Montréal, ouest de l’île, à vélo

Rampe circulaire d’accès au pont vers l’île Perrot

À défaut de faire, comme je l’avais d’abord prévu, c’est-à-dire un voyage en vélo dans les Cantons de l’Est, nous avons décidé de faire l’Ouest de l’île en deux jours. J’ai trouvé un motel sur l’île Perrot, annoncé à 80$ la nuit : le Motel Montréal. Sans y regarder de plus près, nous sommes partis. Ma seule crainte, à l’époque, c’était le pont vers l’île Perrot : y avait-il une piste cyclable ? Un coup d’œil au Street View de Google Maps m’aurait permis de voir qu’il y en avait un! Avec un bel accès en tire-bouchon !

Un survol illustré et commenté du chemin parcouru depuis Hochelaga, jusqu’à Cap-St-Jacques, puis Sainte-Anne-de-Bellevue, et le lendemain par la rive côté sud jusqu’au Vieux Montréal (21 minutes de vidéo). Ce fut aussi une première appropriation de l’outil de montage vidéo Final Cut Pro. De là le 21 minutes… C’est + long et + compliqué de faire court…

Partant d’Hochelaga, une quarantaine de kilomètres vers l’ouest, suivant la piste Rachel, jusqu’à Molson pour aller prendre Des Carrières puis le REV St-Denis jusqu’à Gouin pour longer ensuite (autant que possible) la rivière Des Prairies jusqu’au Parc-nature du Cap-St-Jacques. 

Plutôt que de tourner directement sur Gouin, on devrait passer par le parc Jeanne-Sauvé, coin nord-est de l’intersection, ce qui permettrait d’éviter une partie qui n’est pas très agréable… tout en passant par un parc. Mais le retour sur Gouin nous ramène sur une portion où la piste cyclable (à deux sens) est carrément sur le trottoir, à peine plus large que la normale. C’est un des pires aménagements rencontrés. Je préfère le plus souvent rouler dans la rue plutôt que de risquer la rencontre de cyclistes et de piétons en même temps. 

Je me rends régulièrement au Carrefour Providence, où loge mon amie Sœur Annette. Un rendez-vous que nous avons eu en mode vidéo pendant deux ans… et que je me plais à faire maintenant à bicyclette, plutôt qu’en autobus comme avant. Ça me prend le même temps : une heure. 18 kilomètres. Avec le vélo électrique, c’est juste un bon exercice, été comme hiver. 

C’est fou comme on voit « étroit »… comme notre regard est linéaire. Je ne m’étais jamais rendu compte de la proximité de l’hôpital du Sacré-Cœur puisque en passant par O’Brien puis Salaberry, je ne passais jamais devant l’hôpital Sacré-Cœur. Un regard « de haut »  permet d’identifier plusieurs des communautés religieuses qui habitent sur ces terrains adjacents au sud et à l’ouest de l’hôpital. Un coup d’œil à l’histoire de l’hôpital permet de confirmer que les Sœurs de la Providence ont été « en charge » de l’établissement dès 1899, soit un an après sa création. 

Finalement, se rendre jusqu’à Cap St-Jacques nous aura pris plus de trois heures plutôt que les 2 heures 13 prévues par Google Maps. On voulait se rendre au Cap pour dîner… On aurait peut-être dû s’arrêter au Bois de Saraguay ou au Bois-de-Liesse : il y a de belles places que nous avons déjà visité auparavant. Si c’était à refaire je ne chercherais pas à longer la Rivière-des-Prairies, que nous avons pu admirer à quelques reprises mais assez rarement, somme toute. Au sortir du Bois-de-Liesse, côté ouest, une route cyclable en site propre nous aurait conduit jusqu’au Chemin de l’Anse à l’Orme. 

Du Cap à Ste-Anne-de-Bellevue 

La route est partagée (pas de piste cyclable séparée) sur le chemin Senneville, tout comme à Sainte-Anne-de-Bellevue et Baie-d’Urfé. Ça ne pose pas de problème dans la mesure où le trafic y est relativement léger et lent (30 km/h la plupart du temps). Les « demi-pistes » cyclables peintes sur la voie, dans Beaconsfield, sont franchement trop étroites… c’est pire que de simplement partager la route. Est-ce parce que Beaconsfield veut maintenir la vitesse à 50 km ? 

Au sortir du parc Cap St-Jacques, nous sommes tombés sur une vieille grange… que j’ai baptisé la Joconde échevelée. Un chemin champêtre dans sa première partie. La municipalité de Senneville comptait moins de mille habitants pour une superficie de 7,5 km2. On y trouve sans doute les plus grands domaines privés de l’île de Montréal. Ce qui se reflète sur la valeur foncière moyenne de cette municipalité (voir tableau plus bas).

Arrivés à Sainte-Anne-de-Bellevue, nous nous arrêtons pour une collation-dessin-photo à une table près de l’écluse. Les belles portes de l’église catholique, la mécanique de l’écluse… Et je vois la rampe circulaire (en tire-bouchon) pour accéder au pont vers l’île Perrot, où nous irons dormir ce soir. Il est bientôt l’heure de l’apéro que nous voudrions bien prendre au bord de l’eau. En suivant la rue du même nom nous décidons d’arrêter à un resto-bar, Annies sur le lac qui a sa terrasse… sur le lac. De la bière fraîche et des fruits de mer nous satisferont amplement. Il n’est pas très tard que nous reprenons les bicyclettes pour aller voir de quoi a l’air le Motel Montréal. 

Pour 94$ nous avons eu deux lits propres, des fenêtres qui ne s’ouvrent pas, une salle de bain avec des serviettes propres. C’est tout ce qu’il nous fallait. Un Dairy Queen pas loin, pour le dessert en face du Pete’s BBQ où s’étaient donné rendez-vous une centaine de motards… Ça complète le portrait! Une déception: j’avais oublié le chargeur pour mon téléphone. J’en avais bien emporté plusieurs : les deux pour les bicyclettes , celui pour l’appareil photo… mais pas celui du téléphone.

Deuxième journée

Ce smartphone nous aurait été bien utile le lendemain matin alors qu’on cherchait un endroit où déjeuner ! Mais il n’était pas 6 heures quand nous avons quitté l’île Perrot. Le Soleil était encore bas lorsque nous sommes passés devant une des marinas de Baie d’Urfée. Le téléphone nous a aussi manqué quand la piste cyclable marquée sur le pavé nous a tout à coup orienté vers le nord juste avant d’arriver au Village Pointe-Claire… alors qu’on voulait suivre le bord de l’eau. D’ailleurs je n’ai toujours pas compris pourquoi le trajet proposé par Google Map suggérait de quitter le chemin du Bord-de-l’eau / Lakeshore [ à moins que ce ne soit le Boul Beaconsfield] en arrivant à Pointe-Claire, pour nous faire passer (deux fois) pardessus l’autoroute 20… Probablement parce qu’une piste cyclable y a été aménagée pour relier les 3 stations du train de banlieue. Après un moment de confusion, nous sommes revenus vers le chemin du Bord-de-l’eau qui, dans la municipalité de Pointe-Claire était bien joli… [photo GE de maison Village, carte GM avec détour vers la 20]u

Nous avions déjà fait 10 km depuis l’île Perrot. À l’heure qu’il était (5:55) le McDonald de la rue St-Charles à Beaconsfield nous est apparu la meilleure option.  Après dix minutes d’attente on nous informe que, par manque de personnel, la salle n’ouvrirait que dans une heure… Nous roulons de nouveau vers l’est, espérant trouver quelque chose d’ouvert même s’il n’est pas encore 8 heures. Le village Pointe-Claire était charmant même ses boutiques fermées… Nous sommes rendus dans la ville de Dorval quand j’aperçois une femme marchant avec un verre de café de chez Tim Horton. Je lui demande où se trouve le Tim Horton le plus proche… et c’est là, sur ce boulevard près de la rampe d’accès à l’autoroute que nous avons pris un café et un beigne, debout devant le stationnement. Autant pour le côté champêtre de l’ouest de l’île ! 

Dans Dorval, puis Lachine, plusieurs portions de la piste étaient en sites propres… jusqu’à joindre le parc René-Lévesque puis le canal Lachine qui nous mènera, 13 km plus loin, au Vieux Montréal. Le Première Moisson du Marché Atwater nous a enfin servi un bon café. Puis nous sommes rentrés chez nous, sans s’arrêter dans le Vieux… Il était trop tôt pour dîner et on n’était pas dans le mood

En fait on pourrait dire qu’on a un peu perdu notre deuxième journée. À courir après le petit déjeuner, nous avons raté plusieurs “attractions” qui mériteraient certainement qu’on retourne dans ce coin, notamment l’Arboretum, l’Ecomuseum, le musée de l’aviation (peut-être) ou encore le campus du collège Abbott… En utilisant le train de banlieue jusqu’à Pointe-Claire ou Baie d’Urfée…

Les petites municipalités indépendantes de l’Ouest de l’Île de Montréal sont riches. Moins de 1000 personnes habitent Senneville.

Des différences importantes (encore inexpliquées) entre les superficies des municipalités telles que listées par la Communauté métropolitaine de Montréal ou pour le premier tableau par la Ville de Montréal.

servitude, béton et religion

lectures récentes

La fabrique de nos servitudes de Roland Gori. Un auteur que je ne connaissais pas mais qui m’a été chaudement recommandé par Olivier, de chez Gallimard. Et comme Olivier me connait mieux que tous les algorithmes d’Amazon, je lui fais confiance et je suis rarement déçu.

Nous codons le monde jusqu’à en perdre le corps. Nous mangeons des algorithmes. Ce livre est une invitation à en finir avec les fabriques de servitude en cherchant par tous les moyens de création à transgresser les assignations à résidence identitaires que favorisent les sociétés d’informations. (…) Les murs algorithmiques des sociétés de contrôle tomberont plus difficilement que le mur de Berlin. (…) Nous avons une identité d’êtres humains moins définie par un caractère « national », « racial » ou de « genre » que par notre appartenance au monde du vivant. Nous appartenons au vivant dont nous ne sommes que l’un des modes d’expression et que notre illusion narcissique nous empêche de reconnaître comme tel. (…) Nous ne nous sommes pas échappés de l’animisme comme la superbe occidentale le croit, nous l’avons transféré aux objets techniques, non sans efficacité.

La fabrique de nos servitudes, R. Gori. Pp 21, 127 et 226-227.

Si je ne retenais qu’une chose de ce texte touffu c’est son appel à la créolisation des cultures, du monde. Qui me fait connaître Patrick Chamoiseau (Texaco, prix Goncourt 1992) et Achille Mbembe (Critique de la raison nègre). Aussi tiré de la foisonnante bibliographie citée par Gori : Béton, arme de construction massive du capitalisme, de Anselm Jappe; Relions-nous, La constitution des liens – L’an 1; et L’archipel français, Naissance d’une nation multiple et divisée de Jérôme Fourquet.

Gori est un philosophe qui a une formation de psychanalyste (à moins que ce soit l’inverse ?). Si les références à Deleuze, Lacan, Foucault ou Debord ne vous font pas peur… Mais ce sont les auteurs antillais (Glissant, Chamoiseau, Mbembe) cités qui me convainquent de cette perspective de la « créolisation », critique s’il en est du « wokisme » et des identitaires en mal de pureté.

Je me suis plongé ensuite dans Béton, arme de construction massive du capitalisme. L’auteur (Jappe) y fait l’histoire du béton, en particulier de sa version moderne, le béton armé. Son impact sur l’architecture et les techniques traditionnelles de construction. L’impact écologique en émission de GES (chaque tonne de béton coûte une tonne de CO2) mais aussi en consommation de sable. Une « mafia du sable » s’est développée en Inde… Mais j’ai été déçu de ne pas trouver l’analyse que je cherchais (et cherche encore) de l’importance financière et matérielle que constituent les tours d’habitation qui pullulent dans les centres urbains : comme si c’était le nec plus ultra de l’urbanisme, de l’habiter en ville ! Quand on voit, littéralement, sortir de terre en quelques années des quartiers tel Griffintown à Montréal, on est en droit de se demander jusqu’où ce « cancer » va s’étendre aux autres quartiers ? Est-ce vraiment le meilleur moyen de « densifier » nos villes ? Ou si ce n’est pas plutôt un moyen de faire du fric, un investissement payant et une version quasi liquide de l’immobilier (Louis Gaudreau, Le promoteur, la banque et le rentier). Un revenu important pour la Ville aussi. Donc, je cherche encore cette analyse du poids (financier, environnemental, culturel) des tours…

Pour m’aérer un peu l’esprit, j’ai ensuite lu cette autre référence de Gori, plus divertissante : L’anomalie, de Hervé Le Tellier. Le prix Goncourt 2020. Mérité, à mon avis bien humble car je ne me précipite pas en général pour lire les prix littéraires.

Je suis revenu ensuite à Relions-nous, que j’avais juste feuilleté. Un assemblage plutôt insipide (en ordre alphabétique des titres ! de Agriculture à Utopie) de quelques dizaines de très courts articles autour du terme : créer ou refaire des liens. Trente-huit textes de 2 à 4 pages, suivis de quelques propositions concrètes, parfois sous forme d’articles à adopter dans cette nouvelle « Constitution des liens, L’an 1 » annoncée en sous-titre de l’ouvrage collectif. Parmi les quelques 50 auteurs j’en reconnais une dizaine (Giraud, Citton, Méda, Damasio, Viveret, Morizot, Darleux, Servigne, Blondiaux). Malgré ces limites, ou peut-être grâce à elles, beaucoup des propositions avancées sont à la fois simples et audacieuses. Plusieurs touchent à cette obligation de plus en plus évidente : nous devons partager cette planète avec les autres vivants qui l’habitent. Par exemple : « Par des sorties en nature hebdomadaires les élèves apprennent à identifier 26 essences d’arbres et d’arbustes… ». Ou encore « Tout habitant de la ville devra être responsable d’au moins un arbre ». Ou cette injonction visant à rendre paritaires (actionnaires et employés) les conseils d’administration des entreprises et à limiter à un maximum de douze fois le SMIC le salaire des dirigeants. Ou ces propositions concernant les médias visant à considérer « les attentions individuelles et collectives » comme des biens communs dont la protection doit être assurée au même titre que la protection de l’air et de l’eau. À cette fin le financement des médias locaux devra être assuré grâce à une répartition des revenus actuellement appropriés par les grands medias et par de fortes taxes sur la publicité.

Peut-être l’article qui m’a le plus déçu de l’ensemble : celui sur la religion qui se limite à réaffirmer l’importance de la laïcité de l’État. Mais, bon, c’est peut-être beaucoup demander de faire plus que cela en 2-3 pages. Je me suis donc consolé, ou rassasié, avec ce livre-somme de Jurgen Habermas : Une histoire de la philosophie — La constellation occidentale de la foi et du savoir. Quelques 850 pages par cet érudit philosophe pour étancher ma soif de comprendre. Même s’il se concentre principalement sur l’évolution en Occident, son chapitre comparant les religions de la « période axiale » (bouddhisme, taoïsme, judaïsme) et la philosophie grecque était éclairant. Augustin et Platon; Thomas d’Aquin et Aristote; l’émergence d’un nouveau paradigme avec Duns Scot et Guillaume d’Ockham. Ce premier volume se termine sur Machiavel dont il me fait découvrir un texte qui, d’après Habermas, est plus important encore que le fameux « Prince » : Discours sur la première décade de Tite-Live.

Je ne prétendrai pas vous résumer ce tour d’horizon magistral réalisé par ce brillant philosophe nonagénaire ! Le plan du volume II est annoncé à la fin du premier volume : « Liberté rationnelle. Traces des discours sur la foi et le savoir« . Il complétera ce parcours : de Luther à Hume, puis à Kant; Hegel, Feuerbach, Marx, Kierkegaard, Peirce. Ça promet !

Et comme j’avais sous la main une copie, jaunie par les quelques 33 ans écoulés depuis sa parution, trouvée chez un bouquiniste il y a quelques mois, de Une théologie pour le 3e millénaire par Hans Küng, j’en ai lu les quelques quarante pages de conclusion : L’unique vraie religion existe-t-elle ? Essai de critériologie oecuménique 1j’ai produit un pdf « maison » de cette conclusion. Après le point de vue agnostique et historique de Habermas, qui sied à un philosophe, Küng amène un point de vue de l’intérieur2« On ne saurait saisir une religion dans ce qu’elle a de plus profond tant que l’on n’y adhère pas de l’intérieur, avec tout le sérieux existentiel qu’elle appelle » p. 345, en tant que théologien. Un point de vue contemporain, pour qui le dialogue entre les religions est une question urgente, immédiate, même 35 ans après la parution de l’original en allemand. Küng est peut-être le théologien qui a pris le plus au sérieux la nécessité du dialogue entre les religions : il a étudié, publié sur le judaïsme, l’Islam, la « religion chinoise »… en plus de ses écrits sur l’Église et la chrétienté. Ce qui lui permet d’aborder la question avec respect et perspicacité. Enfin, je crois.

Mais pourquoi donc revenir, encore, à cette question de la religion, alors que tant d’autres frappent et se pressent à la conscience ? Peut-être parce que j’ai l’impression que mes contemporains, occupés qu’ils sont à bien verrouiller la religion dans le champ du privé afin de garantir la laïcité de l’État, oublient facilement à quel point elle est au coeur de la culture sinon au centre de l’État pour la plus grande partie de l’humanité. Et si les enjeux globaux exigent une mobilisation globale, nous devrons trouver un langage commun, autour de valeurs qui transcendent les différends religieux. Une nouvelle éthique du vivant : « Nous appartenons au vivant dont nous ne sommes que l’un des modes d’expression » (R. Gori, op. cit. p.226).

Notes

  • 1
    j’ai produit un pdf « maison » de cette conclusion
  • 2
    « On ne saurait saisir une religion dans ce qu’elle a de plus profond tant que l’on n’y adhère pas de l’intérieur, avec tout le sérieux existentiel qu’elle appelle » p. 345

travail social et utopies

Social Work Futures

Je découvre Social Work Futures de Laura Burney Nissen par le numéro 219 du bulletin Sentiers de Patrick Tanguay. Ce dernier pointait vers un billet de Burney Nissen intitulé 10 Things — Dispatches from the Future, qui nous présente plusieurs textes qui valent le détour :

  • Social work in the face of collapse, tiré de la revue Critical and Radical Social Work;
    • Pour faire face aux défis qui viennent, le travail social devra suivre les enseignements tirés de l’approche de développement communautaire. « [T]o be of assistance in the future, social work will need what the ethos of community development offers more than ever if it intends to remain committed to socially just practice (…) this article discusses some bleak likelihoods that are painful to consider. However, this is an article about hope: not hope that we can avert future environmental and societal catastrophe; but instead hope that as communities face the coming predicaments, they will rediscover collective solidarity and wiser ways of living together and with the planet. Social work, particularly when it draws on community development perspectives, can have a key role in this transition to sanity. »
  • Social collapse and climate breakdown, de la revue The Ecologist. Un texte de 2019 mais qui fait une bonne synthèse des conséquences sociales de la crise climatique,
  • We’re not yet ready for what’s already happened. La société est déjà engagée dans des processus qui impliqueront de profondes discontinuités. Même si nous pouvions, par miracle, résoudre le « problème » climatique. »We are surrounded by ubiquitous mismatches between the value of systems, enterprises and places given their suitability to the world we now live in, and the way those things are priced by markets. We are surrounded, in short, by bubbles.  » Mais ces discontinuités peuvent être vues comme des opportunités : possibilités de prises de conscience radicales et de changements rapides.

Les articles suivants mettent en valeur l’importance de l’imagination, de la formulation d’utopies, de visions de l’avenir sans lesquelles il est impossible de mobiliser.

Retour de la planification

Ce même numéro de Sentiers commençait en citant longuement The Whole Field, de Max Krahé. un texte intéressant par son rappel précis des conditions de réalisation des efforts de planification qui ont marqué la période d’après-guerre en Europe et en France. Après coup, je note que cet article est d’abord paru en français (!) dans la revue Grand Continent sous le titre Un État pour la planification écologique. Tant mieux pour vous qui n’aurez pas à vous taper la version anglaise !

On ne parle plus vraiment de travail social mais pour imaginer des futurs possibles, en s’inspirant d’une période qui fut, elle aussi, marquée par les grands défis à relever… ce texte me semble inspirant.

une voie cyclable à l’abri des autos

En utilisant Google Earth pour y insérer quelques photos-repères déposés sur le trajet des voies ferrées le long d’un parcours de 20 km. Un rêve, un projet amorcé il y a 22 ans… Pour plus de détails, voir suivant la voie ferrée, prise 2.

Avant de repartir faire des photos, pour mettre à jour celles de juillet-août 2000, je dois porter attention, plus qu’il y a 20 ans, à l’impact recherché : faire avancer le « dossier », l’idée d’une voie cyclable tout du long de la voie ferrée identifiée, celle qui sépare et relie tous les vieux quartiers centraux de Montréal.

J’ai aussi assemblé quelques sources autour du thème « rails-with-trails » (à distinguer des « rails-to-trails » qui parlent des voies ferrées désaffectées transformées en pistes). Voir rails et vélos.

autonomie et santé

Je poursuis ma réflexion sur la « refonte » ou « refondation » du réseau de la santé… j’ai ajouté quelques références d’intérêt sur la page dédiée Réflexion sur la refonte, dont une lecture ((Reinventing Organizations — Vers des communautés de travail inspirées)) qui m’a fait découvrir un réseau néerlandais de services à domicile (le lien conduit à la note particulière sur la page « Réflexion ») : Buurtzorg .

De petites équipes (12 max) d’infirmières à domicile dans un quartier, fonctionnant de manière autonome, auto-administrée, sans hiérarchie. C’est possible et ça marche depuis 2006 en Hollande, où l’organisation Buurtzorg a en quelques années crû pour devenir le principal mode de livraison de  services infirmier à domicile. La formule s’est développée pour s’appliquer aussi en matière de services en santé mentale, et de services aux jeunes.

Le livre de Frédéric Laloux (Reinventing Organizations : Vers des communautés de travail inspirées) décrit l’entreprise Buurtzorg, parmi d’autres semblables. Je repensais aux débuts des CLSC, où des équipes particulièrement autonomes étaient amenées à inventer chaque jour des solutions nouvelles. Sans doute que le fait d’avoir une seule profession (groupe d’infirmières) facilite l’action de l’initiative hollandaise, de même que le mode de financement a aussi favorisé la croissance rapide de la formule. Voir page de sources Réflexion sur la refonte.

L’exemple hollandais est intéressant, alors qu’on souhaite repenser la formule des services aux aînés après plusieurs décennies de développement assujetti aux besoins des hôpitaux (virage ambulatoire, hospitalisations d’un jour…). Il est intéressant parce qu’il génère plus de résultats (autonomie restaurée) pour la clientèle, mais aussi pour le personnel (enthousiasme et stabilité du personnel) à un coût comparativement avantageux.

Les équipes de services à domicile des premiers CLSC pouvaient ressembler à ces équipes Buurtzorg en ce qu’elles étaient petites, étaient dirigées par des leaders qui accompagnaient plutôt que dirigeaient des groupes de professionnelles dévouées et inventives dans un cadre qui laissait beaucoup d’autonomie à ces dernières. Qu’est-ce qui a empêché que cette approche se perpétue et se réplique à l’échelle du réseau des CLSC ? Ce qui a conduit à l’intégration des CLSC dans des ensembles de plus en plus gros, de plus en plus soumis à la logique hospitalière et comptable développée pour servir des pratiques médicales rémunérées à l’acte.

En implantant le « virage ambulatoire » et les chirurgies d’un jour dans les hôpitaux (1993), pour réduire (ou contenir) les couts moyens en accélérant la cadence. Permettant ainsi de réduire les listes d’attente et augmenter l’accessibilité de certains services médicaux. Cette réorganisation médico-hospitalière a eu un impact immédiat sur les services à domicile des CLSC. Le travail des infirmières est devenu beaucoup plus mesurable et divisible en gestes comptabilisables en minutes de soins. La clientèle n’était plus la même. Ou plutôt si, c’était la même mais on attendait qu’elle passe par l’urgence de l’hôpital ou sous le bistouri du chirurgien avant de la « prendre en charge ».

Même si plusieurs institutions on tenté de maintenir des équipes affectées au « maintien à domicile » distinctes des équipes de soins post-hospitaliers, les mesures budgétaires et comptables visant l’optimisation ont induit, imposé un style d’administration et de contrôle peu compatible avec l’autonomie professionnelle et la qualité du lien clientèle des premiers services de maintien à domicile qui étaient axés sur le dépistage des clientèles fragiles et le maintien, le développement de leur autonomie.

Pour une critique inspirée de l’idéologie de l’optimisation

Pour une critique inspirée de l’idéologie de l’optimisation, et la promotion d’une sous-optimalité choisie…  voir La Troisième Voie du vivant.


L’expérience CLSC que le Québec s’est payé pendant une trentaine d’années a-t-elle été un échec, comme l’affirmait sans vergogne le ministre Barrette, pour justifier sa centralisation du système autour des médecins spécialistes ?

Ce fut certainement un échec en regard des prétentions de départ voulant en faire “la porte d’entrée du système”. Mais les CLSC furent à l’origine (ou partenaires) de beaucoup des initiatives communautaires, civiles, et préventives qui enrichissent la société québécoise actuellement. L’expérience des CLSC en matière de services de soutien à l’autonomie des personnes frêles a été riche, très riche à une époque, mais elle a été grandement dilapidée par le virage ambulatoire. Peut-on récupérer une partie de cette expertise pour contribuer à la relance d’un véritable service de soutien à l’autonomie ? Je commence à voir l’intérêt d’une séparation du financement d’un tel service de celui des hôpitaux et médecins spécialistes.

bloguer à plusieurs

Le groupe Nous.blogue a été créé il y a 7 ans, le 1er avril. Depuis, quelques 450 billets ont été écrits et diffusés par ce médium par une trentaine de blogueurs (dont le soussigné) et blogueuses. En 2015, la conjoncture n’était pas brillante, côté développement régional et action collective de développement des collectivités : les CRÉ (conseil régional des élus), les CLD (centre local de développement) de même que Solidarité rurale avec son réseau d’agents de développement avaient été soit carrément dissous, fermés ou grandement fragilisés.

À l’époque, il était apparu important d’ouvrir cet espace de discussion-réflexion (Nous.blogue) afin de pallier à la disparition de ces lieux de concertation et d’accompagnement des processus de développement des collectivités.

Depuis sept ans, qu’est-ce que ce blogue collectif a apporté ? Pour ma part, j’ai apprécié lire plusieurs des contributions que je n’aurais peut-être pas « attrapées » sur les fils d’actualité (quotidiens, FaceBook, Twitter). Je pense aux réflexions de Bernard Vachon sur la décentralisation et le développement des régions; à celles de René Lachapelle sur la démocratie et la transition… et d’autres sur les élections, la militance, l’équité… J’ai aussi certainement profité de cette plate-forme pour diffuser un peu plus largement certains billets aussi publiés ici, sur Gilles en vrac… Même, je devrais dire que la participation à ce blogue collectif m’a parfois incité à écrire : des dates de tombée que je ne me serais peut-être pas imposé tout seul !

Aujourd’hui, en 2022, le contexte ayant amené à la création de cet « outil » a-t-il changé ? Existe-t-il d’autres lieux de discussion, d’expression semblables ? Les déficits démocratiques créés par la disparition des CRÉ et autres ont-ils été comblés ? Les mesures d’austérité qui étaient au coeur de ces décisions gouvernementales à l’époque ont-elle été révisées, compensées ?

Les politiques libérales d’austérité ont été remplacées par des politiques caquistes… puis des politiques de temps de pandémie. Les politiques de centralisation en santé et de décentralisation vers les MRC (au détriment du soutien aux régions) ont été maintenues. Certaines régions s’en tirent mieux que d’autres en matière de développement concerté ou intégré : après tout, ce ne sont pas les CRÉ qui avaient créé les régions ! Là où la tradition était bien ancrée, des processus collectifs ont été maintenus ou redéployés, parfois avec l’aide de certaines fondations.

Ce qui a le plus changé, il me semble, depuis sept ans, c’est l’importance croissante accordée au changement climatique et à la nécessaire transition éco-socio-énergétique (voir évolution des catégories et étiquettes). Cette préoccupation traverse de plus en plus les propos émis sur Nous.blogue mais aussi d’autres espaces collectifs, dont certains sont relativement nouveaux : notamment la plateforme Passerelles, un projet maintenant autonome issu du TIESS. Aussi des initiatives comme le Front commun pour la transition énergétique ou encore le groupe FaceBook Solon qui ont été créé depuis 2014 ou ont pris plus d’importance.

En faisant le tour des groupes ou pages FaceBook dont l’orientation est similaire ou convergente à celle de Nous.blogue : préoccupation pour l’équité, la démocratie, le développement des territoires, des collectivités, la transition… j’en ai relevé plusieurs (voir tableaux à la page suivante). La question se pose : pourquoi pas juste un groupe FaceBook à la place de Nous.blogue ? Géré par un comité qui accueillerait et stimulerait les participations. Ce serait moins compliqué qu’un blogue, non ? Pas sûr… c’est pas compliqué un blogue. Et le contrôle exercé par le groupe sur son environnement est beaucoup plus grand : on peut classer, conserver, organiser comme on veut les contenus.

Si je repasse rapidement le film des comités d’orientation du blogue, dont je suis membre depuis les débuts.((Je pense même être celui qui a suggéré l’idée d’un blogue sur les coupures et mesures d’austérité… pour donner la parole à ces expertises et engagements qui se faisaient cavalièrement remercier.)) Tous ces espaces démocratiques d’interaction entre le politique et la société civile, en lien avec des territoires singuliers, des parcours historiques qui allaient se taire. Il y avait un enthousiasme au début : en témoigne le nombre de billets publiés les premières années :

Nombre de billets publiés par année
sur Nous.blogue depuis sa création

J’ai l’impression qu’on a souvent été, au comité d’orientation, en campagne : trouver de nouveaux blogueurs, rencontrer, s’entretenir avec des « prospects »… stimuler les troupes en suggérant des thèmes pour une période : Élections 2018, ou Nos années 20 ! à l’occasion du 5e anniversaire du blogue en 2020.

Il est intéressant de rappeler les deux commentaires faits au moment du « lancement » de la série Nos années 20!, le 1er avril 2020.

Par Marie-Denise, la première accompagnatrice du blogue, de chez Communagir : « Je dois dire que c’est avec beaucoup de fierté que je vous lis encore! Quelle belle évolution pour nous.blogue. Bravo à toute l’équipe et aux blogueurs toujours plus intéressants et pertinents. »

Et Bernard, ce généreux contributeur au blogue collectif, particulièrement sur les questions de développement régional et rural, de critique du développement trop orienté vers/par les grands centres :

Je crois beaucoup à l’utilité de ce blogue. Il fait mieux connaître nos régions; il emprunte des voies d’analyse inédites parce que souvent fondées sur la connaissance des gens de terrain; il propose un regard et des perspectives tournées vers des réalités porteuses d’espoir; il réunit l’économique, le social et l’environnemental; il explore les « futuribles », c’est-à-dire les futurs possibles; il soumet une critique réfléchie et documentée; il ne craint pas d’ouvrir la porte à l’intuition et à la sagesse de l’expérience.
Longue vie à Nous.blogue!

Bernard Vachon, en commentaire le 3 avril 2020 à 13 h 05 min

Je ne saurais mieux dire. Merci professeur Vachon.

C’était il y a deux ans. La situation a-t-elle changé depuis deux ans ? Mis à part qu’on est dans une situation extraordinaire depuis deux ans ! Oui, la situation a changé : les familles ont connu des stress supplémentaires importants pendant de longues périodes; plus de morbidité, de mortalité que d’habitude, mais moins de contacts sociaux pour amortir, amoindrir les effets de ces pertes. Les gens sont plus susceptibles, plus près de « péter une coche » que jamais… Les divisions ville-campagne, intello-ouvrier, cycliste-VUS, immigrés-natifs sont plus vives, parce que les pôles dominés de ces couples ont été mis en valeur au cours de la dernière période… donnant plus de légitimité à une population habituellement silencieuse.

Ce qui a changé depuis sept ans ? Plus de sources d’information, plus d’initiatives collectives ancrées territorialement, de campagnes de résistance aux projets malvenus ou mal conçus des autorités, d’initiatives locales vers la transition… Chaque grand projet (3e lien, REM, refondation santé…) devrait servir à nous faire avancer vers une société moins gourmande, plus économe, plus créative, plus respectueuse et sociale. Pourtant, trop souvent, ces projets sont fondés sur la perpétuation des modèles dominants, standards.

Je crois aussi qu’il y a encore de la place pour un espace, une voix comme Nous.blogue. Mais il me semble que j’y viendrais plus souvent s’il y avait plus d’informations partagées. En plus des contributions originales auxquelles nous sommes habitués on pourrait ajouter les résultats d’un survol de l’actualité : publications récentes dans certaines collections, de certains éditeurs; colloques et événements à venir; parutions pertinentes dans certains fils Twitter ou pages FB venant de collectifs et d’organisations aux intérêts convergents.

Mais n’y a-t-il pas déjà des bulletins, newsletters, qui rassemblent ces infos ? Je pense particulièrement à Le Quinzo, le bulletin bi-hebdomadaire de Passerelles. Il ne faut pas dédoubler les efforts mais nous avons quand même besoin de faire des liens. Notamment avec ce qui se passe sur FB.

J’imagine une évolution, un développement de Nous.blogue grâce à un bassin de contributeurs étendu, dont certains pisteurs et veilleurs relatant certaines sources en plus des auteurs actuels. Ou encore des contributions photographiques témoignant de la dynamique des régions, des quartiers…

Nous sommes des tisserands et tisserandes d’une toile aux multiples fils. Des paroles individuelles engagées, réfléchies, des témoignages personnels; des récits vrais. Mais aussi pourraient s’ajouter des fils d’infos pertinentes, reflétant l’actualité et l’innovation des mouvements sociaux. L’écosystème du développement des collectivités territoriales et urbaines continuera de se développer. Le grand inconnu de la prochaine décennie : comment les villes et MRC relèveront le défi des services de proximité, avec les partenaires traditionnels des réseaux communautaires et de la santé ? Mais surtout, comment ces acteurs, ensemble, contribueront-ils à avancer la Transition, et l’invention d’un nouvel habiter. La conjoncture pourrait être favorable à l’expérimentation : valorisation des services de proximité, du logement locatif, du transport actif et collectif, du développement décentralisé… Je demeure préoccupé de l’éloignement, de la méconnaissance qui oppose trop souvent collectivités urbaines et rurales… secteurs publics et privés… intellos et manuels… On a pourtant besoin de tous.

L’écosystème de Nous.blogue

Les tableaux qui suivent rassemblent les liens vers des groupes ou encore des pages sur FaceBook avec le nombre de membres (ou d’abonnés) en date du 15 mars 2022. Une façon de se situer parmi d’autres groupes ou diffuseurs. J’ai ajouté, par curiosité, certains partis et leaders politiques, pour relativiser l’importance des « communautés intentionnelles ». Voir page suivante.

des communautés saines ou sécuritaires ?

Poursuivant la réflexion-recherche amorcée avec le billet précédent autour de l’orientation d’un système de santé en première ligne…

Le Québec et le Canada ont été à l’avant-garde de la santé publique à l’échelle internationale pendant des décennies : rapport Lalonde conduisant à l’adoption de la Charte d’Ottawa en 1986. Le rapport Poirier, en 2005, 3 ans avant le rapport de la Commission de l’OMS sur les déterminants sociaux : Combler le fossé en une génération


EN PASSANT : Qu’est-ce que le Centre de collaboration nationale des déterminants de la santé peut apporter ? Un débat – une conférence sur l’équité en santé ? (entendez ici le mot « national » comme canadien)


L’orientation de l’actuel gouvernement : doit-on y voir un virage « sécurité » ? En cherchant sur le site de l’INSPQ les documents publiés récemment sur le thème Développement social et communautaire, je remarque les dernières publications, qui tournent autour du diagnostic sécuritaire des communautés, après une évaluation de l’implantation de la démarche « Prendre soin de notre monde ». Doit-on y voir une évolution ?

De la stratégie « Prendre soin de notre monde » (Appropriation de la démarche Prendre soin de notre monde – mars 2021) aux diagnostics de sécurité (Manuel pour accompagner le processus et déterminer le diagnostic de sécurité : trousse diagnostique de sécurité à l’intention des collectivités locales – 2e édition – Passer d’un diagnostic de sécurité à un plan d’action : un guide à l’intention des collectivités locales – 2e édition) en 2022

Prendre soin de notre monde, un « appel à travailler ensemble » lancé en 2015. « La Démarche Prendre soin de notre monde est une invitation à travailler ensemble, en facilitant les collaborations entre les acteurs municipaux, gouvernementaux et non gouvernementaux pour la création et le maintien d’environnements municipaux favorables à la santé et à la qualité de vie. » 

Rapport d’évaluation, daté de mars 2021, par Marc Lemire (Appropriation de la démarche…).

Extraits du rapport d’évaluation : 

certaines configurations posent davantage d’obstacles ou de limites à la possibilité de réussite de la démarche, du moins en ce qui concerne son appropriation, par exemple lorsque seul un petit nombre d’individus en porte la vision ou lorsque la vision partagée régionalement est limitée à la préoccupation des saines habitudes de vie. 

Les acteurs œuvrant en développement communautaire expérimentent aussi des difficultés à traduire la démarche par rapport à leurs rôles et responsabilités. En outre, l’adhésion de ces derniers à l’idée de travailler en soutien aux acteurs municipaux plutôt qu’en soutien à l’ensemble de la communauté ne va pas de soi. 

 Enfin, des difficultés se posent également pour les représentants de certaines organisations partenaires au sein des TIR-SHV. En dehors des représentants responsables de la coordination régionale, plusieurs semblent peu informés sur la démarche et ses ancrages régionaux. Dans ce cas, la difficulté d’en percevoir l’utilité est accrue. 

la démarche correspond à une réalité différente selon les organisations et les fonctions occupées, de même qu’en fonction des régions et des paliers d’intervention. 

Dans la mouvance de Québec en forme d’où elles proviennent, les TIR-SHV continuent de prioriser la thématique des saines habitudes. Plusieurs semblent néanmoins avoir cherché à redéfinir ou consolider leurs actions autour d’une vision plus large de la santé et de la qualité de vie 

Enfin, des améliorations sont attendues en ce qui concerne les organisations municipales. Considérant le roulement d’effectifs régulier et malgré les multiples contraintes et sollicitations auxquelles font face les élus et les employés municipaux, il est souhaité qu’ils maintiennent leur ouverture aux efforts de sensibilisation, de mobilisation et de collaboration qui leur sont destinées. 

La finalité de la démarche implique que les acteurs municipaux saisissent le rôle qu’ils peuvent jouer et les leviers dont ils disposent pour agir à leur façon en matière de santé et de qualité de vie. Les acteurs régionaux engagés dans la démarche souhaitent que les acteurs municipaux comprennent la diversité des expertises qu’il leur est accessible en collaborant et qu’ils acceptent de s’engager dans une relation de collaboration plutôt que strictement dans une dynamique de mandant/mandaté. On souligne l’importance que les municipalités favorisent la participation en amont des projets et si possible à différentes étapes de façon à tirer profit des expertises complémentaires qui leur sont offertes. (p. 8, Appropriation de la démarche, Faits saillants et résumé)

[— À voir : les autres acquis et leçons tirées (dans le même rapport) pour les autres partenaires (régionaux, non-gouvernementaux…)  —] 

Ceux qui ont participé à des activités de formation et de sensibilisation manifestent aussi une adhésion et une motivation plus grandes en général. Or, une proportion importante des acteurs engagés dans la démarche occupe nouvellement leur fonction et n’a pas participé à de telles activités dans les dernières années. Ceux qui ont moins d’ancienneté dans leur fonction actuelle ont d’ailleurs moins souvent tendance à bien comprendre la démarche.

Il ressort de cette évaluation trois principales recommandations formulées à l’intention des décideurs :

1- Poursuivre la mobilisation collective visant la création et le maintien d’environnements favorables à la santé et à la qualité de vie en milieu municipal en s’appuyant sur les capacités et les dispositifs en place, tout en les renforçant;

2- S’adapter à l’évolution rapide des réalités du milieu municipal en poursuivant les efforts de rapprochement des instances stratégiques et des regroupements de professionnels détenant des expertises clés en milieu municipal;

3- Engager davantage les organisations et les réseaux partenaires de la démarche à concevoir de façon collaborative le développement d’outils et de connaissances, ainsi qu’à structurer le partage de ces outils et connaissances de façon concertée pour renforcer les capacités des acteurs de soutien en région.

Ces recommandations tiennent compte du fait que le contexte national de pandémie lié à la COVID-19 depuis mars 2020 ne remet pas en question la finalité de la démarche ni ses principes de collaboration. Bien au contraire, l’action intersectorielle en santé publique et la collaboration avec les municipalités demeurent essentielles pour maintenir ou créer des environnements favorables à la santé.

Extraits de Appropriation de la démarche Prendre soin de notre monde – mars 2021

Dernière nouvelle : le gouvernement de la CAQ prévoit transférer 5000 postes de fonctionnaires dans les régions. Une politique saluée par l’UMQ et commentée par son président dans Le Devoir.

« refondation » du système de santé?

Refonder ou rétablir, il y a une nette différence. Par rétablissement, on signifie le retour à l’équilibre (ou à la santé); retour à l’état antérieur. Pour refonder, il faut établir de nouvelles bases, ou encore accueillir de nouveaux partenaires à l’entente entourant ou supportant, fondant l’établissement, l’institution.

Comme le soulignait M. Gerbet, de Radio-Canada, « Publiquement, ce plan est présenté comme une refondation du système de santé, mais en interne, c’est l’appellation plan de rétablissement qui est utilisée. » Ce rétablissement repose sur quatre fondations : les ressources humaines, l’accès aux données, les systèmes informatiques et les infrastructures.

Et, en anglais, le ministre de la santé précise ce qu’il entend par « infrastructure » : plus de lits dans des hôpitaux rénovés. 

Pour les ressources humaines, on veut avoir plus d’emplois à temps plein dans le réseau – « 40% des emplois sont à temps partiel ». 

Ainsi, ce qu’on avait appelé pompeusement une « refondation » revient à une consolidation de l’hospitalocentrisme… Que peut bien signifier dans ce contexte la décentralisation souhaitée ?

La pression vers une privatisation des soins et services se fait sentir : les exemples européens abondent, « les meilleures pratiques au sein des systèmes de santé de la Suède et du Royaume-Uni », sous la plume d’une chercheuse soutenue par l’Institut économique de Montréal. Une comparaison qui se termine par un nouvel appel à faire plus de place au privé. Parmi les 6 ingrédients de la « recette gagnante pour une refonte réussie du système de santé » : laisser le « secteur indépendant » administrer les hôpitaux publics; accueillir plus facilement les médecins formés ailleurs ET faciliter aux médecins québécois la pratique de leur art ailleurs au Canada. 

Ce projet de rétablissement-refondation sera une pièce importante du prochain programme électoral de la CAQ. Si on laisse les financiers, les administrateurs d’hôpitaux et de systèmes s’exprimer seuls… il ne faudra pas se plaindre que la CAQ suivent leurs recommandations. 

Il y a un urgent besoin d’une autre analyse, d’une alternative à cette refondation qui risque fort de ressembler aux « solutions » CAQistes à nos problèmes de transport (REM, 3e lien, autoroutes élargies).

Certains croiront le gouvernement Legault qui « assure toutefois avoir l’intention de changer radicalement d’approche, avec une vision plus humaine et efficace, en décentralisant les décisions » (Thomas Gerbet, Radio-Canada). Mais avec le niveau de centralisation auquel était rendu notre réseau de santé (34 PDG réunis autour du ministre) on peut sans doute décentraliser de quelques crans sans pour autant changer l’approche. 

Une vision « plus humaine et efficace », nous promet-on ! C’est vrai que se faire soigner par une personne plutôt qu’un robot qui garde un œil sur sa tablette et l’autre sur sa montre… ça doit avoir des conséquences mesurables en terme d’efficacité thérapeutique. Malheureusement trop souvent dans le passé l’efficacité dont on parlait, et qu’on mesurait, c’était le nombre de minutes passées à faire la procédure XYZ pour soigner l’épisode de maladie 1278c… (Voir plusieurs présentations faites à l’ACFAS 2021 sur Reddition de compte en intervention de proximité : comment dépasser la mesure et (re)trouver le sens ?, présentations déposées dans le groupe de discussion Santé de la plate-forme Passerelles.) 

Je n’ai pas de solution, d’alternative à proposer ici, maintenant. Certains acteurs du réseau de première ligne des dernières décennies auraient sans doute beaucoup à nous dire et nous apprendre, comme le billet d’Alain Coutu en témoignait récemment sur Nous.blogue. 

Un groupe de travail, dans Passerelles ? Sous-groupe de l’actuelle communauté « Santé » pour discuter de cette autre conception de la refonte nécessaire ?

Pour stimuler la réflexion

Pour contribuer à lancer la discussion, j’ai assemblé sur une page Réflexion sur la refonteles liens vers des documents d’archives (1988-89; 1995…) que je compte relire. Aussi des liens vers des documents plus récents (et décapants !) tel « Le capitalisme c’est mauvais pour la santé« . Bon, ce dernier n’est pas un document d’archive (ni gratuit) mais il s’inscrit dans la foulée, dans le sillon des travaux de l’IRIS, l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques – « Votre institut de recherche progressiste ».

En terminant, je suis bien conscient qu’un retour sur les origines des CLSC (ou les transformations du système de première ligne depuis 50 ans) ne peut inclure, comprendre tout ce qui s’est développé depuis. S’il est question de refonder un système apte à prendre soin de sa communauté, l’approche préventive et d’empowerment communautaire portée par le projet CLSC original a été reprise, transformée, développée par les CLD, CDC, et autres ADR (et Tables de quartier) et un mouvement communautaire qui s’est structuré, spécialisé, subdivisé. Mais qui a su se faire reconnaître, en expertise, en savoir-faire, en gestion de ressources. Autrement dit le nombre de partenaires dans la communauté intéressés par une stratégie de développement/services/santé dans la communauté s’est multiplié depuis la création des CLSC. Et la position des médecins dans le réseau s’est érigée en un réseau parallèle (grâce à de lourdes subventions publiques) très peu lié aux communautés. 

Billet aussi publié sur Nous.blogue

[Ajout 2022.02.25] Voir aussi : des communautés en sant ou sécuritaires ?

un anniversaire

Le 9 février marque le 20e anniversaire de ce carnet web. J’ai pensé que ça méritait d’être souligné. J’avais tenté d’en extraire les meilleurs billets en vue du 15e, en 2017 ! Un pensum abandonné en cours de route parce que j’avais, me semblait-il, mieux à faire que de ressasser une matière pas toujours mémorable !  J’ai finalement complété le travail, cinq ans plus tard, avec plus de plaisir qu’escompté. À la retraite depuis bientôt dix ans, j’ai apprécié retourner, en mémoire, à cette époque fébrile, pour ne pas dire frétillante où je pouvais écrire 50 billets par mois (!). Bon, je vous rappelle que le blogue remplaçait Twitter en ces années pionnières et les billets se résumaient souvent à pointer vers une ressource, un document public en discussion ou simplement le billet d’un autre blogueur. 

J’ai rassemblé en quelques pages, cinq pour le moment, les étapes, ou contextes qui ont jalonné l’écriture de quelques 2 500 billets écrits au cours des ans. Plus de 500 la première année ! Mais en 2002, un billet c’était souvent l’équivalent d’un « gazouillis » aujourd’hui. Bon, je n’ai pas terminé il me semble de noter les réflexions que cet exercice m’inspire. J’ai au moins une ou deux autres pages à écrire où je veux rassembler sous quelques thèmes mes « meilleurs billets », ou encore une liste annualisée des 1 à 5 meilleurs par an… Je compléterai au cours des prochains jours.

Bonne lecture ! Suite sur la page Vingt ans.