matières spirituelles

Noël sans messe de minuit, sans avalanche de cadeaux à donner aux enfants et petit-enfants, sans les excès de table et de boisson… Que reste-t-il ?


Je me disais que la lecture de cette « théologie politique de l’anthropocène« , titrée Composer un monde en commun par l’ex-financier devenu jésuite, Gaël Giraud, pourrait peut-être redonner un peu de sens à la pâle aura de religiosité qui vit encore sous les décombres de notre société de consommation.

Sachant que je serais saturé de citations bibliques et de références à l’Esprit, je me disais que la lecture de « L’instinct de conscienceComment le cerveau fabrique l’esprit« , de Michael Gazzaniga serait un bon pendant matérialiste.

C’est ce que j’ai fait au cours des derniers jours. Mais je n’essaierai pas ici de résumer les 850 pages de Giraud, ni les 300 de Gazzaniga ! Seulement tenter de répondre humblement à la question : Qu’est-ce que j’en retiens ? Qu’est-ce qui m’a frappé ?

Gaël Giraud est un auteur dont j’ai parlé ici à quelques reprises. Ses écrits et conférences étant habituellement très accessibles, j’ai été surpris par le caractère érudit, le nombre élevé de ces théologèmes (devrais-je dire théologismes ?) qui permettent sans doute d’inscrire cette recherche dans la longue, très longue histoire des travaux théologiques mais en alourdissent grandement la lecture par le « commun » des mortels !

J’ai été intrigué d’abord, mais finalement conquis par cette lecture de Luc et des Actes des apôtres, en particulier des épisodes relatant l’Ascension et la Pentecôte. Le premier événement rendu, interprété par Gaël comme christologie du « trône vide », laissant place à l’autonomie et la liberté humaine; le second, la Pentecôte, quand à elle interprétée comme présence de ce qu’on pourrait appeler un « esprit du (ou des) commun(s) ». Un esprit, une culture des communs qui peut, selon Giraud, être nourri, inspiré par l’Esprit saint, accompagnant les humains dans leurs relations avec les autres, humains et non-humains.

L’appropriation privée du monde poussée à l’extrême par le capitalisme globalisé répond mal, très mal aux besoins croissants de protection de notre espace commun, de ces ressources et équilibres sans lesquels nous, les humains, mais aussi beaucoup d’autres espèces vivantes et magnifiques ne pouvons vivre sur cette terre. Cette gestion en commun des ressources et droits d’usage que nous empruntons (plutôt que nous leur léguons) aux générations futures d’humains et de non-humains… est-ce que la Foi ou l’Esprit en favorisent l’émergence ou la mise en pratique ?

Si on admettra sans difficulté que la culture catholique dans une société comme le Québec a longtemps sévi comme endoctrinement et répression sexuelle (favorisant sans doute certaines déviations) ce serait une erreur de réduire l’influence de la religion à ça ! Je suis assez vieux pour avoir vu à l’oeuvre ces frères et soeurs, qui étaient (ou avaient été) membres de congrégations religieuses, qui agissaient avec générosité, accueil, confiance en l’humanité dans les réseaux et organisations communautaires. Était-ce l’oeuvre de l’Esprit ou seulement l’effet d’une éducation catholique renforcée par la pratique de congrégations disciplinées ? Toujours est-il que l’action, l’impact de ces femmes et ces hommes, avec ou sans soutanes, faisait du bien autour d’eux. En particulier auprès des délaissés, oubliés ou malades. Une action menée avec humilité, simplicité dans un style de vie qui n’est pas axé vers l’enrichissement personnel. Un style qui, à l’époque, pouvait inspirer confiance et confidences.

Les congrégations sont aujourd’hui presque disparues mais les hommes et femmes de bonne volonté existent encore. Certains de leurs principes tel la « Règle d’or »1Tu ne feras pas à ton prochain ce que tu ne voudrais pas qu’il te fasse… ou plus positivement Tu le traiteras comme tu souhaiterais être traité) ou d’autres leçons tirées des saintes paraboles mériteraient d’être relues et méditées… chaque dimanche matin ! Mais c’est sans doute dans l’action, dans la vie de chaque jour que de tels principes doivent être vécus plutôt que seulement lus et relus.

Tant de choses encore à faire, inventer, discuter, négocier, établir…

*

L’esprit, la conscience dont parle Gazzaniga n’est pas de même nature que celui de Giraud. En faisant le résumé de la recherche actuelle sur le fonctionnement du cerveau Gazzaniga donne une solide argumentation en faveur de la conscience animale. La conscience de soi, dans son environnement, la perception et l’interprétation des intentions de l’autre ne sont pas des aptitudes uniques aux humains. L’exceptionnalité des humains dans le monde animal est de plus en plus ténue, diaphane. Ce qui faisait de l’humanité le joyau de la Création, l’aboutissement de la flèche du progrès… risque d’apparaître aujourd’hui comme une excroissance un peu maladive, une expérimentation des formes de vie et d’intelligence qui a donné lieu à un cancer de la biosphère.2Ici c’est moi, et non Gazza qui parle !

Les capacités d’imagination, de mémoire, de symbolisation développées par Homo l’ont été sur une longue période, de quelques centaines de milliers d’années. Ces capacités ont été multipliées de manière exponentielles avec l’invention relativement récente de l’écriture (du calcul et de l’architecture).

Alors que les humains apprenaient à prévoir le retour du printemps et de la lumière, ou celui des troupeaux ou des saumons… en regardant les étoiles et en comptant les jours; ils inventaient des histoires et des mythes pour mettre de l’ordre, et mémoriser ces savoirs. À propos de l’origine du monde, ou des puissances incommensurables de la mer ou du soleil, de la terre et des étoiles. Des savoirs aussi tirés de nos échanges millénaires avec d’autres habitants de nos écosystèmes : l’ours, le buffle, le jaguar, le blé ou le riz.

La connaissance et les croyances sur le monde furent inscrites, traduites dans la matière, la pierre d’édifices parfois grandioses qui témoignaient de la puissance de ces capacités symboliques maintenant structurées et cumulées grâce à l’écrit, depuis 10 000 ans, ce qui est peu à l’échèle de l’humanité.

Si on prend au sérieux l’hypothèse de Gazzaniga d’une conscience aussi répandue que le vivant lui-même —
Ne pourrait-on prendre aussi au sérieux le dialogue qui pouvait s’établir entre les espèces (humaine et autres qu’humaine) notamment à travers les rêves ou encore les transes chamaniques ? (Nastassja Martin, À l’Est des rêves – Réponses Even aux crises systémiques)
Mais pour entendre ce que la forêt a à nous dire il faut commencer par l’écouter et pour cela il faut croire, savoir qu’elle peut le faire, nous dire quelque chose de sensé.

À ne concevoir nos forêts qu’en stères de bois couché, c’est sûr qu’on n’entendra pas grand chose.

Je me permet de terminer sur cette citation de Rémi Savard, les dernières phrases de Cosmologie algonquienne : échos eurasiens, qui concluait La forêt vive, récits fondateurs du peuple innu. Boréal, 2004 3Si Boréal avait respecté les vœux de l’auteur vous auriez pu le lire in extenso grâce au travail des Classiques des sciences sociales. Seules l’intro et la table des matières sont accessibles…

Sans pour autant nier les avancées dont nos sociétés peuvent à juste titre s’enorgueillir et dont d’autres n’ont pas manqué de profiter, qui peut affirmer que, pour sortir de certaines impasses dans lesquelles nous sommes présentement coincés, nous n’aurons jamais à revenir à des façons de penser et de faire ayant été prématurément rangées au sous-sol de nos musées, alors que d’autres sociétés auraient continué à les développer? Les propos suivants qu’écrivait l’anthropologue Michel de Certeau, il y a plus d’un quart de siècle, n’ont rien perdu de leur pertinence: «  tout se passe comme si les chances d’un renouveau socio-politique apparaissait aux sociétés occidentales sur leurs bords, là où elles ont été les plus dominatrices. De ce qu’elles ont méprisé, combattu et cru soumettre, reviennent des alternatives politiques et des modèles sociaux qui, peut être, vont seuls permettre de corriger l’accélération et la reproduction massives des effets totalitaires et nivelateurs générés par les structures du pouvoir et de la technologie en Occident» (La culture au pluriel, M. de Certeau, 1974).

Bon, l’expression « effet totalitaire et nivelateur », avec bientôt 50 ans de recul, serait sans doute remplacée aujourd’hui. Par ? Extractivisme néo-colonial ?

Je vous souhaite à tous, malgré tout ou peut-être grâce à tout !, une heureuse fin d’année 2022 !


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Notes

  • 1
    Tu ne feras pas à ton prochain ce que tu ne voudrais pas qu’il te fasse… ou plus positivement Tu le traiteras comme tu souhaiterais être traité)
  • 2
    Ici c’est moi, et non Gazza qui parle !
  • 3
    Si Boréal avait respecté les vœux de l’auteur vous auriez pu le lire in extenso grâce au travail des Classiques des sciences sociales. Seules l’intro et la table des matières sont accessibles…

Bois-de-Liesse à vélo en images

Parcours de 50 km dont une partie filmée, dans le Bois-de-Liesse et la vélo route sur une ancienne emprise de chemin de fer… C’était une journée (7 novembre) particulièrement venteuse (rafales à 65km) mais ensoleillée. Encore un exercice de production avec Final Cut Pro… 2 versions m4v (format Apple) pour plus de qualité et YouTube pour un accès plus rapide.

https://www.gillesenvrac.ca/video/Bois-de-Liesse-Montage-final.m4v

Une rencontre stimulante, très. Même en mode virtuel!

Les États généraux du développement des communautés, organisés par le Collectif des partenaires en développement des communautés ont eu lieu du 31 octobre au 4 novembre dernier.

Il ne pouvait pas en être autrement après tant de travail préparatoire. Pour en avoir une idée, consultez le Tour d’horizon qui fut magistralement synthétisé par Maria et Pierre-Elie de l’OVSS : plus de 40 milieux rencontrés. C’était ma première expérience avec la plateforme Gather Town et ce fut, somme toute, assez facile et distrayant, Même si cela ne m’a pas guéri, magiquement, de l’angoisse du premier contact avec des inconnus ou de ma maladresse en matière de small talk. J’aurais dû mieux tendre l’oreille en passant à proximité des petits groupes discutant sur la place publique… et m’inviter plus souvent dans la conversation !

Je ne tenterai pas ici de faire un résumé systématique des tous les ateliers et séminaires auxquels j’ai participé pendant les cinq jours. Plus modestement je souhaite partager mes « coups de cœur » et moments marquants de la semaine. 

La première journée fut consacrée à un retour sur le Tour d’horizon, dont la synthèse en 10  fiches allait aussi servir de base aux travaux de différents ateliers : dynamiques territorialeséquité territorialedifférents paliers – local – régional – nationalgouvernance intersectoriellegouvernance – leadership (I)gouvernance-leadership (II)transition socioécologiqueparticipation citoyenneimagination des possiblesressources humaines et roulement de personnel

Geneviève Giasson ouvrait la deuxième journée, en tant que directrice générale de la MRC du Val St-François. Une personne bien au fait des enjeux et réalités du développement des communautés car elle a été longtemps directrice de Communagir. J’ai eu l’impression que sa position de DG de MRC pesait sur son discours… comme si l’enthousiasme que je lui connaissais s’était un peu dilué ou était contraint par sa fonction. C’est une question que je poserais bien à un autre DG que j’ai connu alors qu’il était, lui aussi, membre du C.A. de Communagir : Gilles Gagnon, qui était à l’époque DG de St-Urbain et qui est maintenant DG de Baie St-Paul. Une position au cœur de l’action mais qui impose peut-être d’être moins visible et actif sur la place publique !? 

Le contraste était particulièrement évident lorsqu’on le compare au discours des élues de 3 municipalités… sur lequel je reviendrai plus loin. 

J’ai beaucoup apprécié le séminaire « Perspectives autochtones » où trois intervenantes nous ont entretenu des défis et de la réalité du développement des communautés autochtones. Premier constat : un (ou une ?) des panelistes n’a pu se joindre à la discussion car le réseau internet était « down » dans son coin de pays ! Le séminaire était animé par Imany Bégin-Paul, chargée de projet – Alliances et solidarités avec les Premiers Peuples du Front commun pour la transition énergétique, et sa sœur, Natanaël Bégin-Paul, directrice de Tshuapamitin. Kathryn St-Aubin s’est ajoutée au tandem spontanément pour partager sa connaissance du terrain. À un moment de la discussion Imany (ou était-ce Natanaël ?) nous a rappelé que les communautés locales autochtones sont l’équivalent des petites municipalités présentes sur tout le territoire : il faut gérer les besoins de base, et aussi les différends en matière de perspectives de développement économique. De petites municipalités qui incarnent ce que le terme intersectionnalité veut dire ! Ce fut un échange entre pairs sur les questions d’organisation communautaire et de développement local qui m’a donné le goût d’aller plus loin : ne serait-ce que visiter quelques-unes de ces communautés qui nous entourent… 

Le moment le plus fort de cette semaine fut, pour ma part, le séminaire offert par trois élues municipales, deux mairesses et une conseillère, exceptionnelles de sagesse et d’expérience. 

3 élues inspirantes !

« Il est souvent plus facile de changer de personne que de changer la personne » disait une des mairesses, soulignant ainsi l’avantage de notre système démocratique. On parlait ici de changer nos élu(e)s, mais aussi, comme le soulignait une des mairesses, il faut parfois changer de DG !

Les situations évoquées par les élues sont très différentes : petites municipalités avec 3 employés ou grandes villes avec des centaines ou des milliers d’employés. Mais la situation des petites municipalités (moins de 5000 habitants) est la plus commune : 83% des élus municipaux l’ont été dans de petites municipalités! Même si ces dernières ne représentent que 15% de la population du Québec. Le vécu de ces élus est fait de bénévolat et de travail à temps partiel, avec très peu de ressources, alors que les grandes villes ont vu leurs élus se professionnaliser. 

Mais c’est la même passion politique qui anime ces élues. « C’est la frustration qui m’a amenée en politique » disait Madeleine Lefebvre, conseillère à Maniwaki. Insatisfaite de voir ce qui se faisait, elle s’est engagée. Évelyne Beaudin, mairesse de Sherbrooke : « J’ai créé un parti (Sherbrooke citoyen) pour porter ces idées, cette vision ». Geneviève Dubois, mairesse de Nicolet complétait ce trio de femmes inspirantes. 

D’entrée de jeu, Madeleine Lefebvre((En plus d’être conseillère municipale de Maniwaki, Madeleine a réaliser une recherche auprès des élus de petites municipalités dans le cadre de ses études doctorales. Ce qui donnait un poids supplémentaire à ses affirmations.)) affirmait « Il faut faire plus et dépasser la consultation pour favoriser la participation citoyenne. Sur ce point, on fait très peu, et plutôt mal. » Sur le moment, même si je n’étais pas dans la salle (tout se passait sur mon écran) j’ai pu sentir l’opposition spontanée des deux mairesses ! Dans les petits milieux les élus ont parfois l’impression qu’ils connaissent tout le monde : « J’ai été à l’école avec eux ». Aussi ils sentent moins le besoin de rejoindre, consulter et écouter la population. Il faut que la population vienne au conseil municipal afin de montrer aux élus qu’ils ne connaissent pas tout le monde ! 

Geneviève Dubois, mairesse de Nicolet, souligne l’importance de l’exemplarité pour changer les choses : c’est en ayant une gestion transparente que des élus peuvent montrer à ceux qui n’y sont pas enclins que c’est possible et même profitable. Sa région a été frappée durement au cours de la dernière période par les inondations. La solidarité qui s’est manifestée dans le contexte fut éclairante : qu’on soit du secteur privé, public ou communautaire, « citoyens, patients et clients : ce sont les mêmes personnes ». La mairesse dit ne pas connaître suffisamment, ni être connue par, le « communautaire ». « On ne se connait pas. Les élus ne vous connaissent pas. Pour eux, vous êtes ceux à qui on donne une subvention une fois l’an. » Elle invite les réseaux communautaires à venir aux réunions du conseil municipal « pour nous dire ce que vous faites ». 

Il faut partager le pouvoir : quand les gens participent à la décision, ils deviennent des ambassadeurs de son application. Elle n’a pas d’inquiétude devant la parole ou l’engagement des citoyens. Prenant l’exemple d’une expérience de budget participatif : les suggestions faites par les citoyens sont plein de bon sens ! Mme Dubois souligne au passage la difficulté de gérer certains projets avec les petites municipalités rassemblées par la MRC : toutes les municipalités reçoivent le même montant, mais c’est la ville-centre qui épongera 33% de la facture ! 

La mairesse de Sherbrooke, Évelyne Beaudin, note que la professionnalisation des élus, qui peuvent maintenant se consacrer à temps plein à ce travail, a parfois comme conséquence de transformer les électeurs en consommateurs. Certains se disent « J’ai payé des taxes; tu es mon employée; tout ce que j’ai à faire c’est d’ouvrir la bouche ! ». Mais ce n’est pas toujours comme ça. Certaines communautés savent se mobiliser et produire des choses extraordinaires.

L’espace de marché public (ou communautaire) de Compton

Elle donne l’exemple du Marché de Compton, où un terrain fut offert par le groupe des Lyons, où de beaux kiosques furent construits collectivement… Elle souligne au passage qu’on ne peut pas seulement compter sur le dévouement et l’enthousiasme des employés de la ville ! Il faut maintenir l’action volontaire typique des petites villes. Pour cela elle compte sur les arrondissements qui rapprochent l’administration des citoyens. Mais aussi elle souhaite expérimenter un projet qui a déjà été mis en pratique en France (dans le 14e arrondissement de Paris) : l’hyper voisin. 

Cette mairesse est convaincante ! Et son idée d’expérimenter la formule d’hyper-voisins (que je préfère, quant à moi, au terme « ami du quartier » – l’ami de chez Jean-Coutu ?) me fait penser aux organisateurs et travailleurs communautaires des premiers CLSC. Il y avait une permanence, sur un assez petit territoire. Des citoyens de ces territoires ont parfois été embauchés comme travailleurs-travailleuses communautaires. Mais quel sera le niveau de qualification demandé ou offert à un tel hyper-voisin ? Et sera-t-il assez respecté par les divers départements et spécialistes de l’appareil municipal pour être vraiment utile et crédible ? Il faut définir, valoriser une relation de qualité, professionnelle avec la population. Éviter la création de dépendance et d’infantilisation ou pire, l’établissement d’un marché noir (ou gris) de la résolution de problèmes! Une relation éducative, apprenante, co-constructive d’un service public à l’écoute et réactif. Autrement dit ce n’est pas seulement la première ligne qu’il faut rapprocher du citoyen, c’est tout l’appareil qu’il faut assouplir… Ici, vous l’aurez compris, c’est moi qui parle.

Ce séminaire donné par des élues municipales passionnées et inspirantes s’est terminé sur des appels à la participation aux conseils (municipaux ou d’arrondissements), des appels au partage d’informations et d’agendas, des appels à VOTER pour choisir vos élu-e-s, car le taux de participation est toujours bas au niveau municipal. Des appels, finalement, à ce que les paliers supérieurs donnent aux municipalités des moyens à hauteur de leurs mandats, de leurs potentiels.

À la plénière de clôture, des appels à « travailler ensemble », à créer des espaces de dialogue, où vivre le paradoxe : apprendre la reconnaissance mutuelle tout en abandonnant les étiquettes. Il faut « décloisonner les espaces de concertation pour y faire de la place pour l’éducation, l’économie sociale, les réalités autochtones » et (c’est moi qui ajoute) pour ce grand éléphant dans la salle : les acteurs et partenaires économiques. 

Ma conclusion : le processus, le chemin parcouru pour arriver à ces États généraux a été plus important encore que l’événement, même si ce dernier fut un franc succès. Quand je me remémore la richesse des contenus extraits des rencontres Tour d’Horizon j’ai l’impression qu’on n’y trouvait pas aussi bien exprimées que pendant le colloque cette césure, ce contraste entre petites communautés et grandes villes et agglomérations; entre l’agir quasi-bénévole et l’engagement professionnel. Et la tension, la différence, comme le soulignait la mairesse de Sherbrooke, entre le développement social et le développement territorial. Je devrai relire les fiches synthèses pour vérifier. 

populistes et intellectuels

Pourquoi les populistes sont-ils si anti-intellectuels? Alors que durant les premières vagues du populisme (1890, 1930) les intellectuels étaient alliés ou parties prenantes du mouvement populiste (Le populisme, voilà l’ennemi !, Thomas Frank). Spontanément certains pourraient penser que c’est normal que les populistes s’opposent aux intellectuels puisque ces derniers semblent souvent mépriser les populistes qui seraient, par définition, incultes ou à tout le moins peu éduqués et facilement manipulables par des leaders retors et peu scrupuleux.  

Se faire traiter d’intellectuel est devenu une insulte, au Québec. Ou en tout cas, même les politiciens éduqués ne veulent surtout pas qu’on les prenne pour des intellectuels. Et ne parlons pas des politiciens populistes ! Ils sont passés maîtres dans l’art de titiller ou attaquer les intellectuels pour faire plaisir et mobiliser leurs troupes. Pas besoin d’aller jusqu’à Trump, notre Harper bien canadien s’amusait ferme alors que sa décision d’abolir le « questionnaire long » du recensement avait fait monter au créneau tous les intellectuels du pays. Mais c’est peut-être, finalement, ce qui a causé sa perte !

Les intellectuels étaient avec le peuple, quand il s’agissait de défendre le droit à l’éducation ou à des services de santé. Quand il s’agissait de définir les grands travaux à développer, dans l’intérêt public, pendant la crise des années ’30… ou encore durant la révolution tranquille. À la fin de ces trente années dites glorieuses (1945-1975), les Thatcher et Reagan surent profiter des défauts, lenteurs et de quelques monstruosités qui s’étaient produits pendant les décennies de développement très rapide des institutions d’éducation et de santé, mais aussi des industries de l’énergie, des communications, du transport… pour légitimer une réduction drastique des prélèvements fiscaux sur les grandes fortunes et les revenus élevés. Cela ne put se faire qu’en réduisant le pouvoir d’initiative des gouvernements pour le remettre, le laisser entre les mains des propriétaires et agents du « privé ». 

Comme par hasard, la fin de cette période social-démocrate ou progressiste d’après-guerre, période où l’intérêt public et l’accès aux services publics pouvaient encore constituer le cœur d’un programme politique, cette période prend fin alors que l’impact négatif et insoutenable de ce développement très rapide (de l’industrie et de la population) devient évident[1] et aurait demandé une prise en compte accrue de l’intérêt public. Mais c’est plutôt à l’amorce d’une longue période de domination de l’intérêt privé, de laisser-faire et de retrait de l’initiative publique que nous assistons. Le rôle de l’État n’était plus que de soutenir la libéralisation des échanges, qui amenait une pacification des relations internationales en même temps qu’un développement économique des pays « pauvres ». 

Les intellectuels d’aujourd’hui sont le produit des gains socio-démocrates des années d’après-guerre. Formés dans les cégeps et universités, mais aussi sur le tas, dans les labos et les usines, les studios et les bureaux. Piketty, dans Capital et idéologie, a suivi l’évolution du soutien électoral accordé aux partis socio-démocrates, qui passe de la classe ouvrière à celle des « éduqués ». Des éduqués parmi lesquels l’auteur identifie deux camps : la droite marchande et la gauche brahmane. Deux camps qui se partagent et se disputent la gestion de l’appareil gouvernemental. Les éduqués ayant profité de l’accès plus démocratique à l’éducation supérieure gagné par la classe ouvrière dans la période de l’après-guerre et la révolution tranquille au Québec, se sont créé de belles niches dans les appareils, organisations et institutions. Ils ont fait le pari du libre-échange… puis de la financiarisation de l’économie. Ce n’est pas que les éduqués ou les intellectuels avaient vraiment le choix, ou le pouvoir de décider. Ceux qui décidaient n’étaient pas obligatoirement éduqués, ni nécessairement intellectuels. Certains étaient seulement riches. 

Les intellectuels ont-ils trahi la classe ouvrière et le peuple ? C’est ce que défendait déjà en 1995 Christopher Lasch dans La révolte des élites et la trahison de la démocratie.  Mais c’est beaucoup demander à une seule génération d’intellectuels d’inventer une nouvelle culture démocratique tout en préservant le meilleur de la culture élitiste d’antan. Aussi les intellectuels ont-ils sans doute simplement été… achetés. Ils ont suivi leurs intérêts immédiats personnels (ou corporatistes-professionnels) sans se préoccuper de l’intérêt public. Pourquoi auraient-ils à s’en préoccuper plus que les autres ? Mais parce que c’est leur rôle de réfléchir, de connaître, de prévoir. D’imaginer, de dire, de prédire. Ici il faudrait faire des distinctions entre intellectuels, éduqués, élites, dirigeants, décideurs, gestionnaires… Mais tous (ou presque) ont été subjugués par le néolibéralisme et ses richesses, sa facilité, ses libertés (Populisme et néo-libéralisme. Il est urgent de tout repenser, de David Cayla). Les limites qui commençaient à se manifester dans le champ des possibles n’étaient que des défis à relever, des opportunités d’affaires. 

Les intellectuels d’aujourd’hui ont été formés par les intellectuels d’hier. Mais ils se sont aussi formés dans leur opposition aux dogmes et croyances d’hier. Ils poursuivent avec passion la construction d’édifices et de théories qu’ils partagent dans des chapelles et colloques. Persuadés qu’ils sont de contribuer à façonner, orienter l’action des humains dans le monde. Oui la science, la technologie, l’art sont des champs où excellent les intellectuels. Mais la vérité, la beauté ne sont pas encore les valeurs dominantes. La propriété, le pouvoir, l’autorité ont préséance. Les sciences, les technologies, les arts se sont développés trop souvent en réduisant les autres à un rôle passif de public, de consommateurs, de profanes qui doivent se fier aux experts et aux professionnels.

La logique de l’expertise s’oppose trop souvent aux savoirs tacites, intuitifs et non-verbaux. Les intellectuels de demain, moins verbomoteurs et plus à l’écoute, reconnaîtront la primauté de l’intuition sur la raison, et l’importance de la discussion, de l’opposition des idées et arguments pour faire émerger l’intelligence d’une situation. (L’énigme de la raison, H. Mercier)

Mais pour cela il faut que les parties se respectent suffisamment pour s’écouter. 

Pourquoi les populistes sont-ils de droite ?

Même si on a pu voir quelques exemples d’une stratégie populiste de gauche (Espagne, Grèce) théorisée par Chantal Mouffe (Pour un populisme de gauche) la plupart des leaders populistes sont de droite, de Le Pen à Trump, à Duhaime et Poilièvre ou Orban (Hongrie) et Erdogan (Turquie). Pourquoi cela ?

Peut-être parce qu’il est plus difficile de mobiliser le peuple tout en construisant la démocratie (principe essentiel du populisme de gauche, selon Mouffe) plutôt qu’en la démolissant (Entre populisme et élite, le populisme de droite, par Frédérick Guillaume Dufour); plus facile de flatter les préjugés que de les corriger… 

Justement, parlant de corriger les préjugés, d’éduquer le « peuple » dans le respect des différences, des identités, des subtilités et susceptibilités… il est facile de tomber dans le mépris et la bienséance. 

« [T]ous les mouvements populistes authentiques ont visé à rassembler les travailleurs par-delà les barrières de race, de religion et d’ethnicité. (…) C’est l’un des objectifs traditionnels des mouvements de gauche depuis le 19e siècle. Mais ça n’intéresse pas particulièrement les prophètes de l’opprobre qui composent la gauche moderne. »

Thomas Frank, Le populisme, voilà l’ennemi ! p. 308) 

« Une politique sans joie, une politique de la réprimande c’est là tout ce que ce centrisme nous a laissé : une politique de la vertu individuelle qui ne considère pas les gens comme une force à mobiliser mais comme une menace à blâmer et à discipliner. »

idem, p. 328

C’est parce que la gauche s’est repliée sur elle-même que la droite a pu prendre le devant de la scène. Scène qui s’adresse au peuple plutôt qu’à la chapelle. 

Lorsque l’extrême-gauche s’est sabordée, au début des années ’80, alors qu’il aurait fallu accentuer la critique du néolibéralisme qui triomphait aveuglément, c’était pour mieux plonger, participer aux luttes des nouveaux mouvements sociaux (femmes, jeunes, autochtones, écologie, nouveaux médias…) que la « classe ouvrière » avait bien de la peine à suivre, alors qu’elle aurait dû les diriger ! En tout cas c’est le sens que les militants d’En Lutte, dont j’étais, ont donné à la dissolution de leur organisation politique. 

On peut dire que nous avons réussi : nos énergies ont été investies dans la création de réseaux, d’organisations populaires, professionnelles ou civiques, dans la poursuite de réformes utiles et novatrices. Mais la réunion de toutes ces forces dispersées, que nous imaginions pouvoir réaliser « au besoin », ne s’est jamais vraiment produite. Au contraire, les intérêts des uns semblent s’éloigner toujours plus des autres, les différences se multiplier, s’accroître. Si des rassemblements larges ont pu parfois se créer, c’était ponctuel : manif contre tel traité de libéralisation des échanges (et de réduction de la souveraineté des États); journée pour la Terre… 

La construction d’une alliance des forces populaires n’est pas l’affaire d’une négociation autour d’une déclaration ou d’une manifestation. Il faut négocier des équivalences entre les valeurs et désirs portés par différentes fractions populaires. C’est la négociation de ces « chaines d’équivalences » (Mouffe) qui permet de « construire le peuple », le peuple des opposants à l’oligarchie des pouvoirs oppressifs. 

Pour pouvoir tricoter ces « chaines d’équivalences » les uns doivent descendre de leur piédestal, d’autres doivent oser s’affirmer, s’exprimer, s’engager. Quand les intellos, ces hommes et femmes de tête, auront compris que la raison n’est qu’une justification, après coup, de l’intuition, ils porteront plus d’attention à ce savoir tacite, cette intelligence du corps et du cœur, qui ne s’exprime pas toujours par des mots. Cela devrait faciliter l’expression, même maladroite et peu assurée, des porteurs de sens et de rêves qui ont peu de mots mais beaucoup de vécu. 

Après 40 ans de développement néolibéral débridé, où le succès à court terme et le retour maximal aux investisseurs dictaient la loi, il faut revenir à plus de prudence et de planification. Au-delà de la planification, c’est la capacité d’agir dans l’économie qui doit être regagnée par les États. Le New Deal ou la course à la lune aux États-Unis, ou encore la révolution tranquille au Québec sont de bons exemples de cette capacité à regagner. Elle ne se fera pas sans que certains aient l’audace d’imaginer un autre monde.


Oui, bon. Mais demain, pour qui je vote ? Pour celle ou celui qui sera plus à même de rassembler les forces démocratiques (sociales, économiques, culturelles) dans une aventure historique déterminante : le  business as usual  n’est plus possible. 


[1] Si j’avais été « cheikh » du pétrole en 1972, au moment de la publication de Limits to growth, alors que l’essence se vendait 10 cents le gallon, je me serais empressé de pousser le prix du pétrole au maximum, en présumant que mes clients s’affaireraient bientôt à réduire drastiquement leur consommation de ce produit nocif. 

Montréal, ouest de l’île, à vélo

Rampe circulaire d’accès au pont vers l’île Perrot

À défaut de faire, comme je l’avais d’abord prévu, c’est-à-dire un voyage en vélo dans les Cantons de l’Est, nous avons décidé de faire l’Ouest de l’île en deux jours. J’ai trouvé un motel sur l’île Perrot, annoncé à 80$ la nuit : le Motel Montréal. Sans y regarder de plus près, nous sommes partis. Ma seule crainte, à l’époque, c’était le pont vers l’île Perrot : y avait-il une piste cyclable ? Un coup d’œil au Street View de Google Maps m’aurait permis de voir qu’il y en avait un! Avec un bel accès en tire-bouchon !

Un survol illustré et commenté du chemin parcouru depuis Hochelaga, jusqu’à Cap-St-Jacques, puis Sainte-Anne-de-Bellevue, et le lendemain par la rive côté sud jusqu’au Vieux Montréal (21 minutes de vidéo). Ce fut aussi une première appropriation de l’outil de montage vidéo Final Cut Pro. De là le 21 minutes… C’est + long et + compliqué de faire court…

Partant d’Hochelaga, une quarantaine de kilomètres vers l’ouest, suivant la piste Rachel, jusqu’à Molson pour aller prendre Des Carrières puis le REV St-Denis jusqu’à Gouin pour longer ensuite (autant que possible) la rivière Des Prairies jusqu’au Parc-nature du Cap-St-Jacques. 

Plutôt que de tourner directement sur Gouin, on devrait passer par le parc Jeanne-Sauvé, coin nord-est de l’intersection, ce qui permettrait d’éviter une partie qui n’est pas très agréable… tout en passant par un parc. Mais le retour sur Gouin nous ramène sur une portion où la piste cyclable (à deux sens) est carrément sur le trottoir, à peine plus large que la normale. C’est un des pires aménagements rencontrés. Je préfère le plus souvent rouler dans la rue plutôt que de risquer la rencontre de cyclistes et de piétons en même temps. 

Je me rends régulièrement au Carrefour Providence, où loge mon amie Sœur Annette. Un rendez-vous que nous avons eu en mode vidéo pendant deux ans… et que je me plais à faire maintenant à bicyclette, plutôt qu’en autobus comme avant. Ça me prend le même temps : une heure. 18 kilomètres. Avec le vélo électrique, c’est juste un bon exercice, été comme hiver. 

C’est fou comme on voit « étroit »… comme notre regard est linéaire. Je ne m’étais jamais rendu compte de la proximité de l’hôpital du Sacré-Cœur puisque en passant par O’Brien puis Salaberry, je ne passais jamais devant l’hôpital Sacré-Cœur. Un regard « de haut »  permet d’identifier plusieurs des communautés religieuses qui habitent sur ces terrains adjacents au sud et à l’ouest de l’hôpital. Un coup d’œil à l’histoire de l’hôpital permet de confirmer que les Sœurs de la Providence ont été « en charge » de l’établissement dès 1899, soit un an après sa création. 

Finalement, se rendre jusqu’à Cap St-Jacques nous aura pris plus de trois heures plutôt que les 2 heures 13 prévues par Google Maps. On voulait se rendre au Cap pour dîner… On aurait peut-être dû s’arrêter au Bois de Saraguay ou au Bois-de-Liesse : il y a de belles places que nous avons déjà visité auparavant. Si c’était à refaire je ne chercherais pas à longer la Rivière-des-Prairies, que nous avons pu admirer à quelques reprises mais assez rarement, somme toute. Au sortir du Bois-de-Liesse, côté ouest, une route cyclable en site propre nous aurait conduit jusqu’au Chemin de l’Anse à l’Orme. 

Du Cap à Ste-Anne-de-Bellevue 

La route est partagée (pas de piste cyclable séparée) sur le chemin Senneville, tout comme à Sainte-Anne-de-Bellevue et Baie-d’Urfé. Ça ne pose pas de problème dans la mesure où le trafic y est relativement léger et lent (30 km/h la plupart du temps). Les « demi-pistes » cyclables peintes sur la voie, dans Beaconsfield, sont franchement trop étroites… c’est pire que de simplement partager la route. Est-ce parce que Beaconsfield veut maintenir la vitesse à 50 km ? 

Au sortir du parc Cap St-Jacques, nous sommes tombés sur une vieille grange… que j’ai baptisé la Joconde échevelée. Un chemin champêtre dans sa première partie. La municipalité de Senneville comptait moins de mille habitants pour une superficie de 7,5 km2. On y trouve sans doute les plus grands domaines privés de l’île de Montréal. Ce qui se reflète sur la valeur foncière moyenne de cette municipalité (voir tableau plus bas).

Arrivés à Sainte-Anne-de-Bellevue, nous nous arrêtons pour une collation-dessin-photo à une table près de l’écluse. Les belles portes de l’église catholique, la mécanique de l’écluse… Et je vois la rampe circulaire (en tire-bouchon) pour accéder au pont vers l’île Perrot, où nous irons dormir ce soir. Il est bientôt l’heure de l’apéro que nous voudrions bien prendre au bord de l’eau. En suivant la rue du même nom nous décidons d’arrêter à un resto-bar, Annies sur le lac qui a sa terrasse… sur le lac. De la bière fraîche et des fruits de mer nous satisferont amplement. Il n’est pas très tard que nous reprenons les bicyclettes pour aller voir de quoi a l’air le Motel Montréal. 

Pour 94$ nous avons eu deux lits propres, des fenêtres qui ne s’ouvrent pas, une salle de bain avec des serviettes propres. C’est tout ce qu’il nous fallait. Un Dairy Queen pas loin, pour le dessert en face du Pete’s BBQ où s’étaient donné rendez-vous une centaine de motards… Ça complète le portrait! Une déception: j’avais oublié le chargeur pour mon téléphone. J’en avais bien emporté plusieurs : les deux pour les bicyclettes , celui pour l’appareil photo… mais pas celui du téléphone.

Deuxième journée

Ce smartphone nous aurait été bien utile le lendemain matin alors qu’on cherchait un endroit où déjeuner ! Mais il n’était pas 6 heures quand nous avons quitté l’île Perrot. Le Soleil était encore bas lorsque nous sommes passés devant une des marinas de Baie d’Urfée. Le téléphone nous a aussi manqué quand la piste cyclable marquée sur le pavé nous a tout à coup orienté vers le nord juste avant d’arriver au Village Pointe-Claire… alors qu’on voulait suivre le bord de l’eau. D’ailleurs je n’ai toujours pas compris pourquoi le trajet proposé par Google Map suggérait de quitter le chemin du Bord-de-l’eau / Lakeshore [ à moins que ce ne soit le Boul Beaconsfield] en arrivant à Pointe-Claire, pour nous faire passer (deux fois) pardessus l’autoroute 20… Probablement parce qu’une piste cyclable y a été aménagée pour relier les 3 stations du train de banlieue. Après un moment de confusion, nous sommes revenus vers le chemin du Bord-de-l’eau qui, dans la municipalité de Pointe-Claire était bien joli… [photo GE de maison Village, carte GM avec détour vers la 20]u

Nous avions déjà fait 10 km depuis l’île Perrot. À l’heure qu’il était (5:55) le McDonald de la rue St-Charles à Beaconsfield nous est apparu la meilleure option.  Après dix minutes d’attente on nous informe que, par manque de personnel, la salle n’ouvrirait que dans une heure… Nous roulons de nouveau vers l’est, espérant trouver quelque chose d’ouvert même s’il n’est pas encore 8 heures. Le village Pointe-Claire était charmant même ses boutiques fermées… Nous sommes rendus dans la ville de Dorval quand j’aperçois une femme marchant avec un verre de café de chez Tim Horton. Je lui demande où se trouve le Tim Horton le plus proche… et c’est là, sur ce boulevard près de la rampe d’accès à l’autoroute que nous avons pris un café et un beigne, debout devant le stationnement. Autant pour le côté champêtre de l’ouest de l’île ! 

Dans Dorval, puis Lachine, plusieurs portions de la piste étaient en sites propres… jusqu’à joindre le parc René-Lévesque puis le canal Lachine qui nous mènera, 13 km plus loin, au Vieux Montréal. Le Première Moisson du Marché Atwater nous a enfin servi un bon café. Puis nous sommes rentrés chez nous, sans s’arrêter dans le Vieux… Il était trop tôt pour dîner et on n’était pas dans le mood

En fait on pourrait dire qu’on a un peu perdu notre deuxième journée. À courir après le petit déjeuner, nous avons raté plusieurs “attractions” qui mériteraient certainement qu’on retourne dans ce coin, notamment l’Arboretum, l’Ecomuseum, le musée de l’aviation (peut-être) ou encore le campus du collège Abbott… En utilisant le train de banlieue jusqu’à Pointe-Claire ou Baie d’Urfée…

Les petites municipalités indépendantes de l’Ouest de l’Île de Montréal sont riches. Moins de 1000 personnes habitent Senneville.

Des différences importantes (encore inexpliquées) entre les superficies des municipalités telles que listées par la Communauté métropolitaine de Montréal ou pour le premier tableau par la Ville de Montréal.

servitude, béton et religion

lectures récentes

La fabrique de nos servitudes de Roland Gori. Un auteur que je ne connaissais pas mais qui m’a été chaudement recommandé par Olivier, de chez Gallimard. Et comme Olivier me connait mieux que tous les algorithmes d’Amazon, je lui fais confiance et je suis rarement déçu.

Nous codons le monde jusqu’à en perdre le corps. Nous mangeons des algorithmes. Ce livre est une invitation à en finir avec les fabriques de servitude en cherchant par tous les moyens de création à transgresser les assignations à résidence identitaires que favorisent les sociétés d’informations. (…) Les murs algorithmiques des sociétés de contrôle tomberont plus difficilement que le mur de Berlin. (…) Nous avons une identité d’êtres humains moins définie par un caractère « national », « racial » ou de « genre » que par notre appartenance au monde du vivant. Nous appartenons au vivant dont nous ne sommes que l’un des modes d’expression et que notre illusion narcissique nous empêche de reconnaître comme tel. (…) Nous ne nous sommes pas échappés de l’animisme comme la superbe occidentale le croit, nous l’avons transféré aux objets techniques, non sans efficacité.

La fabrique de nos servitudes, R. Gori. Pp 21, 127 et 226-227.

Si je ne retenais qu’une chose de ce texte touffu c’est son appel à la créolisation des cultures, du monde. Qui me fait connaître Patrick Chamoiseau (Texaco, prix Goncourt 1992) et Achille Mbembe (Critique de la raison nègre). Aussi tiré de la foisonnante bibliographie citée par Gori : Béton, arme de construction massive du capitalisme, de Anselm Jappe; Relions-nous, La constitution des liens – L’an 1; et L’archipel français, Naissance d’une nation multiple et divisée de Jérôme Fourquet.

Gori est un philosophe qui a une formation de psychanalyste (à moins que ce soit l’inverse ?). Si les références à Deleuze, Lacan, Foucault ou Debord ne vous font pas peur… Mais ce sont les auteurs antillais (Glissant, Chamoiseau, Mbembe) cités qui me convainquent de cette perspective de la « créolisation », critique s’il en est du « wokisme » et des identitaires en mal de pureté.

Je me suis plongé ensuite dans Béton, arme de construction massive du capitalisme. L’auteur (Jappe) y fait l’histoire du béton, en particulier de sa version moderne, le béton armé. Son impact sur l’architecture et les techniques traditionnelles de construction. L’impact écologique en émission de GES (chaque tonne de béton coûte une tonne de CO2) mais aussi en consommation de sable. Une « mafia du sable » s’est développée en Inde… Mais j’ai été déçu de ne pas trouver l’analyse que je cherchais (et cherche encore) de l’importance financière et matérielle que constituent les tours d’habitation qui pullulent dans les centres urbains : comme si c’était le nec plus ultra de l’urbanisme, de l’habiter en ville ! Quand on voit, littéralement, sortir de terre en quelques années des quartiers tel Griffintown à Montréal, on est en droit de se demander jusqu’où ce « cancer » va s’étendre aux autres quartiers ? Est-ce vraiment le meilleur moyen de « densifier » nos villes ? Ou si ce n’est pas plutôt un moyen de faire du fric, un investissement payant et une version quasi liquide de l’immobilier (Louis Gaudreau, Le promoteur, la banque et le rentier). Un revenu important pour la Ville aussi. Donc, je cherche encore cette analyse du poids (financier, environnemental, culturel) des tours…

Pour m’aérer un peu l’esprit, j’ai ensuite lu cette autre référence de Gori, plus divertissante : L’anomalie, de Hervé Le Tellier. Le prix Goncourt 2020. Mérité, à mon avis bien humble car je ne me précipite pas en général pour lire les prix littéraires.

Je suis revenu ensuite à Relions-nous, que j’avais juste feuilleté. Un assemblage plutôt insipide (en ordre alphabétique des titres ! de Agriculture à Utopie) de quelques dizaines de très courts articles autour du terme : créer ou refaire des liens. Trente-huit textes de 2 à 4 pages, suivis de quelques propositions concrètes, parfois sous forme d’articles à adopter dans cette nouvelle « Constitution des liens, L’an 1 » annoncée en sous-titre de l’ouvrage collectif. Parmi les quelques 50 auteurs j’en reconnais une dizaine (Giraud, Citton, Méda, Damasio, Viveret, Morizot, Darleux, Servigne, Blondiaux). Malgré ces limites, ou peut-être grâce à elles, beaucoup des propositions avancées sont à la fois simples et audacieuses. Plusieurs touchent à cette obligation de plus en plus évidente : nous devons partager cette planète avec les autres vivants qui l’habitent. Par exemple : « Par des sorties en nature hebdomadaires les élèves apprennent à identifier 26 essences d’arbres et d’arbustes… ». Ou encore « Tout habitant de la ville devra être responsable d’au moins un arbre ». Ou cette injonction visant à rendre paritaires (actionnaires et employés) les conseils d’administration des entreprises et à limiter à un maximum de douze fois le SMIC le salaire des dirigeants. Ou ces propositions concernant les médias visant à considérer « les attentions individuelles et collectives » comme des biens communs dont la protection doit être assurée au même titre que la protection de l’air et de l’eau. À cette fin le financement des médias locaux devra être assuré grâce à une répartition des revenus actuellement appropriés par les grands medias et par de fortes taxes sur la publicité.

Peut-être l’article qui m’a le plus déçu de l’ensemble : celui sur la religion qui se limite à réaffirmer l’importance de la laïcité de l’État. Mais, bon, c’est peut-être beaucoup demander de faire plus que cela en 2-3 pages. Je me suis donc consolé, ou rassasié, avec ce livre-somme de Jurgen Habermas : Une histoire de la philosophie — La constellation occidentale de la foi et du savoir. Quelques 850 pages par cet érudit philosophe pour étancher ma soif de comprendre. Même s’il se concentre principalement sur l’évolution en Occident, son chapitre comparant les religions de la « période axiale » (bouddhisme, taoïsme, judaïsme) et la philosophie grecque était éclairant. Augustin et Platon; Thomas d’Aquin et Aristote; l’émergence d’un nouveau paradigme avec Duns Scot et Guillaume d’Ockham. Ce premier volume se termine sur Machiavel dont il me fait découvrir un texte qui, d’après Habermas, est plus important encore que le fameux « Prince » : Discours sur la première décade de Tite-Live.

Je ne prétendrai pas vous résumer ce tour d’horizon magistral réalisé par ce brillant philosophe nonagénaire ! Le plan du volume II est annoncé à la fin du premier volume : « Liberté rationnelle. Traces des discours sur la foi et le savoir« . Il complétera ce parcours : de Luther à Hume, puis à Kant; Hegel, Feuerbach, Marx, Kierkegaard, Peirce. Ça promet !

Et comme j’avais sous la main une copie, jaunie par les quelques 33 ans écoulés depuis sa parution, trouvée chez un bouquiniste il y a quelques mois, de Une théologie pour le 3e millénaire par Hans Küng, j’en ai lu les quelques quarante pages de conclusion : L’unique vraie religion existe-t-elle ? Essai de critériologie oecuménique 1j’ai produit un pdf « maison » de cette conclusion. Après le point de vue agnostique et historique de Habermas, qui sied à un philosophe, Küng amène un point de vue de l’intérieur2« On ne saurait saisir une religion dans ce qu’elle a de plus profond tant que l’on n’y adhère pas de l’intérieur, avec tout le sérieux existentiel qu’elle appelle » p. 345, en tant que théologien. Un point de vue contemporain, pour qui le dialogue entre les religions est une question urgente, immédiate, même 35 ans après la parution de l’original en allemand. Küng est peut-être le théologien qui a pris le plus au sérieux la nécessité du dialogue entre les religions : il a étudié, publié sur le judaïsme, l’Islam, la « religion chinoise »… en plus de ses écrits sur l’Église et la chrétienté. Ce qui lui permet d’aborder la question avec respect et perspicacité. Enfin, je crois.

Mais pourquoi donc revenir, encore, à cette question de la religion, alors que tant d’autres frappent et se pressent à la conscience ? Peut-être parce que j’ai l’impression que mes contemporains, occupés qu’ils sont à bien verrouiller la religion dans le champ du privé afin de garantir la laïcité de l’État, oublient facilement à quel point elle est au coeur de la culture sinon au centre de l’État pour la plus grande partie de l’humanité. Et si les enjeux globaux exigent une mobilisation globale, nous devrons trouver un langage commun, autour de valeurs qui transcendent les différends religieux. Une nouvelle éthique du vivant : « Nous appartenons au vivant dont nous ne sommes que l’un des modes d’expression » (R. Gori, op. cit. p.226).

Notes

  • 1
    j’ai produit un pdf « maison » de cette conclusion
  • 2
    « On ne saurait saisir une religion dans ce qu’elle a de plus profond tant que l’on n’y adhère pas de l’intérieur, avec tout le sérieux existentiel qu’elle appelle » p. 345

travail social et utopies

Social Work Futures

Je découvre Social Work Futures de Laura Burney Nissen par le numéro 219 du bulletin Sentiers de Patrick Tanguay. Ce dernier pointait vers un billet de Burney Nissen intitulé 10 Things — Dispatches from the Future, qui nous présente plusieurs textes qui valent le détour :

  • Social work in the face of collapse, tiré de la revue Critical and Radical Social Work;
    • Pour faire face aux défis qui viennent, le travail social devra suivre les enseignements tirés de l’approche de développement communautaire. « [T]o be of assistance in the future, social work will need what the ethos of community development offers more than ever if it intends to remain committed to socially just practice (…) this article discusses some bleak likelihoods that are painful to consider. However, this is an article about hope: not hope that we can avert future environmental and societal catastrophe; but instead hope that as communities face the coming predicaments, they will rediscover collective solidarity and wiser ways of living together and with the planet. Social work, particularly when it draws on community development perspectives, can have a key role in this transition to sanity. »
  • Social collapse and climate breakdown, de la revue The Ecologist. Un texte de 2019 mais qui fait une bonne synthèse des conséquences sociales de la crise climatique,
  • We’re not yet ready for what’s already happened. La société est déjà engagée dans des processus qui impliqueront de profondes discontinuités. Même si nous pouvions, par miracle, résoudre le « problème » climatique. »We are surrounded by ubiquitous mismatches between the value of systems, enterprises and places given their suitability to the world we now live in, and the way those things are priced by markets. We are surrounded, in short, by bubbles.  » Mais ces discontinuités peuvent être vues comme des opportunités : possibilités de prises de conscience radicales et de changements rapides.

Les articles suivants mettent en valeur l’importance de l’imagination, de la formulation d’utopies, de visions de l’avenir sans lesquelles il est impossible de mobiliser.

Retour de la planification

Ce même numéro de Sentiers commençait en citant longuement The Whole Field, de Max Krahé. un texte intéressant par son rappel précis des conditions de réalisation des efforts de planification qui ont marqué la période d’après-guerre en Europe et en France. Après coup, je note que cet article est d’abord paru en français (!) dans la revue Grand Continent sous le titre Un État pour la planification écologique. Tant mieux pour vous qui n’aurez pas à vous taper la version anglaise !

On ne parle plus vraiment de travail social mais pour imaginer des futurs possibles, en s’inspirant d’une période qui fut, elle aussi, marquée par les grands défis à relever… ce texte me semble inspirant.

une voie cyclable à l’abri des autos

En utilisant Google Earth pour y insérer quelques photos-repères déposés sur le trajet des voies ferrées le long d’un parcours de 20 km. Un rêve, un projet amorcé il y a 22 ans… Pour plus de détails, voir suivant la voie ferrée, prise 2.

Avant de repartir faire des photos, pour mettre à jour celles de juillet-août 2000, je dois porter attention, plus qu’il y a 20 ans, à l’impact recherché : faire avancer le « dossier », l’idée d’une voie cyclable tout du long de la voie ferrée identifiée, celle qui sépare et relie tous les vieux quartiers centraux de Montréal.

J’ai aussi assemblé quelques sources autour du thème « rails-with-trails » (à distinguer des « rails-to-trails » qui parlent des voies ferrées désaffectées transformées en pistes). Voir rails et vélos.

autonomie et santé

Je poursuis ma réflexion sur la « refonte » ou « refondation » du réseau de la santé… j’ai ajouté quelques références d’intérêt sur la page dédiée Réflexion sur la refonte, dont une lecture ((Reinventing Organizations — Vers des communautés de travail inspirées)) qui m’a fait découvrir un réseau néerlandais de services à domicile (le lien conduit à la note particulière sur la page « Réflexion ») : Buurtzorg .

De petites équipes (12 max) d’infirmières à domicile dans un quartier, fonctionnant de manière autonome, auto-administrée, sans hiérarchie. C’est possible et ça marche depuis 2006 en Hollande, où l’organisation Buurtzorg a en quelques années crû pour devenir le principal mode de livraison de  services infirmier à domicile. La formule s’est développée pour s’appliquer aussi en matière de services en santé mentale, et de services aux jeunes.

Le livre de Frédéric Laloux (Reinventing Organizations : Vers des communautés de travail inspirées) décrit l’entreprise Buurtzorg, parmi d’autres semblables. Je repensais aux débuts des CLSC, où des équipes particulièrement autonomes étaient amenées à inventer chaque jour des solutions nouvelles. Sans doute que le fait d’avoir une seule profession (groupe d’infirmières) facilite l’action de l’initiative hollandaise, de même que le mode de financement a aussi favorisé la croissance rapide de la formule. Voir page de sources Réflexion sur la refonte.

L’exemple hollandais est intéressant, alors qu’on souhaite repenser la formule des services aux aînés après plusieurs décennies de développement assujetti aux besoins des hôpitaux (virage ambulatoire, hospitalisations d’un jour…). Il est intéressant parce qu’il génère plus de résultats (autonomie restaurée) pour la clientèle, mais aussi pour le personnel (enthousiasme et stabilité du personnel) à un coût comparativement avantageux.

Les équipes de services à domicile des premiers CLSC pouvaient ressembler à ces équipes Buurtzorg en ce qu’elles étaient petites, étaient dirigées par des leaders qui accompagnaient plutôt que dirigeaient des groupes de professionnelles dévouées et inventives dans un cadre qui laissait beaucoup d’autonomie à ces dernières. Qu’est-ce qui a empêché que cette approche se perpétue et se réplique à l’échelle du réseau des CLSC ? Ce qui a conduit à l’intégration des CLSC dans des ensembles de plus en plus gros, de plus en plus soumis à la logique hospitalière et comptable développée pour servir des pratiques médicales rémunérées à l’acte.

En implantant le « virage ambulatoire » et les chirurgies d’un jour dans les hôpitaux (1993), pour réduire (ou contenir) les couts moyens en accélérant la cadence. Permettant ainsi de réduire les listes d’attente et augmenter l’accessibilité de certains services médicaux. Cette réorganisation médico-hospitalière a eu un impact immédiat sur les services à domicile des CLSC. Le travail des infirmières est devenu beaucoup plus mesurable et divisible en gestes comptabilisables en minutes de soins. La clientèle n’était plus la même. Ou plutôt si, c’était la même mais on attendait qu’elle passe par l’urgence de l’hôpital ou sous le bistouri du chirurgien avant de la « prendre en charge ».

Même si plusieurs institutions on tenté de maintenir des équipes affectées au « maintien à domicile » distinctes des équipes de soins post-hospitaliers, les mesures budgétaires et comptables visant l’optimisation ont induit, imposé un style d’administration et de contrôle peu compatible avec l’autonomie professionnelle et la qualité du lien clientèle des premiers services de maintien à domicile qui étaient axés sur le dépistage des clientèles fragiles et le maintien, le développement de leur autonomie.

Pour une critique inspirée de l’idéologie de l’optimisation

Pour une critique inspirée de l’idéologie de l’optimisation, et la promotion d’une sous-optimalité choisie…  voir La Troisième Voie du vivant.


L’expérience CLSC que le Québec s’est payé pendant une trentaine d’années a-t-elle été un échec, comme l’affirmait sans vergogne le ministre Barrette, pour justifier sa centralisation du système autour des médecins spécialistes ?

Ce fut certainement un échec en regard des prétentions de départ voulant en faire “la porte d’entrée du système”. Mais les CLSC furent à l’origine (ou partenaires) de beaucoup des initiatives communautaires, civiles, et préventives qui enrichissent la société québécoise actuellement. L’expérience des CLSC en matière de services de soutien à l’autonomie des personnes frêles a été riche, très riche à une époque, mais elle a été grandement dilapidée par le virage ambulatoire. Peut-on récupérer une partie de cette expertise pour contribuer à la relance d’un véritable service de soutien à l’autonomie ? Je commence à voir l’intérêt d’une séparation du financement d’un tel service de celui des hôpitaux et médecins spécialistes.