écosystèmes de l’ESS

Un numéro spécial de la revue Interventions économiques, sur le thème : Économie sociale et solidaire, ses écosystèmes. On y retrouve, parmi d’autres,  un texte introductif de Benoît Lévesque Économie sociale et solidaire et entrepreneur social : vers quels nouveaux écosystèmes ?; de Jean-Louis Laville et al. Théorie de l’entreprise sociale et pluralisme : L’entreprise sociale de type solidaire; et de Hugues Sibille D’où vient, où va l’entrepreneuriat social en France ? Pour un dialogue France-Québec sur l’entrepreneuriat social.

commun, révolution et sociologie

Dans le billet précédent je faisais référence à cette conférence de Streeck, donnée à l’École des hautes études en sciences sociales. Incidemment ce panel donnait aussi la parole à Thomas Piketty. Deux conférences d’une demi-heure qui valent d’être entendues (et aussi, mais dans une moindre mesure les deux autres interventions par Carla Hesse, historienne, et Étienne Balibar, philosophe) . La place de l’économie hors et dans les sciences sociales et l’importance pour la sociologie et les sciences sociales en général de ne pas laisser l’économie à la seule science économique.

Une référence de Streeck et Fourcade, dans leur conversation sur les États et les marchés, je viens de mettre la main sur cette « brique » de près de 600 pages bien tassées.


Commun, essai sur la révolution au XXIe siècle
, par Pierre Dardot et Christian Laval. Vous pourrez en lire l’introduction en cliquant sur l’image ci-contre.

La Table des matières (PDF 5 pages) promet !

Modes d’existence : l’enquête

Un ambitieux projet que celui de Latour, qui a voulu associer ses lecteurs dans un processus d’écriture et de poursuite de la recherche amorcée par son Enquête sur les modes d’existence : une anthropologie des modernes.

Cela donne le site AIME. Un espace où les lecteurs peuvent ajouter des commentaires, des textes…

Je croyais avoir parlé de ce texte ici, mais ne trouve aucune référence. Seulement les citations extraites d’un livre précédent Changer la société, refaire la sociologie, une introduction à la théorie de l’acteur-réseau.

Si la société « moderne » ne peut plus s’imposer comme étant le modèle à suivre — ce serait même le contraire — elle ne peut non plus s’extraire de la solution à trouver. Il y a quand même quelque chose à « sauver » dans cette modernité, quelque chose à marier avec les autres modes d’existence (Comment composer un monde commun ?) que Latour approche avec une méthode issue de la sociologie des sciences et de l’anthropologie.

Un projet à suivre…

Ne vous laissez pas rebuter par une certaine prépondérance de l’anglais (notamment le titre qui demeure en anglais, même quand on passe à la version française du site… ou le fait que le site ne détecte pas l’interface de préférence du visiteur…). 

autour de Latour

Extraits de Changer la société, refaire la sociologie, une introduction à la théorie de l’acteur-réseau, par Bruno Latour.

Dans des situations où les innovations abondent, quand les frontières du groupe sont incertaines, quand la gamme d’entités qu’il faut prendre en considération devient fluctuante, la sociologie du social n’est plus capable de tracer les nouvelles associations d’acteur. p.19

La dispersion, la destruction et la déconstruction ne sont pas des objectifs à atteindre, mais précisément ce qu’il s’agit de dépasser. Il est plus beaucoup important d’identifier les nouvelles institutions, les nouvelles procédures, les nouveaux concepts capables de collecter et reconnecter le social.  p. 22

[ La sociologie de l’acteur-réseau évite de fonder ses analyses sur des listes et catégories d’acteurs, de méthodes, de domaines déjà établis comme faisant parti du monde social, pour se définir à partir de 5 niveaux d’incertitudes quant à la nature des éléments constituants de ce monde : ]

  1. sur la nature des regroupements : il existe de nombreuses manières contradictoires d’assigner une identité aux acteurs
  2. sur la nature des actions : dès qu’on suit un cours d’action donné, un vaste éventail d’êtres font irruption pour en transformer les objectifs initiaux;
  3. sur la nature des objets : il semble que la liste des entités qui participent aux interactions sociales soit beaucoup plus ouverte qu’on ne l’admet généralement ;
  4. sur la nature des faits établis : les controverses se multiplient sur la nature des sciences naturelles et leurs liens de plus en plus étranges avec le reste de la société ;
  5. et, finalement, sur le type d’études conduites sous l’étiquette d’une science du social, dans la mesure où on ne voit jamais très clairement en quoi les sciences sociales seraient empiriques. 34

La sociologie de l’acteur-réseau prétend être mieux en mesure de trouver de l’ordre après avoir laissé les acteurs déployer toute la gamme des controverses dans lesquelles ils se trouvent plongés. (…) La tâche de définition et de mise en ordre du social doit être laissée aux acteurs eux-mêmes au lieu d’être accaparée par l’enquêteur. 36 [encore des extraits]

Plutôt que de discuter pour s’entendre sur une définition de ce qui est, la discussion porte sur ce qui se passe.

L’exemple de la soie et du nylon, page 60, est plutôt réducteur, et révélateur du fait que mettre trop d’importance à la nature du symbole médiateur peut faire oublier ce qu’il habillait…

Qui parle ? Qui agit ? De quel rassemblement d’acteurs parlons-nous ?
Que font-ils ? Que cherchent-ils à faire ? Comment s’expriment, évoluent leurs objectifs ?
Auprès de qui ? De quoi ? Avec qui ? Comment ? Avec quels moyens agissent-ils ?
Avec quels effets ? Quels sont les faits qui ont soutenu, contribué à définir l’action ?
Qui rendra des comptes à qui ? Quelles formes prendront les produits de la démarche ?

En quoi la théorie de l’acteur-réseau (ANT – actor-network theory) peut-elle servir dans le cadre d’une recherche sur les réseaux locaux de services ? Si on parle d’un processus plutôt que de canalisations, d’un travail en cours d’assemblage réalisé par les acteurs plutôt que de mécanismes d’intégration imposés… si on souhaite décrire les actions, les initiatives de ces acteurs sans les encadrer au préalable dans des perspectives figées, alors oui, la théorie de l’acteur-réseau peut être utile.

plus d’immigrants au Canada qu’aux USA

nombres et pourcentages d’immigrants depuis 1901, Canada

J’ai toujours pensé que les États-Unis étaient une terre d’accueil des immigrants… mais pas autant que le Canada, suivant ce graphique de Statistique Canada. Un cinquième de la population canadienne était immigrante, en 2006, comparativement à 13 % pour les États-Unis (suivant le Harper’s Index de avril). Incidemment, ce dernier numéro de la revue américaine comprend un inédit de John Le Carre, un article de l’anthropologue Claude Lévi-Strauss éclairant sur la question des liens de filiation dans le contexte des technologies de la reproduction assistée, une critique des liens que certaines municipalités développent avec Google sous prétexte de donner un accès rapide à Internet à leurs citoyens… Je crois que je vais m’abonner !

science sociale fiction

Je voulais écrire une courte nouvelle décrivant une collaboration idéale, inspirée de situations réelles ou fictives, articulant des partenaires indépendants (publics, privés, philanthropiques, communautaires, municipaux, nationaux) autour d’objectifs de développement économique et social. Une collaboration créative autour d’un but : la croissance optimale des enfants de 0 à 5 ans. Améliorer la qualité de l’éducation et du support accordés aux enfants de cet âge est un des investissements les plus rentables qui soit. [ voir les rapports « Early Years Study »] Plus de santé = de meilleurs résultats à l’école = moins de décrochage scolaire = une meilleure intégration au travail = moins de pauvreté, moins d’enfants négligés… Entre la chronique sociale, la politique-fiction et l’essai sociologique.

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Les acteurs concrets ne sont pas idéaux. Les acteurs concrets ont des motivations multiples dont plusieurs sont cachées aux acteurs eux-mêmes, inconscientes. Issues de l’histoire plurigénérationnelle de familles, clans, corps, intérêts.

S’il peut être utile de formuler, d’expliciter les motivations et objectifs des réseaux d’acteurs il serait présomptueux de tenter de tout contractualiser. La part d’implicite sera toujours la plus importante. Autrement dit, il y a un capital de confiance (ou de méfiance), préexistant à la relation d’aujourd’hui, que cette relation viendra renforcer ou dilapider. Un capital de confiance issu de l’histoire récente (les actions et rôles passés des acteurs présents) ou plus lointaine (savoirs incorporés dans des institutions, des organisations, des capitaux). Continuer la lecture de « science sociale fiction »

les chiens de faïence

Savoir académique et savoir d’expérience
Ont trop souvent l’apparence de chiens de faïence
Qui se regardent sans se voir,
Chacun campé sur son trottoir,
Ou ne serait-ce pas plutôt
L’un dans la rue, l’autre à sa tour ?
Et pourtant il n’y a de Science
Qui n’ait trempé la théorie au feu de l’expérience

En matière de réseaux sociaux (de proximité), sujet furtif s’il en est un,
Auquel on ajoute une bonne portion de politique
Qu’elle se drape de responsabilité populationnelle
Ou se meuve en relations de pouvoir
Dans des réseaux locaux de services
Intégrés ou évanescents
La science ne peut se passer de l’expérience
Ni cette dernière se pérenniser
Sans un travail de justification.

Réseaux sociaux qui ne sont pas
Que des objets de recherche mais d’abord
Des forces, des vecteurs, des noeuds de valence
Dans les toiles du possible
Des points d’ancrage et de transcription
De transbordement et transmission
De résistance et de fluidité
Qui effectuent, incarnent les pouvoirs
Tendus de la situation, des stratégies à l’oeuvre.

format familial

À l’heure où l’on discute de la « disparition » de la famille traditionnelle, à l’occasion de la diffusion des statistiques du recensement, il est bon de se demander jusqu’à quel point elle a vraiment existé. Jusqu’où la « famille traditionnelle », à l’époque où elle était hégémonique, fut-elle de même nature, pour les familles ouvrières, paysannes ou bourgeoises ? Quels types de liens étaient noués par les familles élargies ? Et les familles nucléaires des dernières décennies, où le poids du « Pater » s’est graduellement affaibli en même temps que celui de la tradition et de la religion, sont-elles de même nature dans les familles ayant des propriétés, des capitaux à léguer et celles qui n’en ont pas ?

Voir : Fluid “Traditional” Families – où l’on apprend que l’adoption à l’âge adulte chez les Japonais est assez fréquent…

lectures d’été

En plus des inévitables romans policiers ou noirs (les derniers Indridasson et Mankell, que j’ai déjà dévorés), j’ai fouillé pour trouver quelques livres dont j’avais amorcé ou reporté la lecture : L’histoire de Pi, de Yann Martel; Premier bilan après l’apocalypse, de Frédéric Beigbeder; et pourquoi pas de cher Harrison White, Identité et contrôle, qui mériterait encore un effort de lecture pour quelques chapitres de plus, les premiers lus l’été dernier ayant été plutôt inspirants, si je me souviens bien. J’ai l’impression que le langage énigmatique (faute d’un meilleur qualificatif) de cet auteur convient bien à la réflexion sur les changements en cours dans le réseau de la santé.

Je dois aussi passer à la librairie chercher deux De Gaujelac commandés il y a quelques semaines : Qui est « je » ? et La société malade de la gestion, ce dernier texte n’est pas jeune, mais la dernière édition comporte une nouvelle introduction qui vaut la peine, semble-t-il.

On m’a aussi suggéré, prêté même, Thinking, Fast and Slow de Daniel Kahneman. Jonah Lehrer en dit quelques mots dans un billet récent (Why smart people are stupid) de son blogue – Frontal Cortex – déménagé depuis peu sous les auspices du site The New Yorker. Tout ce qui peut permettre de restituer à sa juste mesure l’esprit rationnel… est bienvenu.