Un texte de Eliza Daley, publié le 16 décembre 2024 sur son blogue By My Solitary Hearth. Traduction : DeepL & GB
J’ai passé la majeure partie de ma vie d’adulte et j’ai élevé mes fils dans un endroit où les traditions sont encore vivantes et mises en œuvre. En outre, ces traditions sont comprises. Les raisons pour lesquelles nous faisons ce que nous faisons sont bien connues et sont la source de discussions et de débats sans fin. Rien n’est simplement fait. Il doit y avoir à la fois une lignée et un motif valable pour continuer. Cela ne veut pas dire que de nouvelles traditions ne fleurissent jamais dans le désert. L’une de mes traditions préférées est la Twinkle Light Parade, qui a lieu au début du mois de décembre. De toute évidence, cette tradition n’est pas plus ancienne que les guirlandes électriques. Mais quel que soit le temps, tous les Burqueños (les habitants de Albuquerque, Nouveau Mexique) se déplacent pour assister à un cortège de low-riders, de clubs de cyclistes, d’étudiants en danse, de musiciens et d’autres participants du même genre, tous parés de centaines de guirlandes lumineuses. Ma librairie a commandité un char, représentant le grand-père préféré de tout le monde assis devant une cheminée en train de lire des histoires de vacances à une bande d’enfants, avec d’énormes découpages des personnages dansant sur le pourtour. (La création la plus spectaculaire de mon professeur d’artisanat en résidence). C’est ce que nous faisons. Ce que nous faisons, c’est ce que nous sommes.
Nous assemblons également un arbre de Noël pour la place de la vieille ville, composé d’une cinquantaine d’arbres de douze pieds attachés à un pilier central (bien qu’il semble que pendant le COVID, la ville se soit convertie au plastique et ait, en quelque sorte, perdu son âme). Nous avons installé des lumignons sur chaque surface plane, au grand dam des pompiers. (Les pompiers ne sont venus chez moi qu’une seule fois et c’était parce que nos voisins d’en face avaient une fuite de monoxyde de carbone. Pendant que les pompiers s’en occupaient, l’un de mes lumignons s’est enflammé juste à côté du camion de pompiers… C’était un peu embarrassant. Mais cela s’est terminé par une dégustation de cidre et de biscochitos dans mon jardin avec la plupart des habitants du quartier et les premiers intervenants, donc tout s’est bien passé). Nous accrochons des ristras (piments attachés en grappes) et des plantes vertes vivantes à chaque porte et à chaque poteau (ce qui contribue à la fête lorsque les lumignons ne fonctionnent pas…). Nous décorons des arbres au hasard le long de la route et traversons les jardins botaniques pour admirer les lumières, écouter de la musique mariachi et déguster du chocolat chaud saupoudré de poudre de chili. Nous mangeons des tamales et du posole la veille de Noël et nous saupoudrons du piment rouge et du piment vert sur tout, parce que ça fait « Noël ». Nous avons des crèches vivantes avec de vrais ânes, moutons et chameaux (oui, au pluriel). Nous veillons toute la nuit au moment du solstice et laissons le sapin allumé toute la nuit le soir de Noël. Nous organisons des fêtes pour la 12e nuit et ne prêtons pas beaucoup d’attention au réveillon du Nouvel An, bien qu’il existe une forte tradition consistant à manger un grain de raisin à chaque coup de minuit pour porter chance à l’année à venir. Et les gens font exploser des objets, bien que cela puisse également se produire n’importe quelle nuit entre la Saint-André et la 12e nuit. Les cadeaux et les sucreries, les fêtes et les festins peuvent avoir lieu à tout moment entre la Saint-Nicolas et l’Épiphanie, et très peu de travail est accompli entre Thanksgiving et la mi-janvier environ. C’est ce que nous sommes… Surtout ce dernier point.
Et du 16 au 24, nous organisons tous des processions de Las Posadas. Peu importe sa religion ou sa culture, tout le monde participe. Des feux de joie sont allumés et des lumignons sont disposés pour éclairer le chemin. Le cidre est pressé et des montagnes de biscochitos sont cuites pour nourrir les pèlerins affamés. Un couple séduisant est déguisé en Marie et Joseph et tous les autres revêtent des robes d’anges (bien que certains ressemblent davantage à des fées…). Parfois, un âne docile est réquisitionné. Et généralement, quelqu’un perd beaucoup de temps à imprimer les paroles des chants de Noël, bien qu’il soit impossible de les lire dans l’obscurité et que tout le monde les connaisse de toute façon. (Ou improvise raisonnablement bien.) C’est une tradition tellement ancrée que l’Orchestre symphonique des jeunes d’Albuquerque tire la quasi-totalité de son budget annuel d’une seule collecte de fonds : la vente de lumignons pour les défilés. (Pendant cinq années consécutives, mon allée ressemblait à ceci le week-end précédant Thanksgiving). Voilà ce que nous faisons. C’est ce que nous sommes. Et c’est en faisant cela que nous devenons ce que nous sommes.
Il y a toujours du shopping et des excès de table. Mais cela fait et a toujours fait partie des festivités du milieu de l’hiver et a moins à voir avec le mercantilisme moderne qu’avec le maintien de coutumes ancestrales. D’une part, la plupart des habitants du Nouveau-Mexique sont plutôt pauvres et ne peuvent se permettre des dépenses ostentatoires, mais il y a aussi moins d’envie. Il y a tellement d’autres aspects de la fête que les cadeaux ne sont qu’accessoires. Les cadeaux sont également répartis sur l’ensemble de la saison, de sorte qu’il n’y a pas d’accumulation jusqu’à l’extravagance massive de l’ouverture des cadeaux le matin de Noël. Enfin, les cadeaux sont généralement petits et significatifs, avec une préférence pour la nourriture, les articles ménagers faits à la main, les vêtements et les bijoux. (En tant qu’habitant du Nouveau-Mexique, si vous ne connaissez pas au moins quatre bijoutiers et une poignée de tisserands et de potiers, vous devriez sortir davantage…) Les enfants reçoivent des jouets, bien sûr, mais seuls un ou deux d’entre eux viendront de la part du Père Noël. (Bien entendu, dans un pays où les familles sont largement intactes, les adultes finissent toujours par apporter un grand nombre de cadeaux pour les nièces, les neveux, les petits-enfants, les arrière-petits-enfants et l’enfant du voisin qui est toujours là). Il est important de noter que les cadeaux ne proviennent pas du centre commercial qui, à Albuquerque, d’après mes souvenirs, était un endroit sans joie et stérile qui avait du mal à maintenir en activité ses principaux magasins. Les cadeaux sont trouvés au hasard, achetés aux artisans qui bordent les places, commandés à des artisans locaux ou fabriqués. Noël est une affaire locale. (Bien sûr, la plupart des choses de la vie sont locales au Nouveau-Mexique… nous sommes trop idiosyncrasiques pour le marketing de masse).
Voilà ce qu’était ma vie. Telles sont mes expériences et mes attentes. Aujourd’hui, je vis en Nouvelle-Angleterre. Malgré toutes les cartes postales Currier & Ives et les promenades en traîneau à travers la campagne, je ne pense pas que la Nouvelle-Angleterre comprenne l’intérêt des vacances. Ce n’est pas un pays de traditions profondes. En fait, Noël, et plus particulièrement le fait de prendre congé pour les fêtes, a été interdit dans le Massachusetts et le New Hampshire pendant quelques centaines d’années. Mais même dans le Vermont, où nous aimons notre originalité, il n’y a pas eu beaucoup d’efforts pour créer un ensemble cohérent de traditions. La plupart du temps, il s’agit simplement d’acheter des choses, ce qui n’est vraiment pas réjouissant au cœur de l’hiver.
Je me sens en porte-à-faux. Où est le sens ? À quoi tout cela sert-il ? Pourquoi est-ce que je fais ça ? Où est la parade des lumières scintillantes ? Quel est l’équivalent local de Las Posadas ? Que mange-t-on ici ? Que faisons-nous ? Qui sommes-nous ? Qu’est-ce qui fait de nous une culture ?
Ne vous méprenez pas. Il y a beaucoup de choses qui font les Vermontois, mais les fêtes de fin d’année ne semblent pas en faire partie. Noël n’est pas une tradition autochtone. Elle est imposée et ne s’accompagne d’aucun manuel. Cela s’explique peut-être par le fait que le Vermont était une culture protestante qui ne célébrait pas les fêtes, et qu’il est aujourd’hui le troisième État le moins religieux de l’Union, derrière ses voisins, le Massachusetts et le New Hampshire. On peut dire ce que l’on veut du catholicisme, mais il perdure (peut-être parce que la plupart de ses traditions sont en fait païennes). Les versions plus autonomistes du christianisme ne semblent pas aussi durables. La foi protestante n’inclut certainement pas de traditions, de façons de marquer le temps, de raisons de se rassembler et de célébrer. Dans un système de foi aussi individualiste, il n’y a pas de raisons d’être une culture, une communauté, une société. Et Noël n’est pas une chose qui a un sens dans l’isolement. C’est un rassemblement.
J’ai donc l’impression de créer ma propre fête à partir de quelques principes. J’ai importé ce que je pouvais de mon passé. Je m’obstine à manger des tamales et du posole et à allumer des bougies la veille de Noël. Je bois du cidre chaud, pas du lait de poule (qui est… quoi exactement ???). J’ai l’habitude de sortir mes lumignons en fer blanc, mais je ne l’ai pas fait cette année parce que le temps a été horrible. Je fais brûler de l’encens de piñon et de cèdre pour imiter les senteurs de l’âtre des Noëls passés. J’ai des piments, des coyotes (très présents au Nouveau-Mexique) et un jackalope d’un éclatant turquoise accrochés à mon arbre, et le chapeau de cow-boy que j’ai posé sur l’arbre il y a des décennies en est toujours la pièce maîtresse. Le crâne de vache que chaque Nouveau-Mexicain acquiert un jour ou l’autre (le nôtre s’appelle Bart) est entouré d’un ruban festif et de branches de conifère. J’écoute de la musique du Nouveau-Mexique et je fais des biscochitos (bien que je sois apostate et n’utilise pas de saindoux). La culture matérielle est toujours là… mais le rituel et surtout le rassemblement doivent encore se matérialiser.
Je ne sais pas si cela arrivera. Je refuse de m’assimiler à la mode des fêtes zombies et d’abandonner mes notions de célébration, mais personne ici ne comprend l’importance de Las Posadas ou de l’oratorio annuel de Noël de Música Antigua de Albuquerque. Et il n’y a rien de tel que la Twinkle Light Parade. Alors, comment puis-je rejoindre ces gens là où ils sont tout en restant moi-même ? Je sais qu’il y a d’autres expatriés néo-mexicains ici. Peut-être avons-nous besoin d’un groupe de soutien.
Mais il m’est apparu ce week-end que c’est la raison pour laquelle j’aspire toujours à avoir ma propre librairie – même si être propriétaire d’une entreprise est vraiment la dernière chose dont j’ai envie dans ma vie en ce moment. J’achetais des cadeaux pour mes neveux et nièces. (Je fais mes achats en ligne, mais dans des établissements locaux où chacun d’entre eux habite, afin de réduire au minimum les frais de port. Plus ils grandissent, plus il y a de chèques-cadeaux…) Je me suis souvenue du plaisir que j’avais eu à trouver des cadeaux pour mes propres fils et ma nièce adulte (qui a maintenant deux enfants à elle… pourquoi donc s’obstinent-ils tous à vieillir…). Et j’ai réalisé que c’était amusant parce qu’il s’agissait d’être avec d’autres personnes. Les endroits où nous faisions nos courses étaient soit les marchés en plein air qui parsèment le paysage du Nouveau-Mexique tout au long de l’année, soit des endroits comme ma librairie – des endroits où l’on peut aller et faire autre chose que du shopping. Écouter de la musique ou participer à une soirée de musique ouverte, faire de l’artisanat, assister à l’heure du conte avec un Père Noël poète et cow-boy, organiser un concours de maisons en pain d’épices ou de biscuits (je devais être là juge), faire de la poésie slam sur le thème des fêtes – plus c’est ridicule, mieux c’est. Nous avons organisé un bal de Noël à la manière de Poudlard et nous n’avons même pas ouvert les caisses enregistreuses. Il s’agissait uniquement d’une fête pour les enfants d’Albuquerque. Nous avons organisé des fêtes costumées pour les adolescents lors de la 12e nuit. Les auteurs locaux étaient toujours présents. Je comprends que c’était une bonne chose pour eux et que certains d’entre eux avaient peut-être été enjoints par leurs éditeurs de se mêler à la foule, mais en général, ils venaient simplement parce que c’était amusant. C’était un rassemblement. Au bout d’un certain temps, c’est devenu une tradition.
Je sais que je suis extraordinairement chanceuse d’avoir eu cette joie dans ma vie, mais bon sang, je ne suis pas encore morte et je veux plus de plaisir. Je veux faire des choses qui ont de l’importance, qui signifient quelque chose pour moi, qui me relient à mes gens et à mon milieu de vie, des choses qui me font ressentir quelque chose, de préférence quelque chose d’agréable. Je veux un jour férié, un jour saint, un jour qui célèbre quelque chose, et qui le célèbre d’une manière qui ait un lien avec ce jour dans l’année. Les cadeaux ont un lien avec le coeur (le creux) de l’hiver (Midwinter), mais pas le shopping – sauf dans cette culture où tout doit être acheté (parce que tout doit générer des flux de richesse pour les riches). Alors… peut-être devrais-je créer un tiers-lieu (un café ? un lieu de rencontre qui ne soit pas axé sur le commerce) pour le centre du Vermont. C’est un concept tellement étranger aux habitants de la Nouvelle-Angleterre – pour qui tout doit être monétisé – que je ne peux pas attendre que quelqu’un d’autre arrive avec l’idée. Je dois rassembler les expatriés du Nouveau-Mexique, et peut-être qu’ensemble nous pourrons montrer aux habitants du Vermont comment festoyer. Peut-être qu’ensemble, nous pourrons créer une tradition. Peut-être qu’ensemble, nous pouvons créer un jour férié.
Et je serai en charge des célébrations…