logement, indivise et densité

La progression invisible des copropriétés indivises s’ajoute à une foule d’autres indices signalant que les modes de fonctionnement en place ne jouent plus leur rôle dans les quartiers centraux de Montréal : « Les familles continuent à se rabattre massivement vers les banlieues. la construction de logements locatifs est en panne sèche, le parc de coopératives d’habitation et de logements sociaux peine à se développer et l’itinérance fait maintenant partie de la réalité de nos quartiers », a déploré François W. Croteau, maire de l’arrondissement de Rosemont-La Petite-Patrie.

Notre étude confirme qu’il existe présentement au sein de la population montréalaise un très fort désir d’accéder à la propriété. « Il va de soi que nous souhaitons que les Montréalais deviennent propriétaires à Montréal plutôt qu’en banlieue. Le problème que notre étude a mis en lumière est que cela se fait présentement au détriment des locataires du Plateau et, sans doute, des autres quartiers centraux de Montréal », a ajouté Josée Duplessis, conseillère de ville du district de De Lorimier.

Extrait d’une Étude de Projet Montréal sur les copropriétés. Ici le Pdf. Cette situation (croissance de l’importance de la propriété indivise) ne me surprend guère : avec des prix exorbitants il devient nécessaire de se mettre à plusieurs pour rassembler la crédibilité financière…

Deux autres études sur les questions de logement, venant de la Société d’habitation du Québec cette fois. L’évolution démographique et le logement au Québec : rétrospectives 1991-2006 et perspectives 2006-2056, étude de l’institut de la statistique du Québec lancée lors des Entretiens sur l’habitat du 29 février dernier qui portaient sur le thème de La densification résidentielle : comment en favoriser l’acceptabilité sociale ? (un numéro spécial de la revue Habitation Québec, réalisé pour l’occasion). Sur une question incidente : Le vieillissement de la population et le logement : exploration en banlieue, seul numéro de la revue Habitation Québec publié en 2011.

Lisée vieillit ?

Bizarre, je furetais sur le site Politiques sociales.net, dans la section Vieillissement, où je cherchais un article sur les services à domicile entr’aperçu un peu plus tôt… et j’y trouve quatre articles sur à propos de la parution récente de J.-F. Lisée :  Mettre la droite K.-O. ! Une erreur de classification ou bien un message (subtil) de l’équipe de PolitiquesSociales.net à son patron ?

services à la petite enfance sous la loupe

Si le Québec se distingue favorablement par les efforts déployés sur plusieurs fronts, comme la protection de l’enfance, la lutte contre la pauvreté et les services de garde éducatifs, il y a lieu de se demander s’il s’est doté des outils nécessaires pour être en mesure d’innover, d’avoir une vision globale et à long terme et d’être réflexif autant par rapport aux pratiques professionnelles que par rapport aux modalités de gestion et aux structures en place.

Le commissaire à la santé et au bien-être du Québec publiait le 23 février dernier son troisième rapport d’appréciation, celui-ci portant sur les services en périnatalité et petite enfance. En quatre volumes.

densité, vous dites ?

Combien de personnes Mahattan peut-elle contenir ? C’est le titre d’un article du New-York Times, dont je tire cet extrait.

Ed Glaeser, a Harvard economist, inevitably comes up in conversations about how cities should grow. In his recent book, “Triumph of the City,” he makes an argument — which many consider persuasive — that dense places are uniformly better and more interesting than emptier ones, and that they should be allowed to develop unfettered, even if it means building towers where brownstones once stood.

Je me demande jusqu’à quel point on est prêt à remplacer les demeures « nobles » (brownstones)par des ensembles de tours et d’espaces publics à haute densité. Saviez vous qu’on pourrait faire entrer Paris sur l’île de Montréal ?

La superficie de Paris-intra-muros

En ramenant à la même échèle les deux cartes on peut en effet faire entrer le Paris intra-muros (2,2 millions de personnes) plusieurs fois sur l’île de Montréal.

C’est dire la densité de la population à Paris.

C’est dire qu’on pourrait encore faire un bout de chemin à Montréal.

voisinages, santé et sociologie

Un billet du blogue en santé publique Walkabilly pointe vers cet article produit par des chercheurs montréalais (Martine Shareck, Clément Dassa and Katherine Frohlich) : Improving the measurement of neighbourhood characteristics through systematic observation: Inequalities in smoking as a case study. On y présente des outils pour mieux mesurer les caractéristiques des voisinages grâce à l’observation systématique. Parmi les sources citées par cet article, celle-ci – du regretté Paul Bernard – me semble intéressante, Health inequalities and place: A theoretical conception of neighbourhood. Des articles qui touchent, avec un angle santé, la grande question de l’effet du voisinage qu’un sociologue de Chicago, Robert J. Sampson, vient documenter, après dix ans de recherche, dans un ouvrage récent Great american city : Chicago and the enduring neighborhood effect.

taux d’institutionnalisation

Pour analyser correctement la situation illustrée par les cartes du billet précédent, il me faudra faire d’autres cartes ou colliger d’autres données : la population hébergée dans les centres d’hébergement publics (anciennement appelés CHSLD); la portion de la population rejointe par les services à domicile des CSSS; les taux de fragilité ou de besoins en soins de longue durée…

Comme le montrait clairement l’étude de Robert Choinière, Vieillissement de la population, état fonctionnel des personnes âgées et besoins futurs en soins de longue durée au Québec, dont j’extrais ici une partie du Tableau 12, il y a un lien entre les taux d’institutionnalisation et les besoins des personnes âgées vivant en ménages privés. Là où les taux d’institutionnalisation sont plus élevés (Bas-du-fleuve, Centre du Québec, Chaudière-Appalaches), on retrouve des taux de difficultés avec les AVQ (activités de la vie quotidienne) chez les personnes hors institution plus bas, et inversement, là où les taux d’institutionnalisation sont les plus bas (Montréal, Côte-Nord, Outaouais), les taux de difficultés avec les AVQ dans la population non institutionnalisée sont plus élevés (autour de 15 %).

Le tableau 14 est aussi intéressant. Attention, car il a été changé (ici tiré de l’erratum du 15 avril 2011 – en effet, à la lecture, la stabilité du nombre de résidences privées avec service de 2003 à 2008 dans le document original m’avait semblé suspecte). Une augmentation de 22 % durant cette période. Croissance qui s’est certainement poursuivie jusqu’à aujourd’hui.

Un des problèmes que nous avons pour tracer un portrait fidèle de la situation des ainés ayant des besoins de longue durée, c’est que toutes les personnes dans les résidences privées avec services (RPAS) ne sont pas réputées institutionnalisées. Le taux d’institutionnalisation rapporté dans le premier tableau (première colonne) est tiré du recensement, et couvre les personnes en CHSLD et une partie seulement des personnes en RPAS. Il s’agit de la population « en ménages collectifs » du recensement, des gens qui vivent en chambre ou encore dans des appartements sans cuisine. À ce qu’on m’a dit, c’est le critère déterminant différenciant le ménage privé de l’habitation collective.

Dans le contexte actuel, avec la prolifération des types d’habitations avec services, il devient difficile de mesurer le degré de l’institutionnalisation des personnes âgées avec un simple indicateur. On a pu croire que le registre des résidences pour personnes âgées institué par le gouvernement québécois il y a quelques années allait nous donner plus d’information… mais si je ne m’abuse les mécanismes d’accréditation ne prévoient même pas de recueillir l’âge des résidents.

Il faudrait faire comme certains pays européens, notamment le Danemark, et rencontrer toutes les personnes au moment de leur soixante-quinzième anniversaire. Il semble que ce soit une mesure efficace de prévention permettant de dépister précocement certaines problématiques et d’orienter les personnes vers les ressources appropriées.

Ici, on attend que la personne visite l’urgence, et ensuite on envoie le CLSC… Une approche populationnelle, vous disiez ?

<NOTE> Après avoir rétabli les liens vers les documents de l’INSPQ, je constate, à propos des deux errata : celui d’avril 2011 (tableau 14) n’a pas été intégré au document original… Donc nous pouvons constater l’erreur commise dans l’original. Mais le tableau 3 inclus dans l’erratum de juillet 2010 est, il me semble (SVP corrigez-moi si je me trompe), LE MÊME que le tableau 3 (page 5) du document original. Après vérification, on me dit qu’il a été intégré à l’original. <\Ajout – correction 2022.03.05>

crédit d’impôt cartographié

J’ai parlé récemment (ici, et ) de l’iniquité d’utilisation du crédit d’impôt pour le maintien à domicile des personnes âgées (CIMADPA). Iniquité dans la mesure où plus on est riche, plus on a de soutien de l’État. Mais aussi inégalité d’accès, ou d’utilisation de ce crédit d’impôt remboursable. J’ai voulu cartographier, à l’aide des données fournies dans le rapport Statistiques fiscales des particuliers (pdf) pour l’année d’imposition 2008, la répartition (pour Montréal seulement). Mes excuses, je n’avais pas la carte de toutes les circonscriptions de la province. Cela aurait aussi été plus long… Mais ce serait sûrement intéressant, et permettrait sans doute de mieux expliquer, comprendre les différences perceptibles sur l’île de Montréal.

Les quatre cartes (cartesMADPA) identifiant, par circonscription électorale provinciale : les montants reçus en moyenne, le nombre de bénéficiaire, le nombre de personnes âgées de 70 ans et plus (en 2006) et le taux d’utilisation du programme (bénéficiaires / population cible). Comment interpréter ces cartes ? Je vous laisse le soin d’y penser, en les regardant… J’y reviendrai bientôt.

Ajout : le rapport 2009 sur les finances des particuliers vient de paraître.

Ajout 2022 : voir aussi, avec les données 2016, réalisée en 2020 crédit remboursable pour aînés

responsabilité populationnelle

De plus en plus, la notion de responsabilité populationnelle est présente dans la plupart des réformes des systèmes de santé. Ce concept suppose la convergence des efforts à l’égard de la santé et du bien-être d’une population donnée et à l’égard de déterminants de la santé incluant l’accès à des services de qualité pour cette population. Il s’établit un consensus sur la nécessité d’une relation directe et durable entre les prestataires et la population du territoire desservi. [Pratiques et Organisation des Soins 2011 n°4]

La responsabilité populationnelle estun concept de plus en plus utilisé, comme en fait foi la citation précédente,  tirée d’une revue européenne. Moi qui en étais venu à croire que ce n’avait été qu’une façon de dorer la pilule de la hiérarchisation des services et les contrats de gestion du MSSS. Même le ministère y est allé d’une Stratégie de soutien à l’exercice de la responsabilité populationnelle.

Cette Stratégie reconnait que le concept n’était pas compris, ni accepté de même façon par tous les partenaires des RLS (réseaux locaux de services) – supposé être les porteurs de cette nouvelle responsabilité. Dans le numéro 74 du bulletin Coup d’oeil sur la recherche et l’évaluation (bulletin qui semble s’être arrêté en 2010), on note :

Tous ne partagent pas la notion d’une responsabilité envers la population d’un territoire. Ainsi, les médecins définissent d’abord leur responsabilité par rapport à leur clientèle. Ceux en groupe de médecine familiale (GMF) soulignent qu’ils ont d’ailleurs pris des engagements envers une clientèle inscrite. Certains médecins ont aussi indiqué qu’ils ne peuvent être responsables d’une population s’ils ne disposent pas de tous les leviers. Quant aux organismes communautaires, ils ne sont pas tous à l’aise avec le concept de responsabilité conjointe. Certains, d’ailleurs, ne se reconnaissent tout simplement pas comme partenaires du réseau local et ne se sentent responsables que du groupe qu’ils représentent. Enfin, pour les gestionnaires et membres du personnel des établissements, leur responsabilité est dans les faits celle de leur organisation d’où les interrogations nombreuses sur les rôles respectifs des missions sociales et de santé ainsi qu’entre la première et la deuxième ligne.

Après une première période d’intégration et de transformation organisationnelle, marquées par des craintes et des frictions inévitables (voir Évaluation de l’implantation des réseaux locaux de services de santé et de services sociaux – le résumé d’une dizaine de page vaut d’être lu), il était temps que le concept de responsabilité populationnelle devienne quelque chose de concret. Enfin, je ne suis pas sûr que concret soit le premier qualificatif qui vienne à l’esprit en terminant la lecture de ce court mais stimulant texte Stratégie de soutien à l’exercice de la responsabilité populationnelle 😉

Reste à voir si les promesses de la Stratégie seront au rendez-vous : plus grande marge de manœuvre  aux décideurs du palier local (permettant à chaque RLS de mieux définir son panier de services et de le faire évoluer en fonction des besoins ou des dynamiques locales); une deuxième génération des ententes de gestion permettant de contextualiser les résultats; plus de cohérence entre les différentes orientations, stratégies, demandes et planifications du ministère et des agences. Grosse commande !

Chose à retenir : les paliers régional et national sont identifiés à plusieurs reprises comme étant des gardiens de l’équité. Intéressant… Comment pourrions-nous corriger la manière inéquitable dont est utilisée un crédit d’impôt pour le maintien à domicile des personnes âgées ?