie sociale
 

Conclusion
 

Bibliographie
 
 

Introduction

 Parmi les diverses composantes des services de proximité, les services à domicile constituent sans doute un des champs d’activités les plus pertinents pour les personnes qui s’intéressent aux transformations en cours dans le domaine de la santé et des services sociaux. Ce champ d’activités représente un laboratoire vivant dans lequel se déploient les transformations les plus significatives des règles du jeu concernant le financement, la régulation et la livraison (provision)  des services. Concernant leur livraison, disons qu'on assiste depuis une quinzaine d'années à l'expérimentation d'un nouveau partage de responsabilités entre l'État, le marché, l'économie sociale (OSBL et coopératives) et le secteur informel (unpaid providers)  . Notamment, en cette deuxième moitié des années 1990, on assiste à l'institutionnalisation d'un nouveau partage de responsabilités entre l'État et l’économie sociale dans un domaine très spécifique de services à domicile, soit les services d'aide domestique.

 Mais une compréhension éclairée de ces transformations et des enjeux qui s’y rattachent, ainsi que l’identification de pistes d’action pour les acteurs sociaux concernés par le développement des services d’aide à domicile exigent d’abord de procéder à une relecture du passé et du présent. Cette relecture, que nous déploierons dans la deuxième partie de notre présentation, va permettre de resituer un certain nombre de réalités par rapport aux récentes réformes mises en branle par le gouvernement et de mettre en relief les moments charnières qui ont ponctué l’évolution des services à domicile au Québec depuis les années 1960. Pour ce faire, nous nous appuyons sur une analyse diachronique que nous avons synthétisée en cinq tableaux et que le lecteur pourra consulter en annexe. Par la suite, il nous sera possible de développer, dans la troisième partie de notre présentation, les pistes d’action qui nous semblent pertinentes dans la conjoncture actuelle.

 Mais d’abord, pour être en mesure d'entrer dans l'analyse des enjeux de ces transformations, il importe, au préalable, de s'entendre sur un certain nombre de définitions et de distinctions que nous avons regroupées dans ce que nous avons appelé notre «coffre à outils méthodologiques». C’est ce sur quoi nous allons nous attarder brièvement dans la première partie de notre présentation.
 
 

I - L’analyse de la situation à partir de notre coffre à outils  méthodologiques

 Pour bien comprendre les débats qui ont cours actuellement concernant le rôle que joue et que doit jouer le secteur public dans les services d’aide à domicile, on se doit de distinguer trois formes d’intervention de l’État:
• la régulation des services (cadres de référence, lois, principes de fonctionnement, normes, etc.);
• le financement des services;
• la production des services.

 On se doit également d’identifier les principaux acteurs qui se partagent les responsabilités dans la production des services. Ceux-ci sont au nombre de quatre: le secteur public, le secteur privé, le secteur informel et le secteur de l’économie sociale. Chacun de ces acteurs occupe une place spécifique dans l’ensemble du panier de services en fonction, notamment, de l’évolution qu’a connue la politique gouvernementale de services à domicile depuis une trentaine d’années au Québec. Nous reviendrons sur ce point dans la deuxième partie de notre présentation.

 Nous ferons également référence, dans notre présentation, aux diverses composantes du maintien à domicile. Soulignons en premier lieu qu’une politique globale de maintien à domicile inclut un certain nombre de composantes ayant un impact sur le maintien et la qualité de vie des personnes dans leur milieu naturel. Dans cette optique, les principaux éléments d’une politique de maintien à domicile peuvent être regroupés en quatre secteurs soit le logement, le transport, le revenu et, bien entendu, les services à domicile (cf. annexe 1).

 Les services à domicile peuvent à leur tour être décomposés en diverses catégories de services dont les cinq suivantes:

• Les soins à domicile (nursing)  relevant des infirmières;
• L'aide à domicile (caring)  relevant traditionnellement des auxiliaires familiales;
• Les services de réadaptation (ex.: ergothérapie, physiothérapie), relevant des professionnels  de la réadaptation (ergothérapeutes, etc);
• Les services psychosociaux relevant des travailleurs sociaux;
• Les services de répit et de gardiennage qui permettent aux aidants naturels de disposer de  moments de repos, de loisirs, etc.

 Dans nos recherches, nous avons scruté de plus près les transformations concernant l'aide à domicile et cela en conférant une attention toute particulière à l'une de ces composantes, soit l'aide domestique. D'où l'importance de bien distinguer diverses composantes de l'aide à domicile dont:

• Les services d’assistance personnelle tels les services d'hygiène corporelle (ex.: donner     un bain) et les services d'aide à l'alimentation dans les cas de diètes;
• les services d'aide domestique. Ces derniers peuvent être légers (l'entretien ménager de la  maison et les tâches connexes comme la lessive) ou lourds (les travaux de grands ménages);
• les services de soutien civique (ex: accompagnement, démarches administratives, etc.).

 Dans les transformations en cours, des débats importants ont porté sur les choix à faire au Québec concernant la meilleure manière d'aménager l'offre de services d'aide domestique dont l'importance stratégique dans un continuum de services est reconnue depuis quelques années par les chercheurs, les spécialistes et même le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS, 1994:  4). On convient de plus en plus que l'accessibilité de tels services peut faire la différence, pour une personne en perte légère d'autonomie, entre la possibilité de rester chez soi, ou la nécessité de recourir à une ressource plus lourde. Mais une fois l'importance de l'aide domestique reconnue, une autre question relance le débat: est-ce que ces services doivent relever du secteur public, c'est-à-dire être dispensés par les auxiliaires familiales de CLSC ? Jusqu'à maintenant, la position traditionnelle des syndicats du secteur public a été de répondre par l'affirmative à cette question. Mais d'autres composantes des forces progressistes avancent depuis quelques années que des entreprises de l'économie sociale pourraient très bien avoir le mandat d'offrir ces services sans que ces derniers cessent pour autant d'être considérés comme d'intérêt public.

 Il ne faut pas se le cacher, la question du financement des services, tout autant que la question de l’accessibilité, est au coeur des préoccupations gouvernementales en matière d’aide à domicile. À cet égard, le budget des services à domicile au Québec était de 320 millions $ en 1996-1997, soit moins de 2,5 % du budget de 13 milliards $ prévu pour la santé et les services sociaux (MSSS, 1997b: fiche 8, p. 13-14). Dans un contexte de compressions budgétaires qui a amené le budget du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) à baisser de 0,4 % entre 1993-94 et 1996-1997, l'enveloppe budgétaire des services à domicile a tout de même connu une augmentation de 15 % rendue possible par des réallocations budgétaires. Cette augmentation n'est pas insignifiante. Elle demeure néanmoins très en deçà des attentes suscitées par un discours favorable au virage communautaire, un discours qui trouve maintenant ses adeptes non seulement dans les mouvements sociaux, mais aussi dans les cercles gouvernementaux.

 Ce virage communautaire se veut une alternative à l’hébergement et à l’institutionnalisation de certaines personnes avec des capacités limitées ou en perte d’autonomie. Il a pour objectif de favoriser le maintien de ces personnes dans leur milieu de vie, tout en leur assurant une qualité de vie qui soit à la mesure de leurs besoins et de leurs attentes. Dans ce contexte, la qualité des services à domicile dispensés aux usagers (respect de la confidentialité, continuité des services, disponibilité des ressources, etc.) constitue un facteur clé de la réussite de cette réorientation des politiques publiques.

 Il faut se rapppler que, pendant plusieurs décennies au Québec, la tendance a été à l’institutionnalisation et à l’hébergement des personnes plutôt qu’à leur maintien dans leur milieu de vie naturel. Or, comment en est-on arrivé à une telle politique? Pourquoi adopter une nouvelle orientation aujourd’hui? À quels impératifs répondent les réformes amorcées par le gouvernement depuis quelques années? Pour répondre à ces questions, et mieux comprendre les débats actuels, nous croyons qu’il est nécessaire de revenir en arrière et de retracer l’histoire des services d’aide à domicile au Québec depuis les années 1970.
 

II- Une relecture de l’histoire de l’aide à domicile au Québec en cinq périodes

 Pour être en mesure d'avancer dans notre analyse, il importe de revenir sur l'évolution des services à domicile au Québec au cours des années 1970 à 1999. Pour ce faire, nous avons découpé cette période en cinq phases successives qui permettent de retracer les principales étapes de l'implantation et de la transformation de la politique d'aide à domicile au Québec. Le lecteur pourra également suivre l'évolution de ces transformations en se référant aux cinq tableaux placés en annexe qui correspondent aux cinq périodes que nous avons identifiées.

2.1 PREMIÈRE PÉRIODE  (les années 1970):

  Une politique d’hébergement, d’enfermement et d’hospitalisation  caractérisée par l'absence de politique d’aide à domicile (cf. annexe 2)
 Rappelons d'abord que la réforme fordiste des services sociosanitaires au Québec s'était faite sur le tard, soit à partir de la deuxième moitié des années 1960, voire plus formellement à partir du début des années 1970 lors de la mise en oeuvre de la réforme Castonguay. Cette réforme a signifié un accroissement majeur du rôle de l'État non seulement dans le financement et la régulation des services, mais aussi dans leur dispensation. En outre, à l'intérieur de cette réforme tardive, ce n'est qu'à la fin des années 1970 que l'État québécois a commencé à démontrer qu'il s'intéressait aux services à domicile, en adoptant une politique à cet effet en 1979 (MAS, 1979) . En somme, le Québec a commencé à prioriser les services à domicile à la fin de l'ère fordiste au moment même où la crise de l'État-providence pointait à l'horizon.

2.2 DEUXIÈME PÉRIODE (1979-1983):

  L'avènement de la politique de services à domicile de 1979 et l'accent mis  sur l’offre publique et sur l’offre bénévole.

 C'est au mois de novembre 1979 que le gouvernement du Québec adopte une politique d'aide à domicile digne de ce nom (MAS, 1979). Tout en étant parrainée par un ministre social-démocrate (Denis Lazure) qui était lui-même critique par rapport au rôle du secteur privé dans les services aux personnes, cette politique demeurait toutefois silencieuse sur le rôle du secteur marchand dans la dispensation des services à domicile. De fait, elle se penchait plus explicitement sur le rôle des ressources étatiques et communautaires. L'apport de l'État devenait central sur le plan du financement et de la régulation des services à domicile concernant les personnes âgées en perte d'autonomie et les adultes ayant des limites fonctionnelles (ex.: les personnes handicapées).

 Toutefois, sur le plan de la dispensation des services, tout en conférant un rôle de maître d'oeuvre aux institutions publiques, notamment aux CLSC, la politique prenait soin de répéter que le secteur public ne devait pas avoir la responsabilité de répondre à tous les besoins. Au contraire, elle s'employait à valoriser le rôle des ressources “communautaires” dans la prise en charge d'une bonne partie des services à domicile, sans préciser cependant si ces ressources communautaires devaient miser principalement sur des ressources salariées ou bénévoles. Dans les faits, le ministre Lazure, à l'époque, pensait davantage à une offre de services dispensés gratuitement par des bénévoles non salariés. On le constate en examinant l'usage des subventions distribuées par le SSOC (Service de soutien aux organismes communautaires)  du MSSS,  qui a pris son impulsion à partir de la fin des années 1970. En effet, les montants distribués par le SSOC, du moins en direction des organismes concernant les personnes âgées, allaient d'abord à des organismes bénévoles dans le but de favoriser la stabilité de leur infrastructure. Ces subventions aux organismes bénévoles de soutien à domicile des personnes âgées ont augmenté au fil des ans. En 1996-1997, elles représentaient un budget de 34 millions $ distribué à partir des régies régionales. Les organismes bénévoles subventionnés s'occupaient principalement de fournir aux personnes âgées du transport, de l'accompagnement civique, des repas le midi, des visites d'amitié, etc.

 En dépit de ses zones d'ambiguïté concernant le rôle du marché et le partage des tâches entre les ressources bénévoles et communautaires, la politique de services à domicile de 1979 a eu un impact considérable sur le développement des services à domicile au cours des années 1980 et 1990.  En  pratique, c'est cette politique qui sauva les CLSC. En effet, ces institutions publiques légères, chargées d'offrir des services de santé et des services sociaux de première ligne, après avoir connu un départ prometteur de 1972 à 1974, n'avaient pas cessé d'être remises en question par le gouvernement du Québec de 1975 à 1980. Mais, en obtenant sur leur territoire la maîtrise d'oeuvre de la politique des services à domicile grâce à la nouvelle politique,  voilà que les CLSC se voyaient avantageusement mandatés pour assumer des responsabilités importantes. Cela signifiait une reconnaissance politique précieuse pour permettre à ces jeunes institutions publiques d'obtenir le droit d'exister et de disposer de plus de ressources humaines et financières pour fournir des services de première ligne entre autres aux personnes âgées en perte d'autonomie. C'est dans ce contexte que fut annoncée en 1981, au moment où il y avait une centaine de CLSC,  la décision du gouvernement du Québec de parachever l'instauration d'un réseau universel de 166 CLSC pour couvrir l'ensemble du territoire québécois. Après dix années d'histoire en dents de scie, cela représentait une deuxième naissance pour les CLSC.

 Toutefois, au cours des années 1980 et 1990, le gouvernment du Québec, en dépit de promesses maintes fois réitérées, ne parvint jamais à donner aux CLSC des budgets suffisants pour répondre à l'augmentation exponentielle des besoins de services à domicile. Cette augmentation des besoins était attribuable aux effets combinés du vieillissement de la population, de l'allongement de la durée de la vie avec les progrès de la médecine, du resserrement des critères pour l'admission des personnes âgées en centres d'hébergement et, à partir de 1995, d'un virage ambulatoire fort accéléré, destiné à raccourcir la durée de séjour des patients dans les centres hospitaliers.

2.3 TROISIÈME PÉRIODE (1984-1990):

  La politique de 1979 est maintenue officiellement, mais, dans les faits, la  privatisation se développe (cf. annexe 4)
 À partir des années 1983 et 1984, les CLSC se retrouvèrent régulièrement enlisés dans des contradictions difficiles à surmonter. D'un côté, la politique officielle du gouvernement du Québec, du moins jusqu'à la réforme Côté du début des années 1990,  ne leur permettait pas de recourir à la privatisation. D’un autre côté, sur un plan pratique, les gestionnaires de CLSC ne disposaient pas des moyens concrets pour respecter cette politique officielle. Ils étaient pris dans une quadrature du cercle: acculés à répondre avec des moyens budgétaires qui augmentaient trop lentement à des besoins grandissants sur leur territoire, ils disposaient de deux choix. Ou bien ils respectaient la lettre de la politique officielle en misant uniquement sur des services publics offerts directement par le personnel du CLSC (infirmières pour les soins et auxiliaires familiales pour l'aide) et sur des services non publics dispensés par des organismes bénévoles de leur territoire, qui étaient souvent soutenus par l'expertise professionnelle des organisateurs communautaires du CLSC et par le soutien financier du MSSS. À ce moment-là, ils respectaient la politique officielle, mais en laissant de côté une partie plus importante de la demande de services.

 Ou encore, ils optaient pour la privatisation (baisse de l'offre publique et montée de l'offre marchande) ou  la communautarisation (baisse de l'offre publique et montée de l'offre relevant des organismes communautaires ou coopératifs). Évidemment, ces glissements vers la privatisation ou la communautarisation étaient encouragés par la recherche de la réduction des coûts. Avec les budgets dont ils disposaient, avec les coûts de main-d'oeuvre plus élevés dans des entreprises syndiquées du secteur public que dans des entreprises non syndiquées du secteur marchand, ou du secteur associatif, voire du secteur bénévole, il tombe sous le sens que les gestionnaires de CLSC étaient obligés de refiler une partie de l'offre de services en dehors de leurs établissements publics. Dans de grandes concentrations urbaines comme la région de Montréal, les contraintes budgétaires ont amené les CLSC à recourir au fil des ans, de manière accrue, aux agences commerciales. Dans les autres régions, elles les ont amenés à utiliser de plus en plus la formule des allocations directes qui consistait à remettre aux usagers un mince pouvoir d'achat de 7 à 9,75 $ de l'heure leur permettant de se procurer des services effectués par des travailleurs indépendants. Cette formule des allocations directes qui a connu un essor croissant au début des années 1990 a favorisé le développement du travail au noir tout en faisant l'affaire d'un certain nombre d'usagers notamment au sein des groupes de personnes handicapées.

 Ainsi, depuis le milieu des années 1980, les contradictions n'ont pas cessé de s'aviver. Sans désavouer sa politique de 1979 et sans se prononcer en faveur de la privatisation, le gouvernement à constamment placé les décideurs publics dans les régions et les localités dans une situation qui les obligeait de facto à malmener certains principes de la politique. La régulation publique invitait les CLSC à offrir une gamme de services relativement universels sur leur territoire. Le financement public était assuré, mais de manière insuffisante. En conséquence, les CLSC, notamment à partir du milieu des années 1980, ont pris l'habitude de favoriser une distribution mixte des services, soit une distribution assumée en partie par le personnel public des CLSC, en partie par du personnel de ressources marchandes, en partie par du personnel rémunéré d'organismes communautaires et coopératifs, en partie par du personnel bénévole non rémunéré dont les aidants naturels recrutés souvent parmi les proches de la famille qui sont le plus souvent des femmes (Guberman, Maheu et Maillé, 1991).

 En fait, quand on examine ces transformations de l'offre de services de plus près, on constate que la privatisation et la communautarisation des services à domicile ont connu une expansion, au cours des quinze dernières années pour des raisons de coûts, mais aussi pour d'autres raisons. Au cours des années 1980, à tort et à raison, on a souvent reproché une certaine rigidité aux conventions collectives de CLSC, soit une rigidité qui empêchait d'utiliser les infirmières et les auxiliaires familiales pour dispenser des services à domicile tôt le matin, ou en soirée, ou pendant les fins de semaines. Or, le déploiement des services intensifs à domicile, à partir de décisions prises en 1986 pour désengorger les urgences des hôpitaux, a contribué à augmenter la demande de services à dispenser en dehors des heures de travail régulières. Dans un tel contexte, certains CLSC ont dû recourir à une main-d'oeuvre non publique pour offrir des services le soir ou les fins de semaines à leur clientèle. Ces services refilés au secteur privé à but lucratif étaient des services qui étaient au coeur de la définition de tâches des infirmières et des auxiliaires familiales de CLSC. Mais d'autres services ont été sortis des CLSC pour des raisons plus strictement économiques. C'est le cas entre autres des services de répit gardiennage et d'aide domestique que les coordonnatrices de maintien à domicile de CLSC, et cela depuis 1985, ont toujours eu de la réticence à faire accomplir par leurs auxiliaires familiales, sauf lorsqu’ils étaient donnés de façon complémentaire à d'autres services. C'est ce qui explique la place marginale occupée par l'aide domestique dans la gamme des services à domicile offerts par les CSLC depuis plus de dix ans.

 À partir de la fin des années 1980, un autre développement a eu une influence sur la transformation de l'offre de services à domicile. Nous faisons référence au croisement entre certaines mesures de développement de l'employabilité concernant les prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail, d'une part, et le financement de certains organismes bénévoles et communautaires intervenant dans le domaine des services à domicile d'autre part. Ces mesures offraient la possibilité à des organismes, principalement publics ou associatifs, d'engager des prestataires de la sécurité du revenu pour un maximum de douze mois et cela sans leur offrir la protection sociale relevant du Code du travail. Plusieurs acteurs privés, publics et associatifs ont vu dans ces mesures d'employabilité des sources de financement pour leurs projets.

 Dans certains cas, il s'agissait d'une source de financement pour un projet déjà existant. Dans d'autres, l'idée du projet était postérieure au repérage de la source de financement. De toute manière, ces mesures d'employabilité ont été sévèrement critiquées en raison des effets pervers qu'elles induisaient sur le développement des ressources non publiques dans le domaine du soutien à domicile. On leur a reproché, entre autres, dans divers milieux de favoriser le travail au noir et d'encourager le développement d'OSBL voués à la précarité. On leur fait surtout grief de subordonner à la logique de l'insertion des exclus les efforts déployés pour répondre à de nouveaux besoins de services concernant des personnes socialement vulnérables.
 

2.4 QUATRIÈME PÉRIODE

  Expérimentation du recours à des ressources de l’économie sociale pour  répondre à des besoins d’aide domestique dans certains territoires
 Néanmoins, au début des années 1990, on a assisté à l'émergence de certaines expérimentations novatrices dans le domaine de l'aide domestique. Certains entrepreneurs sociaux, souvent recrutés parmi des organisateurs communautaires de CLSC, ont travaillé au développement de projets d'économie sociale en aide domestique en partenariat avec les forces vives de leur communauté locale. Pour mettre sur pied de tels projets, ils ont dû utiliser les possibilités offertes par les mesures d'employabilités concernant les prestataires de la sécurité du revenu (programmes EXTRA, PAIE, CIT). Ils l'ont souvent fait à leur corps défendant, en critiquant la ridigité des programmes d'employabilité et en cherchant à ne pas se laisser enfermer dans leur logique. Ce faisant, les promoteurs et alliés de ces projets n'ont pas cessé d'exercer des pressions sur les instances politiques et administratives de tous les paliers de pouvoirs publics, pour leur arracher des formes originales de collaboration sur le plan de l'appui politique et financier.

 Au cours de la première moitié des années 1990,  une trentaine de projets d'économie sociale ont émergé dans le domaine de l'aide domestique. Ces projets n'ont pas tous pu franchir l'étape de la préparation. Toutefois, avec leurs points faibles autant qu'avec leurs points forts, ils ont tous contribué à enrichir l'expérimentation et la réflexion. Parmi ces projets, il y en a deux qui ont particulièrement retenu l'attention et favorisé la diffusion de l'innovation. Il s'agit du projet Défi-Autonomie d'Antoine-Labelle  (à 130 km au nord de Montréal) (Duval, 1996; Julien et Guérard, 1994), qui a démarré en 1993, et du projet Aide-Communautaire Limoilou (dans un quartier populaire de la ville de Québec) qui a démarré en 1994 sur une nouvelle base (Charest, 1998; Bédard et De Koninck, 1997).

 Ces deux projets avaient des similitudes et des différences. Parmi leurs ressemblances, signalons les suivantes:

• Ils sont partis d’un enracinement dans le milieu et jouissaient d'un appui impressionnant de la part d'une pléiade d'acteurs crédibles dans la communauté locale.

• Ils ont été développés par des organisateurs communautaires expérimentés soucieux de favoriser un partenariat authentique entre le CLSC et les ressources communautaires sur le territoire et capables d'aller chercher des appuis dans les divers milieux concernés.

• Ils visaient l'objectif de mettre sur pied une entreprise d'économie sociale qui offrirait des services d'aide domestique qui seraient complémentaires par rapport aux services à domicile dispensés par les auxiliaires familiales du CLSC. En somme, ces projets, en dépit de certaines perceptions,  devaient objectivement concurrencer le “travail au noir” et non pas des emplois du secteur public.

• Ils recrutaient leurs travailleurs parmi les prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail sur une base volontaire et à la suite d'un processus de sélection.

• Ils passaient par la mise sur pied d'une structure d'entreprise d'économie sociale de type OSBL (organisme sans but lucratif) démocratique soucieuse de faire de la place dans les instances de direction à des représentants des usagers et à des personnes des organismes publics et communautaires du milieu détenant une expertise dans les services à domicile. Dans ce modèle d'organisation démocratique, la participation des travailleurs n'était pas recherchée aussi formellement que celle des usagers.

• Ils faisaient appel à un mode de financement hybride qui misait sur les revenus de la tarification, sur les subsides reliés aux mesures d'employabilité de prestataires de la sécurité du revenu et sur d'autres subventions de ministères et d'institutions publiques qui pouvaient couvrir entre autres les frais administratifs (la coordination) et l'écart entre les coûts de revient des services (entre 10 et 15 $ l'heure) et la faible tarification exigée des personnes à faibles revenus (entre 2 et 3 $ l'heure) .

• Ils misaient sur un partenariat entre le CLSC et l'entreprise d'économie sociale, un partenariat qui serait capable à la fois de respecter l'autonomie démocratique de l'OSBL et de tenir compte de la maîtrise d'oeuvre des CLSC pour l'organisation de l'ensemble des services à domicile sur leur territoire.

• Ils donnaient de l'importance à l'objectif de favoriser l'accessibilité des services pour les clientèles de personnes à faibles et moyens revenus reconnues comme vulnérables sur le plan de la santé et du bien-être.

• Ils consentaient à leurs employés des salaires faibles se situant autour de 7,75 $ de l'heure, soit environ un dollar de plus que le salaire minimum. Ils respectaient en outre les dispositions du Code du travail et de la législation concernant les normes minimales du travail.

 Parmi les différences entre les deux projets, la principale concernait la durabilité des emplois. Dans le cas de Défi-Autonomie, la majorité des salariés de l'entreprise étaient de passage pour une période maximale d'un an. Au bout de cette période, la philosophie du projet, qui reposait sur l'objectif de l'insertion, voulait que les travailleurs quittent pour aller dans une autre entreprise, de façon à ce que leur poste de travail puisse devenir accessible à une autre personne prestataire de la sécurité du revenu. Dans le projet Aide-communautaire Limoilou, on insistait sur la création d'emplois permanents en argumentant à partir de la qualité des services. D'autres différences pourraient être mises en relief, notamment concernant les sources de financement qui étaient en partie les mêmes (tarification et ministère de la Sécurité du revenu) et en partie distinctes. Par exemple, Défi-Autonomie, à la différence d'Aide communautaire Limoilou, avait bénéficié d'une importante subvention fédérale au départ pour les deux premières années de l'expérimentation.

 Au milieu des années 1990, les expérimentations en cours, notamment dans les deux projets mentionnés précédemment, ont suscité beaucoup d'espoirs, d'inquiétudes et de débats dans une grande diversité de milieux. L'existence même et la qualité des projets ont fourni des idées novatrices qui ont aidé des acteurs sociaux d'autres territoires et d'autres régions à développer leurs propres projets. Eux aussi voulaient créer de nouveaux services pour répondre à de nouveaux besoins. Ces besoins étaient à la fois non couverts par le réseau public soumis à de dures compressions budgétaires et non convoités par le secteur marchand disposé à s'impliquer seulement là où la solvabilité était assurée. À tout moment, les promoteurs et alliés de projets comme Défi-Autonomie et Aide communautaire Limoilou, en étant bien conscients de la fragilité politique et financière de leurs expérimentations à long terme, ont senti la nécessité de lancer des campagnes de sensibilisation pour obtenir des appuis dans leur communauté en général et auprès des leaders sociaux et des décideurs publics en particulier.

 Ces mobilisations représentaient des pressions qui interpellaient les pouvoirs publics. Elles appelaient le passage de l'expérimentation à l'institutionnalisation. En somme, les divers projets, avec leur fragilité autant qu'avec leur pertinence, faisait ressortir l'importance de pérenniser et de diffuser l'innovation. Sinon, l'innovation était condamnée à mourir ou à ne prendre forme que sur une infime partie des territoires où les besoins se faisaient ressentir. En outre, l'intensité des débats sur les expérimentations, au cours des dernières années, a sensibilisé un grand nombre de personnes à la nécessité de tenir compte des conditions à rassembler pour que les emplois et les services reliés aux nouvelles entreprises d'économie sociale soient de qualité. À cet égard, la Marche des femmes contre la pauvreté, au printemps 1995, et les travaux du Comité de travail sur l'économie sociale créé par le gouvernement dans le prolongement de cette marche, ont contribué à la prise de conscience de certains irritants liés à la ridigité des programmes d'employabilité. Tout cela a permis de publiciser quelques revendications dont celles voulant que dans les entreprises d'économie sociale le salaire soit d'au moins 8,30 $ l'heure, que les prestataires de la sécurité du revenu soient embauchés sur une base volontaire, qu'ils aient accès à une formation appropriée, etc. (Comité d'orientation et de concertation sur l'économie sociale, 1996)

 Certes, les expérimentations en cours et les débats qui les ont entourés n'ont pas permis de faire disparaître le scepticisme et l'opposition dans tous les millieux. Dans les hauteurs de certains CLSC et du syndicalisme du secteur public et dans les cercles progressistes attachés au modèle social-démocrate traditionnel (cf. annexe 7), plusieurs ont continué à argumenter que les entreprises d'économie sociale en aide domestique amenaient la privatisation de services qui étaient —ou devraient être— dispensés par le secteur public, i.e. par les auxiliaires familiales des CLSC. Malgré ces poches de résistance, un nombre croissant de personnes dans les mouvements sociaux et dans le réseau de la santé et des services sociaux ont pris conscience que, s'il y avait eu privatisation des services d'aide domestique dans les CSLC, cette privatisation s'était faite dans les années 1980 et non pas dans les années 1990 et que, les nouveaux emplois et services instaurés par les nouvelles entreprises d'économie sociale s'ajoutaient aux emplois et services dispensés par les CLSC au lieu de s'y substituer. Dans ce contexte, s'il y avait substitution d'emploi, elle se faisait par rapport au travail au noir et au secteur marchand.

2.5 CINQUIÈME PÉRIODE (1996-1999):

  Instauration d'une politique d'économie sociale en aide domestique dans un  contexte de virage ambulatoire incitant les ressources publiques des CLSC à  répondre à des besoins d’abord médicaux (cf. annexe 6)
 Le passage de l'expérimentation à l'institutionnalisation s'est effectué dans les années 1996-1998 et il n'est pas totalement terminé au moment où nous écrivons ces lignes (Lévesque et Vaillancourt, 1998). Le Chantier de l'économie sociale, dans le contexte macro social et macro politique évoqué plus haut, a joué un rôle majeur à cet effet. Il a contribué à synthétiser et relayer, en direction des décideurs publics gouvernementaux, ministériels, régionaux et locaux, les attentes mises de l'avant à la fois par les promoteurs de projets d'économie sociale sur le terrain et par leurs alliés dans les groupes de femmes, dans les organismes communautaires, bénévoles et syndicaux prêts à collaborer, dans les CLSC et dans les nouvelles institutions publiques en train d'émerger sur le territoire à la faveur de la réforme de la sécurité du revenu, de la décentralisation, etc.

 Dans son rapport présenté au Sommet sur l'économie et l'emploi à l'automne 1996, le Chantier, parmi une vingtaine de projets chiffrés de création d'emplois en économie sociale, avait mis de l'avant celui de créer en cinq ans 9 000 emplois dans les services d’aide à domicile (Chantier de l'économie sociale, 1996). Ce projet avait été bien accueilli par les représentants du gouvernement et des partenaires sociaux. Mais, pour qu'il puisse se réaliser, bien des fils devaient être attachés. C'est le défi que le Chantier a tenté de relever depuis en s'adonnant à un incessant travail de représentation et de conciliation entre les promoteurs de projets, les acteurs sociaux et gouvernementaux concernés, etc.
 La première formulation de la réponse gouvernementale est venue dans le Budget Landry de mars 1997. “Pour soutenir le développement d'un réseau d'entreprises d'aide domestique dans le secteur de l'économie sociale”, le gouvernement s'engageait à créer un “Programme d'exonération financière” (PEF) qui disposerait d'un budget de 79,4 millions $ en trois ans à partir du 1er  avril 1997, dont 11,6 millions $ pour l'année 1997-1998, 22,8 millions $ pour l'année 1998-1999 et 45 millions $ pour l'année 1999-2000. L'objectif était de créer 6 000 emplois durables en trois ans, dont 1000 au cours de la première année. L'enveloppe budgétaire du PEF relèverait du MSSS et permettrait de soutenir financièrement la demande des usagers voulant se prévaloir des services d'aide domestique, soit des personnes âgées en perte d'autonomie et des ménages réguliers. Le plan gouvernemental prévoyait deux composantes dans le PFE: un montant fixe de 3 $ accordé à tous les clients des entreprises reconnues et “un montant variable pouvant atteindre un maximum de 7 $ l'heure” (dépendemment de leur revenu net) pouvant être accordé à des personnes âgées de 65 ans ou plus, à revenus faibles ou modestes, ayant “certains besoins de support à l'autonomie”, répondant à des critères du MSSS et étant “référés par un CLSC”. Les entreprises d'économie sociale pouvaient se prévaloir d'un statut d'OSBL ou d'entreprise coopérative et embaucheraient des prestataires de la sécurité du revenu (Landry, 1997: 125-129; MSSS, 1997a; MSSS et Régies régionales de la santé et des services sociaux, 1997).
 Les conditions fixées dans le budget Landry représentaient une ouverture intéressante.  Mais, en faisant l'hypothèse d'un coût de revient de 15 $ l'heure et d'un nombre d'heures travaillées variant entre 27 et 30 heures semaine sur 35 en raison du temps à prévoir pour la formation et les déplacements, les paramètres gouvernementaux imposaient des marges de manoeuvre très serrées aux promoteurs de projets qui devaient négocier avec le MSSS, les régies régionales, les CLSC et les autres organismes concernés. Cela risquait d'affecter la solvabilisation des entreprises et de favoriser le recours à une tarification élevée qui aurait un effet négatif sur l'accessibilité des services aux personnes âgées et handicapées à faibles revenus.  C'est ainsi qu'entre mars 1997 et l'été 1998, le Chantier de l'économie sociale a dû continuer d'intercéder sans relâche auprès des pouvoirs publics pour obtenir une bonification du Programme d'exonération financière (PEF) et des conditions qui permettaient aux promoteurs de projets de rencontrer certaines normes auxquelles ils tenaient, notamment le plancher de 8,30 $ l'heure pour les salaires, pour que les emplois et les services soient de qualité et pour que la culture des entreprises d'économie sociale soit respectée dans les projets (Chantier de l'économie sociale, 1997).

 Certes, les limites et les zones d'ombre de la politique gouvernementale ont retardé la mise en route de certains projets et alimenté des tensions et des incertitudes dans plusieurs régions. Néanmoins, des informations obtenues en mars 1999 par l’entremise de madame Danielle Boileau, coordonnatrice du programme d’aide domestique à la Régie de l’assurance maladie du Québec (service d’aide financière d’hébergement et d’aide domestique), nous indiquent que 90 entreprises d’économie sociale en aide domestique ont jusqu’ici été accréditées par le programme d’exonération financière du gouvernement du Québec. En outre, plus de 75 % des entreprises accréditées ont décidé, récemment, de se réunir au sein du Regroupement des entreprises d'économie sociale en aide domestique du Québec (REESADQ, 1998).

àK„somme, l'institutionnalisation des services à domicile, amorcée à la fin des années 1970, connaît des ajustements importants à la fin des années 1990, en particulier dans le domaine de l'aide domestique. Même avec cette modification de l'institutionnalisation, le financement et la régulation publiques demeurent importants. Sur le plan de la dispensation des services, le secteur public conserve le rôle principal. Toutefois, le développement d'un réseau d'entreprises d'économie sociale en aide domestique signifie une amélioration de l'accessibilité à un  type de services, essentiels mais non solvables, qui étaient  négligés par le secteur public et boudés par le secteur marchand depuis dix ans. Ainsi, l'évolution récente de l'institutionnalisation dans le cas présent s'apparente moins à une vague de privatisation et davantage à une vague de “communautarisation” et de “coopérativisation”.  Certes, cela alimente l'inquiétude dans certains groupes autonomes de femmes et de syndicats du secteur public (David, 1998; FSSS, 1998) . De leur côté, les entrepreneurs sociaux engagés sur le terrain, tout en connaissant aussi leurs moments d'inquiétude, notamment par rapport au danger du “mur à mur”, ne cessent pas pour autant de poursuivre leurs projets avec conviction (Fournier, 1998; Larouche, 1998; Beauchamp, 1998). Comme les autres, ce dossier reste à suivre !
 

III- Pistes pour l’action

3.1 Ne pas s’enfermer dans la dénonciation, prendre le risque de faire des  propositions

 Plus que jamais, il est nécessaire que les stratégies portées par les acteurs sociaux concernés par le développement des services d'aide à domicile aillent plus loin que la simple dénonciation. Ceux-ci doivent s'engager dans l'élaboration de propositions aptes à répondre aux défis que pose la conjoncture actuelle. Cette conjoncture, marquée notamment par l'épuisement du fordisme, les pressions provenant des forces néolibérales, le vieillissement de la population et le virage ambulatoire, pose assurément des contraintes aux acteurs sociaux souhaitant une plus grande démocratisation des services. Néanmoins, une période comme celle qu'on connaît actuellement, marquée par de profonds changements, peut aussi être propice aux innovations pour peu qu'on délaisse certaines stratégies, qui ont certes permis de réaliser des gains significatifs du point de vue de la qualité des services et des conditions de travail des employés du secteur public à une certaine époque, mais qui se révèlent aujourd'hui inaptes à relever les défis de l'an 2000.

3.2 Sortir du placard la Politique de la santé et du bien-être et surveiller le  retour en force de l’hospitalo-centrisme

 Dan …e conjoncture où les discours budgétaires du fédéral comme ceux du Québec s’inscrivent en harmonie avec la dramatisation de l’importance d’augmenter les ressources budgétaires dans les hôpitaux et les services de santé, remettre le cap sur les déterminants non médicaux de la santé et du bien-être, i.e. sortir du placard la Politique de santé et de bien-être qui priorise le maintien à domicile et le soutien à la volonté de rester chez soi tout en maintenant la qualité de vie des personnes (Québec, 1992). À cet égard, on peut s’interroger sur la surenchère qui s’est déployée ces derniers mois concernant le manque de ressources budgétaires dans les urgences, les hôpitaux et les services médicaux. La réponse positive des budgets Martin et Landry à cette surenchère n’aura-t-elle pas pour effet de favoriser un retour en force de l’hospitalo-centrisme? Ces réponses positives ne vont-t-elles pas à l’encontre des orientations prises au cours des dernières années concernant la transformation en profondeur du système de santé et de services sociaux? Pensons ici au 1,7 milliard $ d’argent neuf que le budget Landry canalise vers les hôpitaux et, notamment, aux 700 millions $ utilisés pour effacer les déficits des hôpitaux. Autant d’argents qui ne seront pas disponibles ni pour le maintien à domicile, ni pour le support aux personnes ayant décidé de demeurer dans leur milieu malgré leur handicap ou leur perte d’autonomie.

3.3 Revendiquer une augmentation significative des postes d’auxiliaires  familiales de CLSC

 En contexte de virage ambulatoire et dans une conjoncture post-déficit zéro, il serait plus productif de canaliser les énergies progressistes dans les syndicats, les organismes communautaires, les groupes de femmes et les établissements publics pour revendiquer l’augmentation des postes d’auxiliaires familiales en CLSC qui pourraient être consacrés à la dispensation des services sociaux et de services liés à l’hygiène corporelle. Compte tenu du veillissement de la population et de l’augmentation des besoins qui en découle concernant ce type de tâches, on devrait accepter de confier aux entreprises d’économie sociale les services d’aide domestique et concentrer les revendications sur les services relevant plus spécifiquement de la formation des auxiliaires familiales (bains, etc).

3.4 S’attaquer aux iniquités des programmes d’aide aux personnes vivant des  incapacités

 Les personnes qui vivent des incapacités (physiques, intellectuelles, cognitives) et qui ont besoin d’aide à domicile sont en majorité des personnes à faibles revenus qui vivent présentement des problèmes d’équité pour l’accès à ces services. En effet, le montant des allocations, la disponibilité des services et les règles du jeu qui les régissent varient selon que les personnes relèvent de la CSST, de la SAAQ, de l’OPHQ, du MSSS, etc.

 De même, à l’intérieur des divers programmes d’aide à domicile élaborés par le MSSS, cohabitent de nombreuses formules de financement qui se superposent parfois de manière anarchique sur un territoire (chèque emploi-service, allocation directe, programme d’exonération financière, etc.). Cette situation a pour conséquence de laisser dans le besoin des personnes aux prises avec des incapacités ou des pertes d’autonomie importantes. Ces personnes risquent alors d’être confrontées, à plus ou moins long terme, à une dégénérescence de leur situation qui pourra entraîner une prise en charge plus lourde, voire l’institutionnalisation.

3.5 Faire entrer les valeurs de l’économie sociale dans l’aménagement du  recours aux ressources intermédiaires

 Le recours à des travailleurs autonomes, souvent des professionnels des services sociaux et de santé, par l’entremise d’ententes contractuelles afin de dispenser des services à des personnes handicapées ou en perte d’autonomie serait actuellement en pleine expansion. Dans cette éventualité, il serait préférable de coopérativiser l’offre de services relevant de ces ressources intermédiaires, des travailleurs autonomes et contractuels de type case managers, pour que les valeurs qui traversent leurs interventions soient plus marquées par la culture de l’économie sociale et du secteur public que par la culture marchande du secteur privé.

 Par ailleurs, on doit aussi repenser la façon d’opérationaliser l’allocation directe et le chèque emploi-service  en tenant compte des caractéristiques des clientèles auxquelles ces formules de financement s’adressent . Si ces formules souples peuvent convenir à certains usagers et favoriser leur autonomie (par exemple, les personnes handicapées pour lesquelles la formule de l’allocation directe fut développée à l’origine), il n’en demeure pas moins que pour d’autres usagers, la gestion de l’allocation directe pose de sérieux problèmes. Ainsi, la question du statut d’employeur attribué aux usagers devrait faire l’objet d’une réévaluation complète dans le cadre du programme SIMAD compte tenu de l’impossibilité pour plusieurs d’entre eux, notamment les personnes en perte sévère d’autonomie ou celles dont l’état de santé exige la dispensation de soins palliatifs, d’assumer ce rôle correctement (Vaillancourt et Jetté, 1997). Même si les travailleurs autonomes embauchés par l’entremise du programme SIMAD sont rémunérés par l’entremise du chèque emploi-service (tout comme ceux relevant du Fonds régional des personnes handicapées), les difficultés pour les usagers demeurent suffisament importantes pour justifier une révision des formules de financement. Pour ces personnes, il semble évident qu’une offre de services provenant du secteur public ou de l’économie sociale serait beaucoup plus appropriée.

 Même chose concernant le Fonds de soutien à la famille à partir duquel les parents d’enfants handicapés peuvent recevoir des services de répit et de gardiennage. Dans ce cas-ci, les allocations directes ne transitent pas par le chèque emploi-service car les sommes ainsi versées sont forfaitaires (500 $ ou 1000 $ par année). Cela permet donc aux parents de payer au noir les travailleurs autonomes. Or, le taux horaire effectivement versé aux travailleurs peut, dans certains cas, être aussi bas que 4 $ de l’heure (surtout pour le gardiennage). À l’heure actuelle, il semble que le ministère réféchisse à la possibilité de rémunérer aussi ces travailleurs par le biais du chèque emploi-service, ce qui ne fait pas nécessairement l’affaire des parents qui jugent cette formule beaucoup moins souple que le paiement direct des allocations directes.

 Rappelons, également, que les tarifs découlant de l’allocation directe sont encore de seulement 7,71 $ de l’heure dans certaines régions comme la Montérégie, comparativement à 10 $ dans  d’autres régions. Cette situation constitue un irritant de taille à dissiper puisqu’elle contribue à créer des distorsions dans l’offre de services entre les régions. Avec seulement un maigre 7, 71 $ de l’heure, la marge de manoeuvre des personnes bénéficiaires est extrêmement réduite. Ou bien ces personnes s’achetent moins d’heures de services en rémunérant plus cher les travailleurs autonomes; ou encore elles s’achètent plus d’heures de services en les payant moins cher (même si cela est maintenant plus difficle avec le chèque emploi-service). Dans un cas comme dans l’autre, on se rend compte que le faible taux de rémunération accordée par le programme dans certaines régions entraîne, pour les usagers, des problèmes de gratuité, d’accessibilité et d’universalité.

 Quant aux travailleurs autonomes rémunérés à partir de cette formule, leur situation s’avère précaire à bien des égards. Même si, avec l’avènement du chèque emploi-service, une bonne partie du travail au noir est désormais «régularisé», l’équité du programme des allocations directes est loin d’être atteinte. En effet, pour les personnes rémunérées à partir de cette formule, le taux horaire minimum de 7,71 $ fixé par le Ministère demeure très en deçà du taux horaire de 8,30 $ qui est versé, par exemple, au personnel oeuvrant dans les entreprises d’économie sociale en aide domestique. Pourtant, les travailleurs autonomes rémunérés à partir du chèque emploi-service doivent effectuer des tâches exigeantes qui demandent une formation plus grande que pour l’entretien ménager (par exemple, donner un bain).

 Quant aux travailleurs qui sont rémunérés directement par les allocations directes dans le cadre du Fonds de soutien à la famille, dans la plupart des cas, le travail qu’ils effectuent se fait au noir, ils ne sont donc pas assujettis aux normes édictées par le code du travail. Ils ne disposent d’aucune protection en cas d’accident de travail, ils ne paient ni impôts, ni cotisations à l’assurance-emploi, etc. En fait, ces travailleurs autonomes ne bénéficient d’aucun des avantages liés au statut de travailleur reconnu. Ainsi, plusieurs aspects des nouvelles formules de financement demeurent problématiques et ce, tant pour les usagers que pour les producteurs de services.
 

3.6 Pistes d’action plus spécifiques concernant les entreprises d’économie  sociale en aide domestique

3.6.1Pour une stratégie globale offensive et proactive et non pas défensive   et nostalgique concernant le développement en cours des entreprises   d’économie sociale en aide domestique
 

 La conjoncture actuelle exige une redéfinition de certains des paramètres qui, depuis les années 1970, ont balisé la configuration des services sociaux et de santé au Québec, notamment dans le domaine de l’aide à domicile. Ces nouveaux paramètres doivent tenir compte d’un certain nombre de transformations qui sont autant d’éléments d’analyse préalables devant guider l’action de ceux et celles qui souhaitent une reconfiguration progressiste du système de santé et de services sociaux. Voici quelques-uns de ces principaux paramètres:

• L'émergence du secteur de l'économie sociale dans le domaine de l'aide domestique est une chose souhaitable qui peut apporter certaines solutions aux problèmes structurels et budgétaires vécus par le système de santé et de services sociaux au Québec.

• L'émergence de ce nouveau secteur ne se fait pas, toutefois, uniquement en raison de la crise budgétaire de l'État. Les économies qui pourraient être ainsi réalisées le sont parce que le développement de l’économie sociale favorise le déploiement de structures souples et légères et l’implication d’acteurs sociaux issus des communautés. Ces acteurs sont plus proches des besoins des membres des communautés et donc, plus aptes à organiser des services ou des activités adaptés aux situations particulières vécues sur les différents territoires. Néanmoins, ces avantages comparatifs ne pourront être maintenus qu’à condition de fournir des conditions de travail décentes aux personnes oeuvrant dans l’économie sociale.

• Le développement de l'économie sociale ne constitue pas une solution du pis-aller face à la montée du néo-libéralisme, mais bien une véritable alternative face à l’épuisement du fordisme (organisation du travail tayloriste, gestion autoritaire, non-participation des usagers à la définition des services, etc.) qui permet de contrer la montée de la culture marchande dans l’organisation des services sociaux et de santé.

• Le développement de l'économie sociale se fait en réponse à de nouveaux besoins et aux difficultés et/ou à l’incapacité des secteurs public, privé et informel de combler adéquatement ces nouveaux besoins et de fournir les services correspondants.

• L'émergence de l'économie sociale dans l'aide domestique participe d’un mouvement plus large visant la redéfinition du modèle de développement social (et par conséquent, une redéfinition aussi du rôle de l'État) et une intégration plus grande des activités dites «sociales» au sein des activités économiques, ce qui implique la non-acceptation de la subordination du social à l’économique tel que promulgué dans le modèle néo-libéral.

 Pour favoriser l’émergence d’un tel modèle, il faut chercher des pistes d'action qui vont soutenir le développement de l'économie sociale tout en respectant un certain équilibre avec les autres secteurs, et au premier chef avec le secteur public qui doit demeurer le vecteur principal de la production, de la régulation et du financement des services. Toutefois, le nouveau partage des responsabilités exige une transformation du rôle de l'État dans ces trois dimensions.

3.6.2 Éviter l’élargissement de la programmation des activités des     entreprises d’économie sociale qui amènerait un empiètement sur les   activites des ressources publiques, i.e. celles des CLSC

 C'est au chapitre de la production des services que les transformations sont peut-être les plus visibles et les plus importantes. L'État, et certains acteurs sociaux qui le défendent (par exemple, les syndicats du secteur public et parapublic) doivent accepter que d'autres joueurs sont sur la patinoire et que ces derniers peuvent être plus efficaces pour dispenser les services dans certains domaines d'activités (ex: aide domestique). Comme nous l’avons spécifié, ces joueurs sont présents non seulement  parce qu'ils coûtent moins cher (ce qui peut être le cas), mais surtout parce que leurs structures souples et flexibles, leur enracinement dans les communautés font en sorte qu'ils peuvent fournir des services d'une manière autre que les secteurs public ou privé.

        Un des enjeux à surveiller ici est, bien entendu, l'élargissement de la programmation des services à d'autres activités que l'aide domestique. Sur ce point, nous croyons qu'il est primordial que les syndicats locaux soient parties prenantes des ententes afin de veiller au grain. Si, sur certains territoires, tous les acteurs sont en faveur d'un élargissement de la programmation des services (usagers, producteurs de services et CLSC), il est difficile d'imaginer que les ententes conclues vont tenir très longtemps. Le glissement pourrait se faire progressivement à certains endroits, plus rapidement ailleurs, mais il va se réaliser si rien n'est fait. L'expérience semble démontrer que là où les syndicats locaux se sont impliqués dans la mise sur pied d'un organisme d'économie sociale, il est plutôt difficile de déborder le cadre strict des ententes conclues sur la programmation des services car les syndicats participent, d'une certaine manière, au développement de l'entreprise (Jetté, 1999).

        Il faut également que les organisateurs communautaires de CLSC, qui ont été bien souvent les principaux promoteurs du développement des entreprises d'économie sociale en aide domestique, prennent leur place comme acteurs de changement social. Cela signifie peut-être davantage d'implication de la part de leur organisation (RQIIAC) dans les grandes orientations données aux projets d'économie sociale, mais aussi une présence plus continue de leurs membres dans les projets une fois ceux-ci amorcés. Nous croyons qu’ils ont un rôle stratégique à jouer dans le rapprochement entre les syndicats et les entreprises d'économie sociale. Ils sont bien placés pour jouer le rôle d'intermédiaire entre ces deux acteurs aux intérêts parfois divergents. D’ailleurs, on peut penser qu'il serait important qu'ils conservent une place au sein des conseils d'administration des organismes, même si leur mandat s’est parfois limité jusqu’ici à mettre sur pied l'organisme pour ensuite le remettre à la communauté.

         À cet égard, il faudra également demeurer attentif à la composition de ces conseils d'administration. Un déséquilibre en faveur des usagers ou des producteurs de services peut avoir des conséquences fâcheuses pour le développement de l'organisme et le respect de ses objectifs initiaux. C'est pourquoi le développement d'organismes comme les coopératives de solidarité, qui incluent à la fois des usagers, des producteurs de services et même des membres de la communauté dans les conseils d'administration, peut constituer une piste intéressante à surveiller. Néanmoins,  la présence de membres de la communauté ne constitue pas à elle seule un gage de respect des ententes conclues sur les services. Il faut voir quelle est la vision portée par les membres de la communauté qui peuvent aussi provenir du secteur privé, par exemple, et porter davantage une vision entrepreneuriale traditionnelle du développement, remisant ainsi au second plan la dimension de développement social de l'entreprise. La présence d'acteurs sociaux comme les organisateurs communautaires de CLSC au sein des conseils d'administration pourrait s'avérer un pas dans la bonne direction, même si on peut penser que la présence d'un organisateur communautaire ne peut modifier à elle seule l'orientation d'un conseil d'administration. Or, si cette présence n'est pas nécessairement suffisante, elle peut en revanche s'avérer un catalyseur afin de regrouper les forces vives d'une communauté et porter à leur attention les enjeux liés au développement de l'économie sociale sur leur territoire.

3.6.3Pour un véritable rapport de partenariat entre le secteur public et le   secteur de l’économie sociale

 L'État doit demeurer la référence première en ce qui a trait aux divers aspects balisant la production des services, c'est-à-dire l'établissement de normes concernant la qualité des services, les normes minimales de travail des producteurs de services, etc. Néanmoins, baliser ne veut pas dire contrôler et l'État devra faire davantage confiance à ses partenaires de l'économie sociale et traiter avec eux en respectant leur spécificité et leur façon de faire. À défaut de quoi, on assistera à un rapport de sous-traitance plutôt qu'à un véritable rapport partenarial. Une telle éventualité laisse planer la possibilité, à plus long terme, d'une démotivation et d'un essouflement des acteurs de l'économie sociale. Cette situation pourrait ainsi ouvrir la porte à une nouvelle vague de privatisation, ce qui n'augurerait rien de bon pour la qualité des services et les conditions de travail du personnel.

3.6.4 Pour une formation sociale et professionnelle des personnes qui    produisent les services à partir des entreprises d’économie sociale

 Il faut également mettre en relief la question de la formation sociale des producteurs de services. On tient souvent pour acquis que les personnes embauchées pour travailler dans les entreprises d'économie sociale vont tout naturellement participer aux structures associatives ou coopératives et adhérer à leurs valeurs. Certains témoignages d'intervenants donnent plutôt à penser que ces habilités ne sont pas toujours développées chez les travailleurs, et que peu d'énergies ont été consacrées jusqu'ici à la formation sociale comparativement à la formation professionnelle des travailleurs dans les entreprises (Jetté, 1999). Or, les débats actuels concernant l'élargissement de la programmation de services souffrent manifestement de cette carence alors que les producteurs de services sont parfois eux-mêmes en faveur d'un élargissement des services afin d'augmenter les revenus de leur entreprise et consolider leur emploi.

 Pourtant, l'expérience d'Auxi-Plus et son échec à la fin des années 1980 (cf. Comeau, Bourque et Vaillancourt, 1995) ont démontré que la perversion des objectifs initiaux peut avoir des conséquences dramatiques pour l'avenir d'une entreprise associative ou coopérative (développement incontrôlé, partage flou des responsabilités, substitution d’emplois, manque de formation sociale, etc.). L'éducation au fonctionnement associatif et coopératif des entreprises devrait donc constituer un volet de la formation des travailleuses auquel on devrait attacher tout autant d'importance qu’au volet de la formation professionnelle.

3.6.5 Pour un mode de financement des services qui assure l’accessibilité   des services aux personnes à faibles revenus dans le besoin

 L'État doit continuer à assumer la majeure partie des coûts des services en tenant compte de l'impact préventif des activités de l'économie sociale et du coût avantageux que représente l'investissement dans ces entreprises comparativement aux avantages qui sont aussi concédés à l'entreprise privée pour la création d'emploi. À cet égard, les témoignages de plusieurs intervenants donnent à penser que certaines personnes à faibles revenus n’ont pas accès actuellement aux services d’aide à domicile que leur état recquiert étant donné leur incapacité financière à assumer les frais inhérents à ces services (Jetté, 1999). Il faut donc revoir les barêmes fixés dans le programme d’exonération financière afin que l’ensemble des personnes à faibles revenus puissent profiter des services dont elles ont besoin. L’amélioration de la qualité de vie des personnes et les effets préventifs des mesures prises pour favoriser leur maintien dans leur milieu de vie justifient largement les sommes investies.

3.6.6 Pour l’établissement de nouveaux partenariats entre chercheurs et   intervenants afin de favoriser le développement d’une mesure de  l’impact social des entreprises d’économie sociale

 La reconnaissance de l'impact des entreprises d'économie sociale sur la santé et le bien-être des populations pourrait passer par l'établissement de liens avec des chercheurs afin de susciter leur intérêt pour ce champ d'étude. Cet impact a souvent été mentionné par les promoteurs pour justifier les investissements publics dans l'économie sociale mais, jusqu’ici, peu d'études sont venues confirmer ces affirmations. La recherche pourrait ainsi venir soutenir le développement de l'économie sociale, par une validation de ses spécificités et de son efficacité, tant dans ses dimensions endogènes (fonctionnement interne, structures de participation, impact sur le personnel, etc.) qu'exogènes (qualité des services, impact sur les clientèles, aspect préventif, etc.).
 

Conclusion

 Au cours des trente dernières années, le domaine de l’aide à domicile, et les politiques qui le concernent, ont subi toutes sortes de transformations en fonction de l’importance accordée par les politiques gouvernementales à ce domaine d’activités, ainsi qu’en fonction de la vision du développement des services portée par les acteurs sociaux impliqués dans leur livraison. De négligés qu’ils étaient au début des années 1970, les services d’aide à domicile ont graduellement fait l’objet d’une attention accrue de la part des décideurs publics à mesure qu’était reconnue l’importance de l’aide à domicile pour le maintien des personnes dans leur milieu de vie naturel. Cette importance accrue allait de pair avec la nécessité, maintenant reconnue, de mettre un frein au mouvement d’hospitalisation et d’enfermement qui a caractérisé le système de santé et de bien-être au Québec, depuis près de trois quarts de siècle, dans le traitement des personnes aux prises avec la maladie, les incapacités ou les pertes d’autonomie.

 C’est au cours de la deuxième moitié des années 1990 que s’est amorcé le passage de l’expérimentation à l’institutionnalisation des projets d’aide domestique en économie sociale au Québec. Ce passage a permis à de nouveaux acteurs sociaux provenant de la société civile de s’impliquer dans la production et la programmation de certains services liés à l’aide domestique. C’est donc dire que le développement de l’économie sociale ne s’est pas fait nécessairement dans une seule direction, mais qu’il s’est effectué et continue à se faire selon des modalités conséquentes aux visions portées par les différents acteurs sociaux.

 En fait, trois visions semblent vouloir façonner la configuration institutionnelle que prendront les services d’aide à domicile en économie sociale au Québec au cours des prochaines années (Vaillancourt et Laville, 1998) (cf. annexe 7). La première de ces visions se rapporte au modèle de développement néo-libéral et tend à réduire l’économie sociale à des impératifs strictement économiques, évacuant du même coup les dimensions sociales intégrées à ces projets par leurs promoteurs. Découlent alors de cette vision des entreprises sur lesquelles les communautés ont souvent peu d’emprise, des pressions à la baisse sur les conditions de travail des producteurs de services, une programmation d’activités établie sur la base de la liberté de marché et tenant peu compte de l’offre de services publics, etc. Dans cette vision, les entreprises d’économie sociale en aide domestique sont perçues comme des sous-traitants, en concurrence avec le secteur privé, qui peuvent réaliser à moindre coût des services et des activités délaissés par le secteur public.

 Dans la deuxième vision, que nous appelons «social-étatiste», les entreprises d’aide domestique relevant de l’économie sociale sont également considérées sous l’angle de la sous-traitance. Elles sont perçues de manière suspecte et pouvant favoriser la privatisation des services. Dans cette optique, «les initiatives relevant de l’économie sociale sont confinées à jouer un rôle marginal, l'originalité et l'efficacité de leurs activités ne faisant pas l'objet d'une attention particulière par rapport aux activités du secteur public» (Jetté et Vaillancourt, 1999: 9).

 Enfin, dans un troisième scénario qualifié de «solidaire», les composantes de l’économie sociale forment un véritable secteur d'activité. Si certaines conditions sont respectées, notamment concernant les rapports de partenariat avec l’État (non-substitution des emplois, respect des ententes avec les CLSC, respect de la spécificité des entreprises, etc.), elles seront en mesure de dégager un espace d'autonomie grâce auquel elles pourront fournir leur plein potentiel et développer leur capacité de répondre rapidement aux nouveaux besoins de la population en matière d’aide à domicile. Ces conditions exigent également de porter une attention particulière au double empowerment des producteurs de services et des usagers. Concrètement, cela pourrait signifier l’octroi d’un financement suffisant permettant l’établissement de conditions de travail adéquates pour les personnes employées (majoritairement des femmes) ainsi que la fixation de barèmes de tarification permettant aux usagers les plus démunis d’être en mesure de recevoir les services d’aide domestique, condition essentielle à leur maintien dans leur milieu de vie naturel.

 Compte tenu de l’analyse que nous faisons de ces trois modèles, «l’institutionnalisation d’un modèle solidaire nous apparaît finalement plus prometteur car, tout en favorisant l'amélioration et le renforcement des réseaux sociaux au sein des communautés, on peut penser qu'une présence accrue et bien balisée des organismes relevant de l'économie sociale dans la production et la dispensation des services sociaux et de santé pourrait insuffler, aux secteurs privé et public, une dynamique organisationnelle et institutionnelle qui leur fait souvent défaut: finalité des services aux membres, autonomie de gestion (qui restera tout de même toujours relative dans le secteur public), processus décisionnel démocratique dans l'organisation du travail, participation des usagers, etc.». (Jetté et Vaillancourt, 1999).

 Or, l’actualisation de ce potentiel dépend pour beaucoup des stratégies qui seront adoptées par les acteurs sociaux, tant du secteur public que du secteur communautaire, qui sont concernés par le développement des organismes d’économie sociale en aide domestique. L’issue finale du développement des entreprises d’économie sociale en aide domestique dépendra ainsi de la capacité des acteurs sociaux à préserver le caractère innovateur de ces entreprises dans un contexte marqué par leur passage de l’expérimentation à l’institutionnalisation (Jetté et al., 1999).

 Nous l’avons souligné au début de notre présentation, les services d’aide à domicile constituent un laboratoire riche et vivant au chapitre de la recherche d’un nouveau partage des responsabilités entre le secteur public, le secteur de l’économie sociale, le marché et le secteur informel. La nouvelle configuration des services qui va en émerger constituera un élément du nouveau modèle de développement en train de s’instituer au Québec en remplacement de l’ancien modèle fordiste (Lévesque et Mendell, 1999). Déjà, plusieurs initiatives issues de ces transformations ont été mises en place dans divers secteurs d’activités (CLD, CRES, virage ambulatoire, etc.). C’est donc dans cette perspective globale qu’on doit replacer l’action des acteurs sociaux progressistes concernés par les services d’aide à domicile, à qui il appartient maintenant de soutenir des stratégies qui favoriseront le développement «solidaire» de l’économie sociale. Nous croyons que les quelques pistes d’action que nous avons dégagées précédemment, malgré leurs limites et leurs trop courtes descriptions, représentent, à ce titre, quelques-unes des avenues possibles en vue de renouveler les pratiques.

 Évidemment, l’engagement des acteurs sociaux dans des stratégies favorisant le développement d’une économie sociale plus «solidaire» ne constitue pas en soi une garantie de réussite sur tous les plans. Néanmoins, comme l’analyse démontre qu’il est futile d’espérer une solution qui provienne soit d’un retour en arrière (modèle social-étatiste), soit d’une fuite en avant (modèle néo-libéral), l’économie sociale, version solidaire, demeure donc la voie la plus prometteuse pour ceux et celles qui souhaitent l’avènement d’une politique de maintien à domicile globale et généreuse, tant pour les usagers que pour les producteurs de services. Loin de prendre leur essor au détriment du secteur public, les entreprises d’économie sociale en aide domestique devraient, au contraire, permettre d’assurer les transformations souhaitées au sein du système de santé et de services sociaux, tout en maintenant un secteur public fort, gardien de la qualité, de l’accessibilité et de l’universalité des services. C’est dans la reconnaissance de ces nécessaires transformations et dans le nouveau partage qu’elles imposent que se situe, à notre avis, l’essentiel des enjeux concernant l’aide à domicile au Québec à l’aube de l’an 2000.
 

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